Article [anoté et illustré] d’après le Monde du 13/02/08, Laurence Caramel, forêt de Caillebert (Sarthe, 72)
Gilles Cardot ne regardera plus jamais pousser ses arbres comme avant. Avant, c’était quand ce forestier, responsable de 25 000 hectares dans l’ouest de la France, croyait avoir l’éternite devant lui. Tout a changé en 2003. « Au lendemain de la canicule, nous avons décidé que, malgré toutes les incertitudes, il etait plus raisonnable de croire au changement climatique et de commencer à agir« , explique son directeur, Laurent Piermont. Les deux hommes travaillent pour la Societe forestière, qui gère en France 250 000 hectares de forêts privées pour le compte de grandes institutions bancaires ou de sociétés d’assurances.
[ Ajoutons également le rôle des tempêtes de l’hiver 1999 dans cette prise de conscience par étape : « [...] De mémoire d’homme, les deux tempêtes qui ont traversé la France au cours de l’hiver 1999 constituent la plus forte perturbation naturelle ayant jamais frappé les forêts françaises. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : 500 000 hectares touchés, 350 millions d’arbres abattus, 140 millions de m3 de bois à terre, plus de 4 milliards d’euros de perte… Mais, plus encore que leur ampleur, les tempêtes ont surtout servi de catalyseur à un vaste débat sur les différents rôles écologique, économique, mais aussi social qu’il faut désormais assigner à la forêt. Jean-Marc Brézard, chargé de mission pour l’environnement à l’Office national des forêts (ONF), le reconnaît : « Les tempêtes ont rendu la société plus attentive à la pression qui s’exerce sur les milieux naturels. » ]
Par ce matin gelé de janvier, ils ont chaussé leurs bottes pour passer en revue la forêt de Caillebert, dans la Sarthe. Cette forêt de 250 hectares est devenue un laboratoire de l’adaptation aux effets du réchauffement. A cause de la pauvreté de ses sols sableux, des essences réputées résistantes y ont été introduites depuis longtemps. Le plan de gestion, qui constitue la mémoire du travail accompli, en témoigne. Celui de Caillebert offre une rare diversité entre les futaies de chênes, de chataigniers, de pins, de peupliers… « Ici, nous ne replanterons pas de pins maritimes, nous allons faire un essai avec un robinier sélectionné en Hongrie pour sa resistance a la secheresse« , explique M. Cardot devant une friche fraichement coupée de 7 hectares. Le choix de ce cultivar hongrois ne tient pas au hasard : la plaine du Danube connait aujourd’hui les étés caniculaires que la France pourrait subir dans quelques décennies. L’évolution des forêts australiennes, soumises depuis plusieurs années à des épisodes de sécheresse exceptionnelle, est également observée avec attention.
Le changement climatique agit de facon paradoxale sur les arbres. D’un côté, la teneur plus élevée de CO2 dans l’atmosphere stimule leur croissance, de l’autre, le manque d’eau lié aux fortes chaleurs estivales met en péril leur survie. Pour anticiper les effets du rechauffement, les forestiers s’appuient sur les scenarios du Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (GIEC), complètes par les travaux menés plus localement par Meteo France ou l’Institut national de recherche agronomique (Inra).
Selon leurs prévisions, l’avenir des arbres francais se jouera apres 2050, quand la fréquence des canicules augmentera. « Plus que la multiplication des tempetes ou l’apparition de gelees precoces, la repetition des canicules represente la vraie menace pour la foret« , souligne M. Piermont. Pour anticiper ce bouleversement, la Societe forestiere a divisé ses arbres en deux categories. D’un cote, ceux dont l’esperance de vie ne va pas plus loin que le milieu du siècle. Pour eux, l’intervention se limite a alleger la densité des plantations, pour s’adapter aux moindres réserves des sols en eau, et a programmer des coupes plus précoces. Les pins laricio, par exemple, ne seront plus recoltés a soixante-dix ans mais à cinquante. De l’autre, tous les arbres qui devront encaisser de plein fouet les coups de chaud estivaux annonces apres 2050. « La, nous entrons dans une zone d’incertitudes« , reconnait le directeur de la Societe forestiere.
Certaines essences sont d’ores et deja placées sur la liste des espèces menacées, comme l’epicea commun, le sapin de Vancouver, le hêtre ou le chêne pédonculé. « Nos chenes végètent« , confirme Gilles Cardot en montrant des spécimens aux troncs anormalement étroits pour leur âge. Certains n’ont pas resisté aux secheresses de la fin des annees 1980 puis de 2003 et offrent le spectacle de longs futs décharnés. Ils seront peu a peu remplacés par des chataigniers ou des robiniers, deux essences que la Societe forestière a retenues dans sa liste des variétés de transition, capables de survivre dans les conditions climatiques prévues apres 2050. Ces espèces, parmi lesquelles se trouvent aussi le tilleul, le cèdre, le pin laricio ou le chêne sessile, seront progressivement confortées ou introduites à Caillebert et ailleurs en France.
La diversification des essences offre pour l’instant la seule parade au changement climatique. Mais les forestiers avancent sur ce terrain avec modestie, car ils ne sont certains que d’une chose : « La nature ne repond jamais comme les hommes pourraient s’y attendre. »
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