Rythmes, anthropocentrisme et clichés

« Human societies now make the choices concerning the allocation of lands, water and other resources which determine which of the diversity of life forms will continue to exist. » Timothy M. Swanson.

Rythmes, anthropocentrisme et clichés dans -> PERSPECTIVES TRANSVERSES image0011

     Devant les certitudes des uns, les chiffres des autres, difficile de prendre une position claire autre que théologique (c’est bien, c’est mal), bien laborieux d’avoir une vue d’ensemble (croyant régler ceci, je déséquilibre cela). Alors dans ce brouhaha d’opinions multiples, peut-être qu’une question pourrait nous ouvrir une porte : que se passe-t-il lorsqu’une espèce impose son ou ses (bio)rythmes (démographique, consommation, production…) à l’ensemble de la biosphère ?

Accélérer l’évolution à travers les OGM, accélérer la radioactivité naturelle à travers exploitation de l’énergie nucléaire civile, accélérer l’écoulement des eaux à travers l’imperméabilisation des sols (urbanisation, infrastructures de transport) etc. etc.….

Si l’on se positionne en termes de rythme de changement, on retrouve le niveau deux tel que défini par Bateson dans sa théorie de l’apprentissage en tant que changement. De manière analogique, ce niveau correspond à l’accélération ou à la décélération, soit au changement dans la vitesse d’un objet mobile : « apprendre à apprendre à recevoir un signal ».

0 : « je mets ma main au feu, et je me brûle. »
1 : « j’ai mis ma main dans le feu, j’ai été brûlé et je ne le referai plus. »
2 : « généralement je ne risque pas d’être brûlé, mais cela pourrait m’arriver si je devais sauver autrui d’un incendie. »

Changement dans le climat qui lui-même est un équilibre changeant, une étude plus approfondie du niveau deux d’apprentissage pourrait nous apporter un éclairage intéressant en terme de communication et sensibilisation environnementale sur le changement (l’accélération) climatique. Voilà qui pourra faire l’objet d’un prochain article de ce blog.

S’il est bien difficile de se prononcer sur le diagnostic, les chiffres des uns, les évaluations des autres, ce dont nous pouvons discuter dès maintenant, c’est de la méthode, c’est du message implicite caché derrière l’ensemble des discours. Ce que nous pouvons déjà faire sans aucune idéologie ni information sur la question, c’est de dépolluer certains discours de leur bêtise la plus primaire (le CO2 n’est pas la nouvelle pomme d’Adam).

Evaluer

     Pour l’heure constatons que les deux grands succès de salle célébrés par le monde, que furent la « Marche de l’empereur » et le « Cauchemar de Darwin », nous ont proposé un hymne, le triomphe complet et sourd des forces de l’anthropomorphisme et de l’ethnocentrisme associées, et cela sans masque aucun. Ainsi, à côté des pertes constatées quotidiennement en termes de biodiversité (bien que la notion demeure également confuse), on est en droit de craindre que l’activité continuelle de ces forces de la grande communion universelle, n’induisent une perte tout aussi importante au niveau des espèces incorporelle (culture, art, idées neuves tout simplement). Alors oui, les pingouins peluches chantent en cœur le nouveau testament, pendant que  l’agriculteur noir aux regards grave de blanc, une arrête de poisson sur le sable, son droit tendu vers l’homo-universalus débilitant…

Guattari faisait le constat suivant : «la planète terre connaît une période d’intenses transformations technico-scientifiques en contrepartie desquelles se trouvent engendrés des phénomènes de déséquilibres écologiques menaçants, à terme, s’il n’y est porté remède, l’implantation de la vie sur sa surface […]. Les formations politiques et les instances exécutives paraissent totalement incapables d’appréhender cette problématique dans l’ensemble de ses implications. Bien qu’ayant récemment amorcé une prise de conscience partielle des dangers les plus voyants qui menacent l’environnement naturel de nos sociétés, elles se contentent généralement d’aborder le domaine des nuisances industrielles et, cela, uniquement dans une perspective technocratique.  »

Mais si comme le dit Bateson : « j’affirme que si vous voulez parler de choses vivantes, […] il est indiqué d’utiliser un langage […] qui est en phase avec le langage du monde biologique[1] », on ne peut plus se satisfaire de penser isolément la seule écologie environnementale, tout en conservant nos schémas de représentation dialectiques et anthropocentrés. Projeter notre cosmologie, c’est le degré zéro de la pensée des rapports au non humain et c’est précisément ces rapports de l’humain au non humain, de l’humain à l’humain sur lesquels il conviendrait de changer de perspective. Autrement dit il est nécessaire d’articuler les différents « contextes » de l’existence (naturel, social, mental), dans la mesure où  il existe une écologie, comme une biodiversité, tant des espèces immatérielles (idée, œuvre d’art, mode d’existence, …) que matérielles (végétaux, animaux…), plutôt que de rabattre l’ensemble des points de vue ou perspectives sur une idée abstraite et contingente d’une forme homme.

Pour répondre à ce défi, Guattari conçoit ce qu’il appelle l’écosophie comme articulant :

  • l’écologie environnementale pour les rapports à la nature et à l’environnement,

  • l’écologie sociale pour les rapports au « socius », aux réalités économiques et sociales,

  • l’écologie mentale pour les rapports à la psyché, la question de la production de la subjectivité humaine.

A partir de là, la question de la production de la subjectivité humaine (de quels types de rapports au monde je suis capable ?) n’est donc plus déconnectée de la question écologique : « parallèlement à ces bouleversements [dans l’écologie environnementale], les modes de vie humains, individuels et collectifs, évoluent dans le sens d’une progressive détérioration. Les réseaux de parenté tendent à être réduits au minimum, la vie domestique est gangrenée par la consommation mass-médiatique, la vie conjugale et familiale se trouve fréquemment « ossifiée » par une sorte de standardisation des comportements, les relations de voisinage sont généralement réduites à leur plus pauvre expression… C’est le rapport de la subjectivité avec son extériorité – qu’elle soit sociale, animale, végétale, cosmique – qui se trouve ainsi compromis dans une sorte de mouvement général d’implosion et d’infantilisation régressive. L’altérité tend à perdre toute aspérité. Le tourisme, par exemple, se résume le plus souvent à un voyage sur place au sein des mêmes redondances d’image et de comportement. »

Pertes en diversité

     D’après le Millenium Ecosystem Assessment, environ 60 % des écosystèmes de la planète sont aujourd’hui détruits ou utilisés de manière non durable. L’hypothèse que nous pouvons faire est alors que s’il existe moins d’éléments biophysiques, alors il existe moins de possibilités d’agencements (symbiose, alliance, compétition), donc de possibilités de vie et de développement. D’où un appauvrissement de la production dans l’immatériel (affect, concept, percept). L’écologie nous renvoie donc presque immédiatement aux conditions matérielles de la production de l’immatériel. Une époque peut-être vue comme une combinaison de forces particulière (révélée, rencontrées, associées) constituant des corps comme autant de formes singulière. Les agencements possibles (mise en rapport, composition) d’avec ces formes déterminent des modes de pensés et représentation, parmi lesquels va émerger un mode de « domestification » dominant de la nature, soit des conditions particulières de production matériel. En conséquences cela va conditionner des modes d’existence possibles, des degrés de coexistence et à partir de là, des conditions particulière de production de l’immatériel (organisation de la production artistique, artisanale…).

Parallèlement aux pertes en biodiversité et d’après les chiffres de l’Unesco :

  • plus de 50% des 6000 langages présents dans le monde sont en danger d’extinction.
  • 96% des 6000 langages ne sont parlés que par 4% de la population mondiale.
  • 90% des langages ne sont pas représentés sur Internet.
  • En moyenne, un langage disparait toutes les deux semaines.

Ce qu’il est important de noter dans un cas comme dans l’autre, c’est qu’on ne remarque jamais l’absence ou la disparition d’un inconnu. 

Cette perte globale en diversité est également à constater au regard de la croissance exponentielle de nos capacités technologiques d’un côté et de nos usages toujours plus standardisés de l’autre. Nous suivons ici Lawrence Lessig lorsqu’il s’interroge sur l’avenir de l’Internet dans son ouvrage The Future of Ideas: « how an environment designed to enable the new is being transformed to protect the old- transformed by courts, by legislators, and by the very coders who built the original »

Ainsi nous pouvons concevoir une double réduction des « diversités » :

  • Une réduction « objective » des choses ou la biodiversité des formes de vie. En effet, une possibilité de vie disparaissant de la chaine crée des effets en cascades par le jeu des alliances, synergies et symbioses possibles. Ce faisant sa disparition ou sa non-existence entraine des pertes globales exponentielles, un peu à l’image de la faillite d’un gros client pour ses multiples fournisseurs.

  • Une réduction « subjectives » autrement dit des modes de pensée qui définissent ce qui est acceptable ou pas, permettent l’accès au sentiment de la différence, ne réduisent pas l’autre à moi, rencontrent plutôt que reconnaissent un prêt à penser. Or la confusion et l’indifférenciée sont aujourd’hui des pollutions irréversibles pour des esprits toujours plus réduits à n’être que de simples passeurs de clichés. Clichés fabriqués de points de vue toujours plus identiques et identitaires et confiés à une pensée qui ne fait plus que dupliquer une représentation préconstituée du « réel », de laquelle elle ne reconnait plus que les effets de ce que elle y a mis elle-même. De combien de termes disposons nous actuellement pour exprimer un problème ? Le prêt à penser actuel implique un appauvrissement des termes disponibles et accessibles, et les mots se meurent comme les abeilles.

« Plus le sentiment de l’unité avec nos contemporains augmente, plus les hommes s’uniformisent, plus aussi ils ressentent sévèrement la moindre différence comme immorale. C’est ainsi que se forme nécessairement le sable humain : tous très semblables, très petits, très arrondis, très accommodants, très ennuyeux […] Un petit sentiment faible et obscur de bien-être médiocre uniformément répandu, une chinoiserie générale améliorée et poussée au bout – serait-ce là l’ultime image de l’humanité ? Inévitablement, si elle persévère dans les voies de la moralité antérieure. Il faut y réfléchir à fond : peut-être faudra-t-il que l’humanité tire un trait sous son passé, peut-être faudra-t-il appliquer à tout homme ce canon nouveau : soit différent de tous les autres et sois heureux que chacun diffère de son voisin. » Nietzsche 187 La volonté de puissance II

La confusion et l’indifférenciée sont une pollution irréversible pour des esprits toujours plus réduits à n’être que de simples passeurs de clichés. Clichés fabriqués de points de vue toujours plus identiques et identitaires et confiés à une pensée qui ne fait plus que dupliquer une représentation préconstituée du « réel », de laquelle elle ne reconnait plus que les effets de ce que elle y a mis elle-même. De combien de termes disposons nous pour exprimer un problème aujourd’hui. Le prêt à penser actuel implique l’appauvrissement des termes disponibles.

Dans « différence et répétition », Deleuze nous avertit : « il y a quelque chose dans le monde qui force (par effraction, interruption, violence) à penser », ce quelque chose est l’occasion d’une rencontre singulière avec [...] Ce quelque chose est une affaire de sensation, [...] et peut-être vécu sous une multitude de tonalités affectives différentes. »

Concluons sur cette phrase inspirante de Jean Genet : « mon courage consista à détruire toutes les habituelles raisons de vivre et à m’en découvrir d’autres »

Les extraits suivants constituent deux armes d’autodéfense extrêmes utile afin de lutter contre toute forme d’anthropocentrisme par trop standardisée.

Extrait de « Les mots et les choses » – Michel Foucault :

« Une chose en tout cas est certaine : c’est que l’homme n’est pas le plus vieux problème ni le plus constant qui se soit posé au savoir humain. En prenant une chronologie relativement courte et un découpage géographique restreint, la culture européenne depuis le XVIe siècle, on peut être sûr que l’homme y est une invention récente.

Ce n’est pas autour de lui et de ses secrets que, longtemps, obscurément, le savoir a rôdé. En fait, parmi toutes les mutations qui ont affecté le savoir des choses et de leur ordre, le savoir des identités, des différences, des caractères, des équivalences, des mots, – bref au milieu de tous les épisodes de cette profonde histoire du Même – un seul, celui qui a commencé il y a un siècle et demi et qui peut-être est en train de se clore, a laissé apparaître la figure de l’homme. Et ce n’était point là libération d’une vieille inquiétude, passage à la conscience lumineuse d’un souci millénaire, accès à l’objectivité de ce qui longtemps était resté pris dans des croyances ou dans des philosophies : c’était l’effet d’un changement dans les dispositions fondamentales du savoir. L’homme est une invention dont l’archéologie de notre pensée montre aisément la date récente. Et peut-être la fin prochaine.

Si ces dispositions venaient à disparaître comme elles sont apparues, si par quelque événement dont nous pouvons tout au plus pressentir la possibilité, mais dont nous ne connaissons pour l’instant encore ni la forme ni la promesse, elles basculaient, comme le fit au tournant du XVIIIe siècle le sol de la pensée classique, alors on peut bien parier que l’homme s’effacerait, comme à la limite de la mer un visage de sable. »

Extrait de « Pourparlers » – Gilles Deleuze :

« C’est que les forces de l’homme ne suffisent pas à elles seules à constituer une forme dominante où l’homme peut se loger. II faut que les forces de l’homme (avoir un entendement, une volonté, une imagination, etc.) se combinent avec d’autres forces : alors une grande forme naîtra de cette combinaison, mais tout dépend de la nature de ces autres forces avec lesquelles celles de l’homme s’associent.

La forme qui en découlera ne sera donc pas nécessairement une forme humaine, ce pourra être une forme animale dont l’homme sera seulement un avatar, une forme divine dont il sera le reflet, la forme d’un Dieu unique dont l’homme ne sera que la limitation (ainsi, au XVIIe siècle, l’entendement humain comme limitation d’un entendement infini).

C’est dire qu’une forme-Homme n’apparaît que dans des conditions très spéciales et précaires : c’est ce que Foucault analyse, dans Les mots et les choses, comme l’aventure du XIXe siècle, en fonction des nouvelles forces avec lesquelles celles de l’homme se combinent alors. Or tout le monde dit qu’aujourd’hui l’homme entre en rapport avec d’autres forces encore (le cosmos dans l’espace, les particules dans la matière, le silicium dans la machine…) : une nouvelle forme en naît, qui n’est déjà plus celle de l’homme [...] »



[1] Gregory Bateson, op. cit., chapitre 32.

Notions de base sur la ressource en eau

Notions de base sur le cycle de l’eau  

« L’eau que vous buvez a été pissée six fois par un diplodocus. » Paul-Emile Victor.

Notions de base sur la ressource en eau dans -> NOTIONS D'ECOLOGIE image001

     Alimenté par la machine thermique solaire, le cycle de l’eau se compose d’un ensemble de flux entrants et sortants des différents réservoirs existants. Nous avons d’un côté les réservoirs qui font office de conducteurs à circulation rapide – les cours d’eau et l’atmosphère, et de l’autre ceux qui jouent le rôle d’accumulateurs à circulation lente – les glaciers, nappes et océans.

Trois grands processus ou transformations animent le cycle de l’eau : l’évaporation, la transpiration végétale et les précipitations. Initialement, la vapeur d’eau provenant de l’évaporation[1] des océans sous l’effet de la chaleur solaire est transportée par les vents dans l’atmosphère. La température diminuant avec l’altitude, la vapeur se condense alors sous l’aspect de nuages puis retombe sur terre sous la forme des précipitations. Par suite, le ruissellement des eaux de pluies alimente les cours d’eau, les nappes souterraines et les végétaux dont la transpiration retourne à l’atmosphère une partie de l’eau. Notons ici que si l’eau est capable d’accomplir les différente étapes de ce cycle, elle le doit essentiellement au fait que la terre se trouve dans une région unique du ciel, d’où la température du Soleil n’est ni trop élevée ni trop basse.

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L’eau « bleue [2]» est celle qui s’écoule des rivières jusqu’à la mer, les lacs, nappes souterraines…elle représente 40% des précipitations continentales. Les 60% restant constitue l’eau verte, c’est-à-dire l’eau dans le sol disponible aux plantes. L’eau bleue est transformée en eau verte par l’irrigation ; l’eau verte est transformée en eau bleue par le drainage des sols. L’eau bleue peut être transportée, l’eau verte doit être consommée sur place par les plantes.   

      Les plantes jouent un rôle primordial dans la circulation de l’eau, l’arbre étant une véritable “ machine à évaporer “ dans la mesure où seulement 1% de l’eau captée sert à l’élaboration de la matière végétale. Ainsi si la formation de 100 grammes de cellulose ne requière directement que 55 grammes d’eau, l’arbre perd dans le même temps 100 000 grammes d’eau par transpiration. Nous savons que les plantes puisent l’eau et les minéraux nécessaires à leur croissance dans les sols par l’intermédiaire de leurs organes racinaires. Pour ce faire, les végétaux ne possédant pas de pompe interne pour faire circuler la sève (à la différence du cœur pour les animaux), c’est sous l’action de la chaleur fournie par le soleil que la transpiration des feuilles joue ce rôle de moteur et fait monter (pression osmotique) l’eau des racines jusqu’aux feuilles.

Grosso modo un arbre évapore donc mille fois ce qu’il gagne en poids. D’où le rôle de régulateur climatique des plantes et les effets dévastateurs de la déforestation. Variable selon les essences et le climat, un érable isolé peut émettre plus de 200 litres d’eau par heure, par jour une forêt de chênes d’un hectare, 30 tonnes. Ces valeurs, si élevées soient-elles, sont généralement couvertes par les seules précipitations. Néanmoins en milieu urbain, la quantité d’eau rejetée par les arbres est souvent supérieure à celles-ci ce qui demande une importante croissance des racines. Dans un pays éloigné de la mer, comme l’Allemagne, la moitié seulement des précipitations atmosphériques proviennent directement de la mer, le reste est recyclé par la végétation.

La production végétale est assurée par le mécanisme de la photosynthèse, illustré ci-contre. Pour fonctionner ce cycle nécessite de la lumière et de l’eau (photolyse de la molécule d’eau), de sels minéraux (les fameux NKP des engrais) et enfin du CO2 nécessaire à la fabrication des molécules organiques. Par ailleurs, selon les plantes, l’optimum de température de leur activité photosynthétique est très variable. De à 15°C et 25°C pour les plantes des régions tempérées, de 30 et 45°C pour certaines des variétés tropicales.[3]

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     Chaque année il s’évapore plus d’eau qu’il n’en précipite au-dessus des océans (20%). Cette vapeur d’eau océanique vient donc précipiter sur les continents où, à l’inverse, il précipite plus d’eau qu’il ne s’en évapore (40% d’eau bleue). Ce « surplus » en eau retourne aux océans via la collecte des différents cours d’eau. C’est ce flux d’eau renouvelé qui constitue la « réserve annuelle » dans laquelle il est possible de puiser sans risque. (De l’ordre de) 40 000 kilomètres cubes.

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Il ne se crée, il ne se perd que très d’eau en consommation, l’eau disponible dépend des différences de vitesse de circulation entre les différents réservoirs, expliquant ainsi sa localisation et déterminant la « réserve annuelle ». Une molécule d’eau peut rester durant un certain temps dans chaque réservoir, cette  durée moyenne est appelée temps de résidence. Ainsi plus le temps de résidence dans un réservoir est court, plus l’eau de ce réservoir est rapidement renouvelée.

On peut estimer les différents temps de résidence dans les différents réservoirs[4] :

  • de 1 600 à 9 700 ans pour les glaciers et les calottes glacières ;
  • 1 400 ans pour l’ensemble des eaux souterraines ; variables selon les conditions géologiques de recharge ;
  • 2 500 ans pour les océans ;
  • 17 ans pour les lacs d’eau douce ;
  • 1 an pour l’humidité des sols ;
  • 16 jours pour les cours d’eau ;
  • 8 jours pour l’atmosphère ;

Ce sont ces durées de transit que l’homme perturbe par ses aménagements à grande échelle. Ce sont ces même durées transit qui risquent d’être bouleversées par le changement climatique et par voie de conséquence, la localisation des ressources en eau accessible à homme déjà sédentarisé.

A retenir également :

  • Parce qu’elle a pu prendre la forme liquide l’eau a pu rester sur terre.
  • Parce que l’eau a pu prendre la forme liquide la vie a pu se développer sur terre.


Etat initial de la ressource en eau au niveau mondial

    Nous ne sommes pas et ne serons pas dans un monde sans eau. Cependant si la pénurie d’eau n’est pas du tout généralisable dans la mesure où la terre ne perd pas d’eau, il en est autrement si l’on raisonne en termes d’accès immédiat à la ressource. En ce sens on observe une situation géographique très hétérogène et l’existence de véritables points noirs dont l’existence est susceptible de remettre en balance la stabilité de notre monde.  On pensera ici principalement à des régions ou pays tels que le Maghreb, le Moyen-Orient, la Chine et les USA, l’Indes, le Pakistan, le Brésil…Notons au passage qu’aucune des puissances économiques émergentes n’est épargnée par le problème.

Si les pénuries d’eau mondiales passées ont pu être comblées par l’amélioration de l’accès à la ressource (construction d’infrastructure de transport, amélioration des capacités de pompage et de stockage), nous sommes à présent confrontés à de nouvelles problématiques d’ordres qualitatifs (micropollutions diffuses), alors même que la problématique de l’accès soit toujours extrêmement prégnante en certains points du globe.

A ce contexte déjà incertain, il convient de surajouter le rôle du changement climatique en tant que facteur aggravant : des saisons sèches encore plus sèches, des saisons humides encore plus humides.

Pour évaluer l’offre et la demande mondiale en eau à horizon de trente ans, on s’appuiera sur les projections réalisées par l’International Water Management Institute à l’aide de son modèle prévisionnel PODIUM.

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World Water Supply and Demand: 1995 to 2025

En rouge sur la carte les pays qui souffrent d’une pénurie physique de la ressource en 2025. Soit des pays qui même en augmentant au maximum la productivité de leur eaux, n’ont pas assez de ressource pour couvrir leurs besoins agricoles, domestiques, industriels et environnementaux. Sont concernés, 45 pays pour 1/3 de la population mondiale. Les seules options pour ces pays sont d’investir dans le coûteux processus de désalinisation de l’eau de mer, de réduire l’irrigation pour transférer la ressource vers les autres secteurs en important plus de nourriture.

En orange sur la carte, les pays qui souffrent  d’une pénurie économique de la ressource en 2025. Ces pays ont potentiellement assez de ressource pour couvrir leurs besoins mais leurs infrastructures (transport, stockage, pompage) devront être améliorées de manière à augmenter de 25% l’eau disponible. Le coût des investissements, les capacités internes à soutenir de tels projets sont ici de réels facteurs limitant. Est concernée 45% de la population mondiale.

En bleu sur la carte, les pays ayant peu ou pas de problème sur la ressource.

Rouge + orange = 78% de la population mondiale en 2025.


Etat initial de la ressource en eau au niveau européen

    Si sur ces trente dernières années l’état tant qualitatif que quantitatif de la ressource c’est globalement améliorée, ici aussi les situations demeurent hétérogènes, ici aussi l’apparition de nouveaux types de pollution inquiète. D’après les l’agence européenne de l’environnement, les problèmes affectant le bon état de la ressource sont et seront :

Au niveau quantitatif :

  • la surexploitation des nappes souterraines afin d’irrigation agricole et de développement touristique dans le sud de l’Europe ;
  • l’intrusion d’eau salée dans les zones côtière ;
  • les conflits d’usage sur la ressource entre ville, campagne et producteur d’énergie ;
  • le développement économique des anciens pays de l’est.

Au niveau qualitatif :

  • les pollutions et micropollutions diffuses (nitrates, métaux, produits pharmaceutiques et phytosanitaires) ;
  • le développement des anciens pays de l’est.


Etat initial de la ressource en eau au niveau français

Trois rapports que l’on peut qualifier de « pessimistes » vont ici étayer notre analyse :

Le rapport sur la qualité de l’eau du Muséum national d’histoire naturelle (2005) qui note que, dans l’hypothèse la plus optimiste, moins de 50 % des masses d’eau (surfaces et souterraines) pourront atteindre un bon état écologique en 2015, sachant qu’aujourd’hui on ne peut que constater l’échec des actions publiques menées depuis 40 ans à la lecture des chiffres suivant :

  • 25 % des masses d’eau sont dans un bon état probable,
  • 25 % sont classées à risque,
  • 23 % relèvent de la catégorie « doute »,
  • 27 % sont des eaux artificielles ou fortement modifiées (comme les lacs de retenue des barrages). Ces dernières ne pourront jamais atteindre l’objectif de bon état écologique. »

Géographiquement le rapport nous enseigne également que:

  • les eaux du bassin Artois-Picardie sont polluées à 38 % et où 100 % des eaux souterraines sont classées « à risque ».
  • celles de Loire-Bretagne sont atteintes à 35 %
  • celles de Rhin-Meuse à 45 % (69% pour les eaux souterraines)
  • les eaux souterraines du bassin de Seine-Normandie sont polluées à 83 %

Le 6ème rapport annuel sur les pesticides dans les eaux de l’IFEN en date de juillet 2004, met en évidence la présence de pesticides dans 75% des points de mesure de la qualité des milieux aquatiques en 2002.

Enfin l’étude sur « la qualité de l’eau et de l’assainissement en France » de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (mars 2003) note que « la dégradation de la qualité de l’eau est quasi générale en France » du fait des nitrates et pesticides.

Bien que la France soit le premier utilisateur de pesticide au monde, il existe également des études plus « optimistes » qui mettent l’accent sur la réduction réelle des pollutions d’origines industrielles, l’amélioration des eaux urbaines et soutiennent sur cette base que nos capacités d’adaptation peuvent encore endiguer le déclin de la ressource. Cependant on trouve aussi dans ces études, les prémisses d’une inquiétude grandissante sur les thèmes de l’eau et de la nourriture, des effets sur la santé encore inconnus des micropolluants.



[1] Pour information, on estime à environ 1 000 km3 d’eau par jour l’évaporation des océans.[2] La distinction eau bleue / eau verte a été proposée par Falkenberg en 1995

[3] Pour en savoir plus, voir le site de l’université de Jussieu.

[4] D’après L’eau, Ghislain de Marsily, Dominos Flammarion, 1995

Tendances, anticipations et scénarii

Tendances, anticipations et scénarii dans -> ACTUS co2

Compte tenu des données aujourd’hui en notre possession, nous pouvons imaginer les scénarii suivants :

  • Changement climatique : augmentation de l’intensité des événements extrêmes, diminution des précipitations et hausse des températures en saison sèche. Poursuite de la fonte des glaciers et de la calotte polaire. Pour certaines des zones géographiques d’importances (grandes zones de production céréalière, zone d’approvisionnement en eau des mégalopoles), les effets potentiels restent imprévisibles à ce jour. 

  • Pression démographique : projection selon la moyenne de l’hypothèse basse et medium de l’ONU, soit autour des 9 milliards d’individu en 2050.  

  • Urbanisation et aménagement spatial: poursuite de l’urbanisation mondiale dans les pays en développement confirmant les projections attendues par l’ONU (2/3 de la population mondiale en 2050 vit dans les villes). Néanmoins des pressions à la baisse apparaissent dans les mégalopoles des pays industrialisés.  

  • Industrialisation : fluctuation cyclique de mouvements de délocalisation/relocalisation en fonction des ressources rares. 

  • Gouvernance mondiale : échec récurrent des négociations multilatérales (OMC, ONU), bilatéralisation des échanges commerciaux et concentration des accords sur des axes prioritaire (Chine/USA). Stagnation économique mondiale du fait du renchérissement des coûts environnementaux, de l’énergie et des matières premières induisant inflation et anticipations négatives. La réduction de l’horizon de confiance, une préférence accrue pour le présent freinent les investisseurs.  

  • Energie : Peak Oil, fin de la rente pétrolière dans certain pays producteurs et large déploiement du nucléaire civil.  

  • Santé : large déficit des systèmes de santé publics et continuation de la privatisation du secteur, apparition d’une médecine à deux vitesses du fait de la hausse des prix et de l’apparition de nouvelles pathologies complexes.  

  • Agriculture : poursuite des pressions (grande distribution, Brésil) à la baisse sur les prix à la consommation, i.e. à la baisse des revenus des producteurs dans un contexte de raréfaction de l’offre. Faible extension des terres arables pour limiter la déforestation et ses conséquences sur les climats locaux, la désertification et la sédimentation des cours d’eau. Le stock de nouvelles technologies agricoles  non encore usitées diminue, alors même que les rendements sont réduits du fait de la hausse des températures estivales et de la baisse du niveau des nappes dans certaines des régions productrice clés (Corn Belt). Au niveau du commerce agricole, on passe d’une logique d’accès des exportateurs aux marchés à une logique d’accès des importateurs au surplus disponibles, dans la mesure où la production mondiale de céréale est maintenant durablement inférieure à la consommation mondiale. les Seuls les changements de régime alimentaire viennent ralentir l’épuisement des stocks.

  • Conflits : terrorisme actif, menaces d’attaques sur les infrastructures de la ressource en eau (Turquie) et tensions frontalières sur les ressources partagées (Inde/Pakistan).

Ressource en eau et urbanisation

Des villes « hors-sol »

      En 1950, environ 750 millions de personnes vivaient dans les villes. En 2000, ce chiffre s’était élevé à 2,9 milliards. Les Nations unies prévoient qu’en 2050, plus des deux tiers d’entre nous vivront dans des villes, soit environ 6 milliards d’urbain. Une telle urbanisation à pour conséquence d’entraîner une concentration sans précédant des ressources et des déchets sur de très petits territoires. Ainsi chaque jour un flux énorme de nourriture, d’eau, de matière et d’énergie doit être amené vers les villes. Dans la situation actuelle, les termes des échanges ville/campagne sont donc caractérisés par un transfert à faible valeur ajoutée (matière première) des campagnes vers la ville, un transfert à forte valeur ajoutée (produits et services) de ville à ville, un transfert de déchet, de sècheresse et d’inondations de la ville vers les campagnes. 

Si les premières villes étaient fortement dépendantes des ressources en alimentation et en eau de leurs écosystèmes immédiat, les centre urbains actuels dépendent de plus en plus de sources éloignées, même pour des services de base comme l’alimentation et l’eau. 

  • Los Angeles tire l’essentiel de son approvisionnement en eau du Colorado, qui coule à environ 970 kilomètres de la ville.  Mexico, situé  à 2 300 mètres d’altitude, dépend d’un coûteux pompage situé à 150 kilomètres de la ville, 1 kilomètre plus bas. pour accroître un approvisionnement insuffisant.
  • Pékin envisage de faire venir de l’eau du bassin fluvial du Yangzi Jiang, à près de 1 500 kilomètres.  

En cas de pénurie d’eau, la disponibilité de l’eau et ses coûts de transport sur longues distances peuvent commencer à restreindre la croissance des villes. La nourriture vient d’encore plus loin, le cas de Tokyo en est une bonne illustration :  son blé vient en grande partie des grandes plaines des Etats-Unis et du Canada, et d’Australie; son maïs vient essentiellement du Midwest américain; son soja provient Midwest et du Cerrado brésilien. 

Dans un monde qui manquerait de terre et d’eau, la valeur de l’une et de l’autre pourrait augmenter considérablement, ce qui pourrait inverser les termes de l’échange ville/campagne.  Depuis le début de la révolution industrielle, le commerce n’a cessé de favoriser les villes parce qu’elles contrôlent les ressources rares (capital, technologie). Mais si la terre et l’eau deviennent les ressources les plus rares, les habitants des zones rurales qui les contrôlent pourraient (sous condition) infléchir les rapports de force, et dans certains cas, inverser la tendance à l’urbanisation. 

Prospective 

        Toute chose égale par ailleurs, quelle pourrait-être les projections en extrapolant les tendances actuelles ? Il s’agit ici de mettre en perspective les inévitables fractures territoriales induites par une rareté de la ressource en eau. Le poids économique des villes a rendu le rapport de force totalement inégal dans la « guerre » pour l’accès à une eau « propre », le partage de la ressource se faisant clairement au profit des villes, ce qui a pour conséquence d’entrainer dans certaines régions un nouvel exode rural venant grossir des banlieues en situation de précarité déjà avancée. 

A titre d’exemple la baie de Sommes est sacrifiée, devenant une zone d’expansion les crue afin de protéger Paris. L’eau pour l’irrigation est redirigée en priorité vers la Beauce, les régions voisines sont rayées de la carte agricole. Au sud de Lyon, le réchauffement climatique a déjà éradiqué bon nombre de culture, réduit le tourisme alors que l’eau est majoritairement destinée au refroidissement des centrales nucléaires en été.  Pour compenser les disparités de la ressource, se met en place au niveau européen de grandes infrastructures de transport de la ressource de métropole à métropole, excluant un peu plus les territoires ruraux. 

Dans les campagnes les plus touchées on s’organise : 

  • Développement de nouveaux modes de vie adaptés au rationnement de l’eau. 

  • Emergence de leaders paysans prônant des raids sur les approvisionnements des villes (eau et nourriture) et s’attaquant aux infrastructures touristiques. 

Dans les villes ont recherche une plus grande autarcie : 

  • L’augmentation des coûts de traitement, la nécessité de valoriser les ressources proches implique la fin du tout à l’égout, une collecte maximale des eaux de pluie, de nouveaux systèmes intérieurs, mobilier urbain… 

  • L’afflux de populations nouvelles en périphérie aggrave l’insécurité urbaine.

  • Protection et sécurisation des approvisionnements – captage, stockage et infrastructures de transport sous la menace sont sécurisés par l’armée. 

Lifeforms…suite

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Ressource en eau et sécurité alimentaire

Nous mangeons 500 fois plus d’eau par jour que nous n’en buvons ! 

     Sur les cinquante dernières années, l’expansion de l’irrigation a largement contribué à multiplier par trois la production mondiale de céréales. L’irrigation représente 70% de tous les usages de l’eau dans le monde alors même qu’elle est l’activité la plus consommatrice (l’eau s’évapore et ne retourne que très partiellement ou indirectement dans le cycle hydraulique local). Dans les pays où celle-ci a été mise en place à partir d’un surpompage des nappes d’eau souterraines, la diminution actuelle de ces dernières se traduira inévitablement à terme par un déclin de la production agricole. Autrement dit, dans un monde actuel de 6 milliards d’individus dont déjà 800 millions ne se nourrissent pas à leur fin (tendance en hausse), comment arriver à nourrir les 9 milliards d’homme attendus selon les projections 2050 ? Cela sans défricher encore plus de forêts et compromettre ainsi encore plus le cycle naturel de l’eau. 

    Non seulement la ressource en eau accessible diminue dangereusement en certains points du globe, alors même que la concurrence sur son usage s’intensifie à mesure que les demande en eau des villes, des industries, des producteur d’énergie, augmentent. Or l’ensemble de ces demandes ne peuvent être satisfaites qu’en détournant l’eau de l’irrigation, celle-ci étant  économiquement moins rentable. Dès lors le moyen le plus simple (pas d’investissement) pour couvrir les pertes engendrées sur la production locale de nourriture est de recourir à l’importation de céréales. Le risque est donc que nombre de pays en pénurie d’eau et aux besoins croissants en céréales ne submerge les capacités  des pays ayant des surplus disponibles à l’export : Etats-Unis, France, Canada et Australie.

Entre 1972, l’URSS anticipant de mauvaises récoltes sur son blé intérieur, entre secrètement sur le marché mondial et réussi à s’approprier la quasi-totalité des surplus exportables. Associée à la production mondiale moyenne des deux années suivante, cette manœuvre conduisit à un doublement du prix du blé sur le marché mondial. Durant cette période, des exportateurs tels que les USA (50% des surplus) durent sélectionner leur destination, privilégiant les pays politiquement « amis ».Plus près de nous, de 1995 et 2000, la Chine, jusque-là autosuffisante en soja, est devenue brutalement le plus grand importateur du monde, à hauteur de plus de 40 % de son approvisionnement. Suite aux vagues de chaleur de l’été 2003 que connu l’Europe, toutes les exportations de blés ont été gelées le temps d’évaluer les pertes.Par peur d’une explosion du prix intérieur de son riz face à la demande croissante de la Chine devant la chute de sa production  intérieure (pertes estimées à 10 millions de tonnes sur 2004), le Vietnam (2ème exportateur mondial) bloque ses exportations vers la Chine entre fin 2004 et mi 2005.       Aujourd’hui, un peu partout dans le monde, la rareté de l’eau fait augmenter les importations de céréales, ou menace de le faire, dans des Etats extrêmement peuplés comme la Chine, l’Inde, le Pakistan, le Mexique et autres pays pauvres dont les balances extérieures sont extrêmement sensibles au coût de leurs importations agricoles. Le cas de la Chine est néanmoins bien à part car avec près de 1,3 milliard d’habitants et un excédent commercial annuel de 80 milliards de dollars avec les Etats-Unis, elle a le potentiel à court terme pour perturber les marchés mondiaux de céréales. La chute des nappes phréatiques en Chine pourrait donc rapidement signifier une hausse des prix de la nourriture dans le monde entier. 

Prospectives 

    Toute chose égale par ailleurs, quelle pourrait-être les projections en extrapolant les tendances actuelles ? En imaginant la poursuite du mouvement de vente des droits en eau des fermiers du Sud des USA aux municipalités voisines afin d’assurer des usages domestiques grandissants, on assisterait à une déstabilisation croissante de la production intérieure américaine.  Ce phénomène serait renforcé du fait de la hausse des températures estivales réduisant le rendement des récoltes de la « Corn Belt ». Au final nous pourrions donc assister à une importante réduction des surplus agricoles US disponibles à l’export, dans un contexte où ceux-ci se doivent  fournir prioritairement la Chine pour financer leur déficit commercial, l’énorme stock de dollar amassé par les chinois servant de moyen de pression commercial et politique. 

De son côté le Brésil, pour des questions de coût de transport favoriserait l’exportation de ses produits agricoles vers les USA et ses marchés naturels d’AmSud. Par ailleurs, pour des questions d’équilibre hydrologique, le Brésil n’est que très peu capable de mettre en culture de nouvelles terres sous peine de condamner les existantes.  Quant à l’Europe, celle-ci a réduit ses surplus agricoles du fait des réformes de la PAC, d’une protection environnementale accrue et de la diversification dans les biocarburants. 

Les politiques doivent donc à présent arbitrer entre les besoins de leur population et le fait de fournir à minima un monde où le manque de nourriture et les conflits sur les ressources naturelles se multiplient en périphérie. 

Par ailleurs la remise en culture des terres aura un coût environnemental important, déforestation, usage massif engrais et pesticides. A court terme l’augmentation de la demande en eau pour l’irrigation serait compensée par moins d’eau à l’usage de l’environnement, car on ne pourra pas prendre sur la demande domestique, industrielle ou énergétique. D’où une dégradation violente des zones humides, une perte en biodiversité des eaux continentales, une perte en termes de biens et services environnementaux. Il faudra donc arbitrer entre concéder des sacrifices écologiques et sociaux sur son territoire ou accepter une aggravation des conditions écologiques et sociales  extérieures, dans un monde encore ouvert. 

Dans un monde ouvert où l’eau serait une ressource rare, il s’agit ici de bien comprendre la brutale contradiction entre protection de l’environnement et protection des besoins humains fondamentaux. 

Ressource en eau, gouvernance mondiale et sécurité

Un monde hétérogène

    Les prélèvements d’eau sont fortement concentrés géographiquement, puisque les cinq pays les plus utilisateurs d’eau (Inde, Chine, Etats-Unis, Pakistan, Fédération Russe) cumulent 60 % du total au niveau mondial.

  • L’Asie (61 % de la population mondiale), compte pour 68 % de l’eau consommée dans le monde. Facteurs explicatifs : densité de population très élevée et l’importance de la riziculture.

  • Le continent américain (13 % de la population) représente environ 14% du total mondial. Total incluant les Etats-Unis, troisième au rang des plus gros consommateurs. Facteurs explicatifs : niveau de développement élevé et du recours très important à l’irrigation.

  • L’Afrique avec une consommation de 9 %. Facteurs explicatifs : bas niveau de développement économique et rareté des ressources en zone aride.

  • L’Europe, avec une consommation de 8 % (sensiblement 50% pour l’Europe de l’Ouest). En prélèvements par habitants, l’Italie, le Portugal et l’Espagne arrivent en tête, avec des niveaux de prélèvement d’eau par habitant bien supérieurs à l’Allemagne et à la France, les pays d’Europe du Nord (Danemark, Suède, les Pays-Bas et le Royaume-Uni. Facteurs explicatifs : agriculture et irrigation.

Ressource en eau, gouvernance mondiale et sécurité dans -> NOTIONS D'ECOLOGIE image0013

    La situation mondiale est don marquée par une forte hétérogénéité des situations d’un pays à l’autre, à l’intérieur d’un même pays, du fait de la distribution spatiale de la ressource, du fait de ses usages. Au final il ressort l’existence de zones « rouges » capables de faire basculer les équilibres mondiaux, comme  parmi les cinq pays les plus utilisateurs d’eau (Inde, Chine, Etats-Unis, Pakistan, Fédération Russe), trois sont concernés par le surpompage de leurs nappes souterraines (Indes, Chine, Pakistan) soit 2.5 milliards d’individus.

Avec un ratio de dépendance de près de 77% (son approvisionnement en eau dépend à 77% d’une eau dont la source est extérieure), le Pakistan fait figure de véritable bombe à retardement au niveau de la gouvernance mondiale de la ressource en eau. En effet, la partition des Indes a laissé le basin de l’Indus divisé entre la république Indienne et le Pakistan, ceci n’etant pas sans poser de grave problème de répartition des eaux destinées à l’irrigation entre les deux pays, l’Inde détournant l’eau en amont. Un accord a été atteint en 1960 après 12 ans d’intenses négociations intermédiées par la banque mondiale, période émaillée par une multitude de conflits transfrontaliers.

     Aujourd’hui le Pakistan est un pays de 160 millions d’habitant (305 millions en 2050), connaissant une grave diminution du niveau de ses eaux souterraines pour cause de surpompage des nappes afin d’irrigation; un assèchement sévère de ses eaux de surfaces pour cause de dérivation. A l’image de l’Egypte, le Pakistan est essentiellement une civilisation dépendante des eaux de surface et principalement de l’Indus. Originaire de l’Himalaya, dans sa course à l’Ouest vers l’océan Indien, ce dernier ne fournit pas seulement des eaux de surface, mais permet également la recharge des aquifères souterrains nécessaires à l’irrigation (forage) du pays entier. Aujourd’hui sont touchées : 

  • la pleine fertile du Punjab, partagée avec l’Inde et véritable grenier de la région, où les observations montrent un abaissement annuel du niveau des nappes dans la zone Islamabad compris entre 1 et 2 mètre annuel sur les 20 dernières années.

  • dans la province du Balûchistân, près de la capitale Quetta, un abaissement de 3.5 mètres par an. Si rien n’est fait d’ici 15 ans la capitale n’aura plus d’eau tout comme la province dont 6 des bassins ont déjà épuisés toutes leurs réserves souterraines. A terme (10-15 ans) la région ne pourra plus compter que sur les canaux d’irrigation pour son approvisionnement en eau. 

  •  l’Indus avec l’assèchement de son cours aval à la saison sèche, lui qui fournit l’essentiel de l’eau d’irrigation (idem pour le Ganges).

Prospective

        Toute chose égale par ailleurs, quelle pourrait-être les projections en extrapolant ces tendances actuelles ? Face à la crise énergétique, l’UE intègre la Russie pour assurer son approvisionnement énergétique. Ce qui n’est pas sans poser de gros problèmes politiques au regards des diverses tensions sur les ressources qu’entretient la Russie sur ses frontières (Japon, Chine, Caucase…). Entre le Mexique et les USA, les tension sur les ressources en eau (Colorado, Rio Grande) se multiplient, entrainant des mouvements de migration massif et raid sur les ressources, des  conflits intérieurs avec la population latino américaine. Asie…

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