Un prix de l’eau structurellement en hausse au niveau mondial

D’après un article du « Earth Policy Institute », Edwin H. Clark, 7 mars 2007 : http://www.earthpolicy.org/Updates/2007/Update64.htm

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Les déterminants du prix de l’eau

       Sur les cinq dernières années, le prix de l’eau domestique a augmenté en moyenne de 27% aux Etats-Unis, 32% en Angleterre, 45% en Australie, 50% en Afrique du Sud, 58% au Canada. En Tunisie le coût de l’eau d’irrigation a été multiplié par quatre au cours de la dernière décennie. Le prix de la ressource en eau est largement déterminer par quatre facteurs :

  • le coût de transport de la source à l’usager,
  • la demande totale en eau exprimée par la concurrence des usages entre villes, agriculture et industrie,
  • le coût des traitements de potabilisation,
  • enfin le niveau de subvention de l’état ou des collectivités locales.

Le coût de transport est surtout proportionnel aux distances horizontales et verticales parcourues. D’un point de vue horizontal, les nouvelles villes en développement, comme certaines des mégalopoles existantes, doivent parfois chercher leurs approvisionnements en eau à plusieurs centaines de kilomètres pour satisfaire des besoins grandissant. Ainsi en Chine des canaux de plus de 1000 Kms sont actuellement en construction afin de transférer l’eau du fleuve Yangtze vers Pékin et les provinces du Nord.

D’un point de vue vertical, pomper l’eau du sous-sol ou vers des terre situés plus en altitude est un processus très couteux en énergie, dans la mesure ou l’on ne peut pas utiliser le transport passif par voie gravitaire. A titre d’exemple, 480 m3 pompé sur une hauteur de 100m3 correspond à l’utilisation de 200 KWh. Avec un prix moyen de 10¢ le KWh, le coût de 20$ n’inclut pas même encore les couts d’investissement et d’entretiens de la pompe, des puits et des conduites. A Beijing et dans les provinces du nord, il est parfois nécessaire d’aller chercher l’eau autour des 1000m. Mexico, située à 2,239 mètres d’altitude, est oblige de pomper une partie de son eau sur une hauteur de plus de 1000m. Les coûts opérationnels d’un tel pompage représentent à eux seuls 128.5 millions de dollars par an et plus d’énergie que toute celle consommée sur une année par la ville voisine de Puebla, ville qui compte tout de même 8.3 millions d’habitants.

Le dernier facteur influençant le prix de l’eau concerne le montant des aides publiques. Dans une ville comme Delhi, les habitant paient moins de 20% de ce qui est dépensé par la municipalité pour financer son service de fourniture en eau. En moyenne, on estime que près de 40% des collectivités du monde en charge d’approvisionner en eau leur population, sont incapables d’équilibrer les finance de leur service.  Dès lors celles-ci ne sont pas en mesure de renouveler correctement le matériel, ni d’effectuer les entretiens adéquats sur le réseau.

Quant on parle de subvention, le cas de l’agriculture est patent. Dans la Central Valley californienne, l’agriculture irriguée utilise environ 1/5 de l’eau de l’Etat au prix moyen de 1¢/m3.  Soit juste 2% de ce que Los Angeles paye pour son eau potable et seulement 10% de la valeur de remplacement de la ressource (collecte, traitement et redistribution). A priori le coût payé pour cette eau d’irrigation est 40 fois inférieur à ce qu’il devrait être.  

Vers une vérité des prix ?

     Dans la plupart des pays l’eau n’est ni achetée, ni échangée sur un marché libre organisé. Cependant certains de ces marchés ont vu le jour dans des Etats de l’Ouest américain, en Australie et au Chili. Quand ils existent, ceux-ci fournissent des informations intéressantes sur l’évaluation du prix de la ressource par les acteurs en période de pénurie (conjoncturelle ou structurelle). Ainsi le prix de l’eau en Australie s’est vu multiplié par 20 en décembre 2006, atteignant les 75¢/m3 sur le marché à l’occasion d’une sécheresse persistante. Sur la côte Ouest des USA, les prix variant généralement entre 3¢ et 10¢/m3. Sans tenir compte des coûts de transport et de traitement, ils reflètent donc la valeur intrinsèque de la ressource. Notons que dans certaine des villes de l’Ouest des USA, l’eau est si rare que les municipalités vendent les eaux usées autour de 1$/m3, cela afin de permettre l’irrigation des jardins.

En Inde, la pénurie en eau permet à certains agriculteurs de vivre en vendant leur eau à la place de leur production alimentaire. L’eau autrefois puisée à des fins d’irrigation des cultures est maintenant transportée par camions dans les villes voisines. En quelque sorte, on récolte de l’eau à la place de la nourriture, malheureusement dans un contexte déjà marqué par la baisse rapide du niveau des nappes souterraines qui a suivi la révolution verte du pays.    

L’exemple de la ville japonaise d’Osaka est intéressant si l’on pense que les prix du service de  l’eau se doivent de refléter plus fidèlement les coûts réels tout en respectant la solvabilité de la demande. Les usagers du service paient une taxe mensuelle ouvrant droit à la consommation de 10 m3. Au-delà de ce niveau, les prix augmentent brutalement, passant de 82¢/m3 à plus de $3 pour les plus gros utilisateurs.

Des prix reflétant les coûts réels devraient pouvoir conduire les ménages, l’industrie et surtout les agriculteurs à avoir une utilisation plus efficiente de la ressource. Bien des solutions visant à éliminer les gaspillages s’avèrent assez peu couteuses, et très économiques à l’avenir si l’on pense au lien organique reliant consommation d’eau et consommation d’énergie (pompage, traitement, transport).

Complément d’information

     Pour les informations relatives à l’évolution du prix de l’eau en France, consulter le site du Centre d’Information sur l’Eau à l’adresse suivante : http://www.cieau.com/toutpubl/sommaire/texte/7/f7.htm

Pour comprendre comment et pourquoi les pays riches sont eux aussi entrés dans la crise de l’eau, consulter le rapport du WWF Rich countries, Poor water (format PDF – en anglais)

Plus généralement concernant les besoins prospectifs sur la ressource, regarder le site de l’International Water Management Institute (IWMI) : http://www.iwmi.cgiar.org/ et plus particulièrement :

Actualité de la ressource en eau : le cas du lac Tchad

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Description

     Le bassin d’alimentation du lac Tchad couvre une surface de 2 434 000 km2, soit 8% de la surface totale du continent Africain répartie entre l’Algérie, le Cameroun, la République Centrafricaine, le Tchad, la Lybie, le Niger, le Nigéria et le Soudan. La cuvette du lac quant à elle ne représente que 1% du bassin d’alimentation, représentant néanmoins le 4ème plus grand lac du continent.

La région n’ayant que très peu de ressources pérennes (souterraines et de surface), l’alimentation du lac est donc saisonnière, dépendant des précipitations drainées vers le lac par le système hydrogrographique du bassin. Ce dernier est constitué de deux fleuves principaux collectant des précipitations extrêmement variables géographiquement : très faibles au nord – Tchad, Lybie, Algérie avec moins de 100 mm/an-  bien plus fortes au sud -1500 mm/an.  Ainsi l’alimentation du lac provient :

  • à 95% du fleuve Chari-Logone qui collecte les ruissellements du plateau Adamawa (République Centrafricaine, Cameroun et Tchad) vers la cuvette sud,

  • à 2,5% du fleuve Komadugu-Yobe pour la cuvette nord et qui collecte les ruissellements du Nigéria et Niger. La présence de deux barrages au Nigéria contribue à affaiblir les apports.

Une agence intergouvernementale (commission de bassin du lac Tchad) est en charge de réguler et contrôler l’usage des ressources en eau et naturelles au niveau du basin versant. Cinq pays y siègent actuellement : Tchad, Niger, Nigéria, Cameroun, République Centrafricaine.

Evolution

     Sur les dernières décennies la surface en eau du lac est passée de 25 000 km2 en 1973, à moins de 2 000 km2 dans les années 90. La cuvette nord n’a plus connu d’eau permanente depuis plus de 25 ans, cependant que dans les années les plus humides, 1994 et 1999, la zone connaît encore quelques inondations.

Le rétrécissement du lac de 90% sur les 40 dernières années provient notamment du fait de la réduction des recharges par le Chari-Logone, entre 1970 et 1990 la recharge moyenne à baissé de 55% par rapport aux valeurs observées entre 1950 et 1970. Globalement c’est bien le déficit de pluviosité combiné à une plus grande utilisation des eaux du lac pour les besoins des populations et des rivières pour l’irrigation qui expliquent principalement ce recul dramatique. Cependant il est comme toujours nécessaire de relativiser la situation du lac au regard du contexte historique et géographique de ce-dernier. Ainsi vers 20 000 av. J.-C., le lac avait complètement disparut du fait de l’aridité des tropiques consécutive à la glaciation avant de réapparaitre vers 9 500 av. J.-C.

Bien plus que l’activité humaine actuelle, c’est l’avancée du désert saharien, la disparition du couvert végétal de la région et la dégradation climatique qui l’accompagne, qui expliquent sur la longue période l’état de contraction actuel du lac. Le mouvement de décru des eaux semble ainsi entamé depuis 4 000 av. J.-C. A cette époque la profondeur des eaux du lac est de 65m, la superficie de plus d’un millions de km². Vers 1 000 av. J.-C., le lac n’a déjà plus qu’une profondeur de 17 m, aujourd’hui 7 m.

Impacts

     Au moment où les réserves en eau douce de la région diminuent dramatiquement, la population du bassin du lac Tchad continue de connaître une rapide croissance géographique. Elle est actuellement estimée à plus de 37 millions de personnes. Pour celle-ci, la majeure partie de la ressource en eau est utilisée pour l’irrigation agricole, devant l’alimentation en eau potable. Bien que l’agriculture traditionnelle du bassin soit une agriculture pluviale, en aval on trouve des cultures irriguées et/ou inondées.

La diminution de la ressource et donc des services écologiques des zones humides, impacte sévèrement les activités économiques locales que sont la pêche, l’agriculture, la foresterie. Crises alimentaires, difficultés d’accès à l’eau potable, dégradation des conditions sanitaires, les impacts sociaux nés des difficultés d’accès à l’eau potable entraînent des tensions entre les populations amont et aval pour le partage d’une ressource déclinante.

Parmi les populations du nord les plus touchées par la sécheresse, certaines ont du abandonner leurs terres, venant concentrer les pressions sur les ressources restantes aux abords du lac. Cependant le recul du lac dans les années 1970-90 n’a pas eu que des inconvénients. Les nouvelles terres émergées, riches en alluvions, ont permis le développement de cultures très productives au sud du lac (fruits, légumes, riz, maïs…). On estime aujourd’hui que l’agriculture de décrue fait vivre environ 40 000 Tchadiens.

Ressources en ligne

Quelques liens anglophones concernant le lac Tchad et tirés de la newsletter du portail de l’Unesco dédié à la ressource en eau : http://www.unesco.org/water/news/newsletter/

AOC-HYCOS (West and Central Africa – Hydrological Cycle Observing System) : description des conditions environnementales du site et du contexte socio-économique et institutionnel de la zone.

LakeNet : informations générales, cartographie, synthèse environnementale.

ILEC (International Lake Environment Committee) :Description des conditions physiques (surface, volume, profondeur…), biologiques de la qualité des eaux, de l’évolution des usages de la ressource…

Par ailleurs, concernant le cas de la mer d’Aral, se référer au dossier de synthèse de l’Unesco sur la question : http://www.unesco.org/water/news/newsletter/175.shtml#know

Sur la question écologique, points de vue croisés Edgard Morin et François Bayrou.

     A l’occasion du magazine politique hebdomadaire de France 3 France Europe Express en date du 18/02/2007, Christine Ockrent recevait Edgar Morin  (sociologue et philosophe français) afin de dialoguer avec le candidat François Bayrou sur la question écologique. Rendez-vous malheureusement bien trop bref, mais dont certains extraits audios sont disponibles à l’adresse suivante : http://www.utime.org/podcast/morin_bayrou.mp3

Actualités de la ressource en eau

Quantité de la ressource en eau

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Développement des surfaces agricoles irriguées le long du fleuve Colorado. (Google Earth)

Les Etats du sud des USA sous la menace

De mauvaises perspectives concernant les futurs débits du fleuve Colorado inquiètent les autorités locales quant à la bonne continuité des services de fourniture en eau (irrigation, eau potable) dans les Etats du bassin hydrographique.

D’après un article de Tony Davis, Arizona Daily Star (02.26.2007) – ici

     La dégradation de l’état quantitatif (débit, zone d’assèchement) du fleuve Colorado a malheureusement aujourd’hui dépassée les pires scénarios prévus dans les années 90. Plus que les sécheresses récurrentes, la raison vient principalement d’une mauvaise estimation de la croissance démographique des Etats aval que sont l’Arizona (+65%), le Nevada et la Californie. Dans le même temps l’ensemble de la population du bassin du fleuve connaissait une augmentation de 25% entre 1995 et 2005 (11 millions de personne).  A l’heure actuelle, plus de 25 millions d’individus dépendent du fleuve Colorado pour leurs besoins en quotidiens en eau, ce qui laisse imaginer l’échelle du système d’aménagement du fleuve (barrage, réservoir, conduites). Un spécialiste local de la ressource notait à ce sujet: « the bigger the reservoirs that you build, the bigger the system you build, the more sensitive it becomes to droughts (and) the longer it takes to recover ».

Avec la diminution des débits du fleuve du fait de la sécheresse et de l’augmentation de la demande en eau, les réserves des lacs Mead and Powell ont largement diminuées de sorte qu’il faudrait aujourd’hui 15 ans de précipitations et ruissellements « normaux » pour les remplir à nouveau. De sorte que pour la grande majorité des parties prenantes, la pénurie de la ressource en eau n’est plus qu’une question de temps. Sa probabilité de survenance est estimées à 10% dans les 5 ans, 25% entre 2020 et 2025. Or ces chiffres ne tiennent pas compte des effets du changement climatique. D’après ce qui peut-être anticiper à ce jour, le changement climatique devrait signifier encore moins d’eau pour le fleuve, des sécheresses plus longues et fréqu entes.

Les premières pénuries affecteront les agriculteurs, cependant si elles venaient à se poursuivre sur cinq ou six ans, les villes devraient voir leur prélèvement diminuer. Pour anticiper le phénomène, certains états n’hésitent plus à acheter des surplus d’eau afin de les stocker dans les sous-sols. Ce faisant la demande des villes devrait être assurée jusqu’à 2100.

     Par ailleurs au Texas, autre Etat gravement impliqué dans la thématique eau dans la mesure où 85% des texans pourrait connaître des problèmes d’accès à la ressource en eau en 2060 dans un scénario business as usual, le Gouverneur de l’Etat Dewhurst déclarait cette semaine :

“We’ve got to take care of our cities. … We need to develop new water resources. It’s so important that we make the investment – that we come together and secure clean, fresh water for decades to come […] It’s not an overstatement to say that our state’s future quality of life and growing economy largely depend on a clean, reliable water supply for all Texans. “

Au Sénateur Averitt de rajouter: “when you look at the state’s current water supply versus what it will take to meet our state’s future water needs, it’s easy to conclude that we’ve got a problem”. En effet la demande en eau de l’Etat devrait croitre de 27% d’ici à 2060, sa population multipliée par deux.

2007 State Water Plan: ici et source de l’article: ici

Un million de chinois face au risque d’une pénurie d’eau

D’après source AFP via Yahoo news 26 février 2007 – ici

     Une sévère sécheresse dans le sud-ouest du pays menace actuellement l’accès à la ressource en eau pour près d’un million de chinois, alors même que la navigation est paralysée sur un fleuve Yangtze au plus bas (en dessous des les conduites de prélèvement d’eau).

Dans les zones du Chongqing (30 millions d’habitants) les plus touchées des camions citernes sont envoyés afin d’alimenter les résidents en eau potable  et sauver le bétail. La sécheresse actuelle vient s’ajouter à celle record de l’été dernier qui avait déjà forcé des dizaines de milliers de d’agriculteurs à quitter leurs terres. Dans la répartition de la ressource en Chine, ces derniers voient leur quota continuellement diminuer au profit des villes et de l’industrie.

Qualité de la ressource en eau

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Une nouvelle technologie de potabilisation des eaux fondée sur l’utilisation du fer éliminerait 99% des virus.

D’après un article de l’United Press International (27 février 2007) – ici

     Des scientifiques américains de l’université du Delaware auraient développés une nouvelle technologie économe afin d’éliminer les virus dans le traitement de la potabilisation de l’eau. Alors que les techniques génériques consiste pour l’heure en l’utilisation de composants chlorés afin de purification des microorganismes, ce nouveau process repose sur l’utilisation de fer dans la filtration.

Dans un monde où 6% de l’ensemble des décès sont annuellement causés par des maladies transmises par le vecteur eau, principalement du fait de la défaillance des systèmes d’assainissement et des difficultés d’accès à l’eau potable qui touchent près de 1.1 milliard d’individus (chiffres de l’OMS), tous principalement situés dans les pays en développement, cette nouvelle technologie – présentée comme très peu couteuse – offrirait de grandes perspectives en termes de santé public mondiale dans la mesure où: « by using elemental iron in the filtration process, we are able to remove more than 99.999 percent of viruses from drinking water. »

Organisation mondiale de la Santé – Liens entre l’eau, l’assainissement, l’hygiène et la santé – FAITS ET CHIFFRES – mise à jour de novembre 2004 : ici

Uniformisation des points de vue, la polémique Allègre

Uniformisation des points de vue, la polémique Allègre dans -> ACTUS image0015

     Devant le développement de l’expression mass-médiatique d’un point de vue toujours plus « standardisé » sur la question écologique, constatons que celui-ci est aussi fabriqué à partir d’une pensée qui ne fait plus que dupliquer un réel de plus en plus préconstitué. Un bien drôle de réel une fois dit que « nous » n’y reconnaissons plus que les effets de ce que nous y avons déjà mis nous-mêmes. Parmi les avatars ce mode de pensée, citons à titre d’exemples à la peau bien dure : l’anthropomorphisme, l’ethnocentrisme, le technocentrisme et toutes formes de réductionisme s’attaquant aux perspectives exprimées par l’existence de formes de vie et d’opinions singulières.

Dans la petite galerie des acteurs « autorisés » au débat, nous entamons ici une liste non exhaustive des penseurs « rebelles ». Liste qui se limitera malheureusement aux presque seuls scientifiques engagés, dans la mesure où l’on peut constater et regretter l’absence de perspectives véritablement artistiques dans ces débats.  Bien que l’on pourrait penser les images esthétisantes d’un Nicolas Hulot (la nature) ou d’un Yann Arthus-Bertrand (la nature et le social) comme relevant quelque peu de cette dernière catégorie.

S’il fallait résumer la pensée et les propos d’Allègre en quelques points :

  • Ce dernier ne nie pas le changement climatique, bien plus il dénigre la monoexplication causale dominante du GIEC, dans la mesure où nous ne connaissons pas bien les mécanismes du cycle de l’eau et du climat. Or l’effet de serre est dû pour 90% à la vapeur d’eau en suspension dans l’atmosphère.

  • Par ailleurs, la problématique du changement climatique ne doit pas occulter les autres enjeux, Allègre souhaitant placer la question de la ressource en eau au centre des débats.

  • Allègre s’oppose à tout « catastrophisme » et cite l’exemple passé du rapport du club de Rome (Meadows 1972,  »Halte à la croissance ? »), comme ayant eu un impact contreproductif sur la prise en compte de l’environnement, ses prévisions alarmistes n’ayant pas été vérifiées par la suite.

  • En conclusion, il réaffirme sa croyance dans le progrès scientifique comme facteur clé de la résolution des problèmes, la question écologique étant pour lui une occasion de croissance économique.

Le montage audio tiré de l’émission de France Culture « La rumeur du Monde » et développant l’ensemble de ces points est disponible à l’adresse suivante : http://www.utime.org/podcast/allegre.mp3.

On peut être d’accord ou pas avec Allègre sur les solutions envisageables, cependant il convient de reconnaître que ce dernier ne fait finalement que rappeler quelques principes de base de la démarche scientifique. Dès lors comment expliquer le tôler général qu’à susciter sa prise de position ? (Voir les articles consacrés sur les sites de liberation.fr, lemonde.fr, express.fr )

Notre opinion est que sans préjugé de la bonne foi des acteurs de l’environnement, ceux-ci s’empresse majoritairement de se rattacher à la mono question climatique, une fois observé que le grand public semble y adhérer. Ce faisant, ils font le pari de l’efficacité de la communication d’urgence : « si nous avons une prise ici, et Dieu sait que c’est difficile, autant ne plus lâcher et en profiter ». Plus besoin de campagnes de communication onéreuses et inefficaces quand un simple coup de vent, une hausse du thermomètre en octobre et toutes autres formes de « communications » naturelles viennent avantageusement s’y substituer.

On pourra certes reprocher à Allègre son technocentrisme, sa croyance au progrès, son occidentalisme etc. etc.., cependant ce dernier est bien l’un des rare à préserver dans l’espace public un minimum de la complexité de la question environnementale. Car le danger de cette communication d’urgence est triple :

  • D’une part la question climatique, occupant tout le terrain, vient masquer les autres, au premier rang desquelles se trouvent la ressource en eau et la question de la biodiversité ;

  • D’autre part le réductionnisme, voir le simplisme qu’elle met en avant n’invite aucunement son auditoire à une compréhension nouvelle du monde, n’aboutissant au final qu’à la promulgation de comportements jugés aujourd’hui « moralement juste », mais tout aussi mécaniques que les précédents.

  • Enfin, en ce qu’elle ne laisse à voir qu’une écologie « négative » construite sur la base de « ne faite pas ci » « il faut moins de ». Or une écologie positive et créative est possible, cependant qu’elle requière un véritable changement de point de vue dans nos relations au monde et une réflexion globale conséquente. Ce à quoi il sera sans doute répondu que le temps presse, ce à quoi nous répondrons que le matériel existe à condition de lui faire un peu de place.

Au final notre point de vue est que Claude Allègre réactualise peut-être à sa manière quelques unes des citations suivantes :

  • « La bêtise est de conclure. » G. Flaubert
  • « La bêtise a toujours raison. La bêtise a toujours le dernier mot. » Angela, pseudonyme France Culture
  • « À la bêtise, tout le monde se retrouve : c’est le lieu commun. » Raphaël Enthoven

L’écologie de Gregory Bateson

« Il y a une écologie des mauvaises idées, comme il y a une écologie des mauvaises herbes. » Gregory Bateson 


« Vers une écologie de l’esprit »
Gregory Bateson (1904-1980)

Gregory Bateson

      Scientifique américain ayant consacré sa vie à la recherche dans des domaines très variés des sciences sociales (anthropologie, psychiatrie, cybernétique), Gregory Bateson  s’est principalement attaché à penser une épistémologie[1] nouvelle à partir des matériaux de la cybernétique (rapports du tout à ses éléments et critique de la disjonction substantialiste entre sujet et objet), de la théorie des systèmes (étude des boucles et systèmes d’interaction complexes) et des types logiques (mise en perspective hiérarchique des relations). 

De ce « contexte » épistémologique, les travaux de G. Bateson ne cesseront d’approfondir les questions relatives au « soi » dans la relation complémentaire de celui-ci avec le système plus vaste qui l’inclut. Ainsi : « l’observateur appartient au champ même de l’observation et que, d’autre part, l’objet de l’observation n’est jamais une chose, mais toujours un rapport ou une série indéfinie de rapports. » En conséquence, un système de communication n’est donc plus le fait d’une individualité physique constituée, mais d’un vaste réseau de voies empruntées par des messages.

Dès lors, à l’opposition classique entre immanence et transcendance, « l’épistémologie cybernétique » de Bateson propose de substituer une approche nouvelle par où l’esprit individuel est immanent. Mais pas seulement dans le corps ! Il l’est également dans les voies et messages extérieurs au corps. Précisément dans la mesure où l’esprit humain n’est qu’un sous-système d’un esprit plus vaste, ce dernier étant lui-même immanent à l’ensemble interconnecté formé par le système social et l’écologie planétaire.

A la question : « que diable entendez-vous par écologie de l’esprit ? » Bateson répondait :

« ce que je veux dire, plus ou moins, c’est le genre de choses qui se passent dans la tête de quelqu’un, dans son comportement et dans ses interactions avec d’autres personnes lorsqu’il escalade ou descend une montagne, lorsqu’il tombe malade ou qu’il va mieux. Toutes ces choses s’entremêlent et forment un réseau [...] On y trouve à la base le principe d’une interdépendance des idées qui agissent les unes sur les autres, qui vivent et qui meurent. [...] Nous arrivons ainsi à l’image d’une sorte  d’enchevêtrement complexe, vivant, fait de luttes et d’entraides, exactement comme sur n’importe quelle montagne avec les arbres, les différentes plantes et les animaux qui y vivent – et qui forment, en fait, une écologie »[2].

La note qui suit tentera de présenter quelques uns des concepts de bases de la pensée de G. Bateson (cybernétique et type logique), en insistant sur le concept de conscience non assistée et le rôle de l’art en tant qu’outils d’accessibilité au système écologique planétaire.

Système et cybernétique

      Dans sa définition classique[3], la cybernétique est une science destinée à couvrir l’ensemble des phénomènes qui mettent en jeu des mécanismes de traitement de l’information (transport des messages à travers des réseaux de communication, prédiction, organisation et régulation des systèmes biologiques). Celle-ci diffère donc de la théorie de l’information (codage, décodage, stockage, transport, filtrage de l’information, etc.) en ce  « qu’elle ne s’intéresse pas aux systèmes concrets qui opèrent sur de l’information » mais bien à la structure logique de leur fonctionnement.
Autrement dit, si l’étude de la transmission des signaux se fait à la lumière de la théorie de l’information, on pourra néanmoins étudier les transformations systématiques auxquelles sont soumises les informations représentées par ces signaux en faisant complètement abstraction de ceux-ci. Voilà qui est précisément le point de vue de la cybernétique.

Pour Bateson, la description d’une organisation en termes de correspondance, d’adaptation et de convenance aux conditions du contexte et de l’environnement révèle de l’explication cybernétique, type logique différent de celui de l’explication causale. Il ne s’agit plus de savoir « pourquoi quelque chose s’est produit » mais de savoir quelles contraintes ont fait que « n’importe quoi ne se soit pas produit ».

·  Dans l’explication causale, dite « positive », la trajectoire ou le comportement d’un élément est considéré comme entièrement prédictible à partir des conditions initiales (relation linéaire de cause à effet).

· Dans l’explication cybernétique, dite « négative », l’examen des restrictions ou contraintes du système montre que seule une « réponse appropriée » aux différentes contraintes peut survivre, se développer et se reproduire.

« […] En termes cybernétiques, on dit que le cours des événements est soumis à des restrictions, et on suppose que, celles-ci mises à part, les voies du changement n’obéiraient qu’au seul principe de l’égalité des probabilités. En fait, les restrictions sur lesquelles se fonde l’explication cybernétique peuvent être considérées, dans tous les cas, comme autant de facteurs qui déterminent l’inégalité des probabilités [...] Idéalement – et c’est bien ce qui se passe dans la plupart des cas – dans toute séquence ou ensemble de séquences, l’événement qui se produit est uniquement déterminé en termes d’une explication cybernétique. Un grand nombre de restrictions différentes peuvent se combiner pour aboutir à cette détermination unique. Dans le cas du puzzle, par exemple, le choix d’une pièce pour combler un vide est restreint par de nombreux facteurs : sa forme doit être adaptée à celle des pièces voisines et, en certains cas, également à celle des frontières du puzzle ; sa couleur doit correspondre à celles des morceaux environnants [...] Du point de vue de celui qui essaie de résoudre le puzzle, ce sont là des indices, autrement dit des sources d’information qui le guideront dans son choix. Du point de vue de la cybernétique, il s’agit de restrictions. De même pour la cybernétique, un mot dans une phrase, une lettre à l’intérieur d’un mot, l’anatomie d’un quelconque élément d’un organisme, le rôle d’une espèce dans un écosystème, ou encore le comportement d’un individu dans sa famille, tout cela est à expliquer (négativement) par l’analyse des restrictions. [4] »

La description d’une organisation n’est donc adéquate que si l’on inclut une description des contraintes exercées par le contexte et l’environnement sur ses possibilités d’action (comportement, fonction et processus), d’agencement (structure) et de devenir (évolution). Il est de même du comportement conçu comme un « construit organisé d’activités », de la cellule jusqu’à la machine et aux institutions en passant par l’animal et l’homme, la société.
Le comportement d’une fourmi ne devient ainsi intelligible qu’au regard des contraintes topographiques de son parcours, des contraintes du ravitaillement à rapporter dans un processus stochastique du hasard des rencontres et de la nécessité de ramener la nourriture.

Niveaux et types logiques

Le terme Méta signifie « à propos de », il est issu du grec et signifie au départ « après, au-delà de »[5]. Il induit un regard de la chose sur elle-même. Un métalangage est un langage qui a pour sujet le langage, une métacommunication est une communication à propos de la communication.
Mais de la communication à la métacommunication il y a un changement de « niveau logique », dans la mesure où l’on peut distinguer le message proprement dit du message à propos du message.

Gregory Bateson va donc appliquer le concept de niveau logique, pas seulement à la communication, mais à la vie en général. Pour ce faire il s’appuiera sur le concept de « type logique » tel que développé par le mathématicien Russel[6]. Remarquant qu’un animal qui joue peut simuler le comportement d’agression de sorte que l’animal lui faisant face sera capable de distinguer un cadre ludique, ne se sentira pas menacé, il est amené à dire que la métacommunication trace donc un cadre (contexte) qui influence le sens de la communication de base (i.e. le comportement d’agression).
Cette distinction des couches qui englobent les précédentes constitue la « hiérarchie naturelle» telle que définie par Bateson.

Les types logiques ont été définies au début du vingtième siècle par Russel et Whitehead et sont liées aux concepts de classe et de classification. Des éléments ayant des caractéristiques communes peuvent être rassemblés pour former une classe d’éléments partageant les mêmes caractéristiques. La classe des éléments ainsi formée est d’un type logique différent de celui des éléments proprement dit, dans la mesure où il est exclu qu’une classe soit membre d’elle-même (la classe des oiseaux n’est pas un oiseau) et qu’une classe ne peut être membre de sa non-classe (la classe des oiseaux n’appartient pas à la classe des non oiseaux). La notion de classe définit ainsi un niveau logique supérieur par rapport à ses éléments.

« Un bibliothécaire dresse le catalogue des livres dont il a la charge et, lorsqu’il a terminé, se demande où situer son catalogue. En effet, son catalogue a bien l’apparence d’un livre, mais il n’est pas du même ordre ou niveau que les livres qu’il classifie et répertorie. Le catalogue des livres n’est pas un livre. C’est le livre des livres ou « méta-livre ». Il ne peut pas se répertorier lui-même et être à la fois un des membres et la classe. Il est d’un niveau de type logique supérieur à celui des livres qu’il classifie. C’est la représentation des livres, elle cartographie les livres, comme la carte pour le territoire, le menu pour le repas. C’est une représentation des livres qui y sont représentés. Comme le catalogue n’est pas du même ordre ou niveau que les livres qu’il classifie et répertorie, cette historiette de bibliothécaire n’est pas du même ordre que le texte qu’elle commente. C’est pour souligner cette distinction, en rupture radicale, entre le message (le texte) et le méta-message (le commentaire) ou message sur (ou au sujet de) le message qu’a été introduite une rupture typographique marquée. De la même façon, les règles du jeu ne sont pas du jeu et ne sont pas en jeu, comme le méta-message qui « cadre » le message et le situe en indiquant la manière de comprendre le message. » (source article Wikipédia sur la théorie des contextes)

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Gregory Bateson part donc de ces concepts logiques pour les appliquer au monde du vivant, et plus particulièrement à l’apprentissage (voir table suivante). En incluant le niveau de communication de base, le méta-niveau l’influence et de nouvelles propriétés peuvent émerger, celles-ci pouvant radicalement différer de celles du niveau de départ. Afin de se représenter la chose, l’image des poupées russes qui s’emboitent les unes dans les autres serait sans doute plus adéquate qu’une simple métaphore spatiale représentant des niveaux successif empilés les uns sur les autres.

« Le stimulus est un signal élémentaire interne ou externe. Le contexte du stimulus est un métamessage qui classifie le signal élémentaire. Le contexte du contexte du message est un méta-métamessage etc. etc.…Le contexte est un terme collectif désignant tous les événements qui indique à l’organisme à l’intérieur de quel ensemble de possibilités il doit faire son prochain choix. Il y a donc des indicateurs de contexte. Un organisme répond différemment au même stimulus  dans des contextes différents. Quel est donc la source informative de l’organisme ? Il existe des signaux dont la fonction est de classifier les contextes. Indicateur de contexte de contexte… » (Source Bateson, vers une écologie de l’esprit tome 1 (309-310)

Systèmes et métasystèmes 

Pour Bateson, le concept de type logique à une implication directe sur le rapport du tout à ses éléments : « la contradiction entre le tout et la partie [...] est tout simplement une contradiction dans les types logiques [car] le tout est toujours en métarelation avec ses parties. »

« Le système minéral de la lithosphère oriente et délimite les possibilités de vie du système organique de la biosphère. Ce système organique, lui même, oriente et délimite les possibilités d’association des congénères animaux et végétaux du système social de la sociosphère. Le système organique est alors le contexte du système social ou métasystème social c’est-à-dire le système du système social et le système minéral comme « métasystème organique » ou encore métamétasystème social.
Ainsi, l’écosystémique de la foresterie et de la pêcherie, à la base, s’occupe du système social de l’association des arbres et des poissons avec son environnement ; cet environnement est le système organique, qui est lui-même dans un environnement qui est le système minéral de la lithosphère qui oriente et délimite les possibilités de vie sur la planète. »
 (
D’après source article Wikipédia sur la Théorie des contextes).

L’approche écosystémique est ainsi une façon de percevoir à la fois l’arbre et la forêt, sans que le premier ne masque la seconde. L’arbre est perçu comme une configuration d’interactions appropriée aux conditions de vie dans le contexte forestier, en association avec d’autres arbres qui forment sa « niche écologique ».

Apprendre à apprendre

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Bateson propose de distinguer une suite hiérarchisée de quatre catégories d’apprentissage classées le long d’une échelle de type logique. Attention ! Un niveau d’apprentissage n’est pas un niveau de compréhension. Il existe un certain nombre de niveaux dans lesquels chaque niveau supérieur est la classe des niveaux subordonnés.
D’une manière générale, plus le niveau est élevé et moins nous comprenons le processus, plus il est difficile à l’esprit de « manœuvrer » avec. Le changement implique un processus, mais les processus eux-mêmes sont soumis au changement. Ceci implique la notion de contexte répétable comme une prémisse nécessaire à toute théorie qui définit l’apprentissage en tant que changement : « Aucun homme ne peut coucher deux fois pour la première fois avec la même fille » Héraclite.
D’un point de vue intellectuel, il peut-être utile de se référer à l’analogie du mouvement : le mot « apprentissage » indique indubitablement un changement, d’une sorte ou d’une autre. La forme de changement la plus simple et la plus familière étant le mouvement.

L’apprentissage de niveau 0 est l’expérience directe : « je mets ma main au feu, et je me brûle. » L’apprentissage zéro se caractérise par la spécificité de la réponse, qui juste ou fausse, n’est pas susceptible de correction. L’apprentissage 0 correspond à la position de l’objet.

L’apprentissage de niveau 1 est ce que nous appelons généralement « apprentissage »,  à savoir  la généralisation des expériences directes de bases : « j’ai mis ma main dans le feu, j’ai été brûlé et je ne le referai plus. » Accoutumance, conditionnement pavlovien classique…Il correspond à un changement dans la spécificité de la réponse, à travers une correction des erreurs de choix à l’intérieur d’un ensemble de possibilité. L’apprentissage 1 correspond à sa vitesse quand il bouge. 

L’apprentissage de niveau 2 contextualise les expériences de l’apprentissage de niveau 1. Il s’agit ici de développer des stratégies afin de maximiser l’apprentissage de niveau 1, à travers l’extraction de règles implicites et la mise en contexte des unités d’apprentissage de niveau 1 : « généralement je ne risque pas d’être brûlé, mais cela pourrait m’arriver si je devais sauver autrui d’un incendie. » Il correspond donc à un changement dans le processus de l’apprentissage 1, changement correcteur dans l’ensemble des possibilités où s’effectue le choix et qui se produit dans la façon dont la séquence de l’expérience est ponctuée. L’apprentissage 2 semble également être ainsi une préparation nécessaire aux troubles du comportement. A travers ses recherches sur la schizophrénie, Bateson isolera la source de cette dernière comme l’incompatibilité répétée entre un contexte et un métacontexte au cours d’un apprentissage (notion de la double contrainte). L’apprentissage 2 correspond à l’accélération ou à la décélération, soit au changement dans la vitesse de l’objet mobile.

L’apprentissage de niveau 3 contextualise les expériences de l’apprentissage de niveau 2. Il est difficile et peu fréquent même chez l’être humain. En ce sens il peut être qualifié de niveau spirituel ou existentiel : « que dit de moi le fait d’être prêt à risquer d’être brûler pour… » C’est un changement dans le processus de l’apprentissage 2, changement correcteur dans le système des ensembles de possibilité dans lequel s’effectue le choix. L’apprentissage 3 correspond à un changement dans le rythme de l’accélération ou de la décélération, soit un changement dans le changement du changement de la position…

La conscience non assistée

En signant « cet abandon des frontières de l’individu comme point de repère », et remarquant que si Freud a « étendu le concept d’esprit vers le dedans [...] à l’intérieur du corps », Bateson entend lui-même « étendre l’esprit vers le dehors ». Or ces deux mouvements ont ceci de commun qu’ils s’accompagnent de la réduction du champ du soi conscient

C’est précisément sur cette base de la réduction du champ conscient que nous tenterons d’aborder, succinctement, l’un des nombreux apports de Bateson à la pensée écologique. À travers certaines citations extraites du tome 1 de « Vers une écologie de l’esprit [7]», nous nous intéresserons plus précisément à la nature correctrice de l’art, en tant que voie d’accès aux relations par delà leurs termes (objet/sujet, objet/objet sujet/sujet). Précisément car « le dualisme est appétitif » nous dit Bateson. Ainsi, quand nous percevons notre environnement comme composé de choses et que nous ignorons les liens qui nous relient à ces choses, nous pouvons nous mettre à vouloir les posséder « bêtement ».
Qu’adviendrait-il en terme de mode d’existence si nous envisagions le monde comme un ensemble de relations ?

Codes conscients et inconscients

      L’être humain, s’il apprend à se comporter dans son environnement grâce à la coévolution,  est également « couplé à son environnement biologique par l’intermédiaire de la conscience ». C’est-à-dire qu’il a la capacité consciente de « savoir qu’il sait ». Or une grande partie de cette pensée consciente est « occupée » par l’algorithme du langage (ou processus secondaire). C’est-à-dire parler de choses et de personnes singulières  caractérisées par un système de marquage, l’emploi de la négation, la temporalité etc. etc.…

Cependant, à la suite de Nietzche, nous pouvons dire que la grande partie de nos activités est inconscience et l’algorithme qui caractérise la pensée de l’inconscient (processus primaire) est lui bien différent. Il est marqué par une double inaccessibilité :
· son accès est intermédié par le rêve, l’art, la religion, les drogues etc. etc.…
· sa traduction est difficile dans la mesure où il communique sur un mode métaphorique des relations dont les termes sont impersonnels ou non identifiés. C’est-à-dire que pour l’inconscient, seule la relation illustrée demeure inchangée. Ici, il n’existe pas de marquage indiquant la métaphore contrairement aux termes  « comme, comme si » du langage conscient.

Pour Bateson, le rôle de l’inconscient est double :
· accueillir les choses difficiles que la consciente souhaite occulter (rôle « sécuritaire ») ;
· accueillir les « habitudes » (rôle économique).

Insistons à présent sur ce second point. Bateson entend par habitudes, les choses tellement familière qu’il est inutile de les examiner autrement qu’au niveau des conclusions de l’action que la pensée implique. En conséquence, il existe donc des types de connaissance qui peuvent être reléguées à des niveaux inconscients (ce qui est commun à une affirmation particulière et à une métaphore lui correspondant), d’autres se devant d’être gardées en surface : « généralement, nous sommes capables de refouler les types de connaissance qui restent valables indépendamment des changements intervenus dans l’environnement, mais nous devons maintenir à une place accessible tous les moyens de contrôle du comportement, qui doivent être changés à chaque moment. »

Ainsi les prémisses peuvent être refoulées par mesure d’économie, mais les conclusions particulières doivent être maintenues à la conscience. D’un point de vue économique, on pourra dire que l’inaccessibilité est le prix du refoulement, ce dernier étant entendu comme une économie de pensée consciente, ressource rare au mécanisme lourd. Par conséquent, il est difficile pour tout organisme d’examiner la matrice globale d’où jaillissent ses conclusions conscientes.

Limites quantitatives et qualitatives  de la conscience

Bateson souligne l’impossibilité, pour un organisme quel qu’il soit, d’atteindre à une conscience totale. En effet, chaque nouveau pas vers celle-ci impliquerait en retour une nouvelle et importante augmentation de circuits conscients, cette nouvelle couche venant s’empiler sur les anciennes et ainsi de suite. Autrement dit, aucun système logique ne saurait décrire intégralement sa propre structure.Ainsi tous les organismes doivent se contenter d’un champ de conscience restreint, aucun ne pouvant se permettre d’être conscient de chose qu’il peut résoudre à des niveaux inconscients (économie et efficacité des circuits).

D’un point de vue qualitatif : « dans le cas d’un poste de télévision, une image satisfaisante à l’écran est certainement une indication que la plupart des éléments du poste fonctionnent correctement. » Pour Bateson, il en est de même pour l’écran de la conscience. Mais ce qui est fourni là n’est qu’une « indication très indirecte du fonctionnement de toutes les parties […]  Le poste de télé qui donne une image déformée ou autrement imparfaite, communique en ce sens quelque chose sur ses pathologies inconscientes, en exhibant leurs symptômes ». Cependant un diagnostic précis ne pourra-être donné que par un regard extérieur expert.

La conscience est donc nécessairement sélective et partielle, petite partie du réel systématiquement sélectionnée et aboutissant à une image déformée d’un ensemble plus vaste. Bateson donne ici l’exemple de l’iceberg. Si à partir de la surface visible de celui-ci nous pouvons deviner, extrapoler, le type de matière qui se trouve immergée, il n’en est pas du tout de même à partir du matériel livré par la conscience : « le système de la pensée consciente véhicule des informations sur la nature de l’homme et de son environnement. Ces informations sont déformées ou sélectionnées et nous ignorons la façon dont se produisent ces transformations. Comme ce système est couplé avec le système mental coévolutif plus vaste, il peut se produire un fâcheux déséquilibre entre les deux[8]». On devine ici exposée, l’une des causes de la crise écologique moderne.

La nature corrective de l’art…

Pour Bateson, l’ensemble de l’esprit est bien un « réseau cybernétique intégré »  de propositions, d’images, de processus etc. etc.…, la conscience, un échantillon des différentes parties et régions de ce réseau. Ainsi, au-delà de l’impossibilité économique d’une vision consciente de la totalité de ce réseau, Bateson remarque qu’une telle vision signerait également l’échec monstrueux du mécanisme d’intégration : « si l’on coupe la conscience, ce qui apparaît ce sont des arcs de circuits, non des pas des circuits complet, ni des circuits de circuits encore plus vaste. »

Une fois admises les limites de la conscience telles que définies précédemment, on pourra donc formuler l’hypothèse suivante : « ce que la conscience non assistée (par l’art, les rêves, la religion…) ne peut jamais apprécier, c’est la nature systémique de l’esprit. » Ainsi une pure rationalité projective non assistée est nécessairement pathogénique et destructrice de la vie, car : « la vie dépend de circuits de contingences entrelacés, alors que la conscience ne peut mettre en évidence que tels petits arcs de tels circuits que l’engrenage des buts humains peut manœuvrer. »

Pour nos actions quotidiennes, les conséquences néfastes sont nombreuses. Elles ont toutes ceci de commun que : « les erreurs se reproduisent à chaque fois que la chaîne causales altérée (par la réalisation d’un but conscient) est une partie de la structure de circuit, vaste ou petit, d’un système. »

Dans ce cas, pour l’homme, la surprise ne peut alors qu’être continue vis-à-vis des effets de  ses « stratégies de tête ». Prenons l’exemple suivant dans lequel nous souhaitons assainir un territoire infesté de moustiques afin d’y développer le tourisme ou l’agriculture. Nous utilisons alors du DDT pour tuer les insectes. Se faisant nous privons l’ensemble des insectivore de leur nourriture, ce qui en retour à pour effet de multiplier certaines des populations d’insectes. Nous sommes donc conduit à utiliser une plus grande quantité de DDT, jusqu’à la possibilité d’empoisonner y compris les insectivores. Ainsi, si l’utilisation de DDT en venait à tuer les chiens par exemple, il y aurait dès lors lieu d’augmenter le nombre de policier pour faire faire face à la recrudescence des cambriolages. En réponse ces même cambrioleurs s’armeraient mieux et deviendraient plus malin…etc. etc.…

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international – la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous – ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Pour Bateson, dans un monde fait de structure et de circuits plus ou moins inaccessibles à l’homme, la sagesse de ce denier consiste précisément dans la reconnaissance ou la perception de ces structures, circuits et des relations qui nous relient. Comment ? L’art est l’une de ces voies d’accès vers les relations dans la mesure où « […] l’art, à une fonction positive, consistant à maintenir ce que j’ai appelé « sagesse », modifier, par exemple, une conception trop projective de la vie, pour la rendre plus systémique. »

Modes et pratiques d’existence implicites…

Une pensée sur la vie si richement articulée ne peut qu’engendrer de nombreux déplacements de points de vue chez son lecture, à commencer par la mise en perspective de son propre champ conscient et de son corollaire presque immédiat : comment apprendre à apprendre ?

Toujours très concrètement, en terme de mode d’existence, quelle est la place de l’œuvre d’art : « la question à poser à propos d’une œuvre d’art devient : quelles sortes de corrections, dans le sens de la sagesse, sont accomplies par celui qui crée ou qui « parcourt» cette œuvre d’art ? »

Enfin plus généralement : « j’affirme que si vous voulez parler de choses vivantes, non seulement en tant que biologiste académique mais à titre personnel, pour vous-même, créature vivante parmi les créatures vivantes, il est indiqué d’utiliser un langage isomorphe au langage grâce auquel les créatures vivantes elles-mêmes sont organisées – un langage qui est en phase avec le langage du monde biologique[9] ».

Conclusion

Pour nous autres contemporains, la voix de Bateson est une voie de l’humilité et de l’observation des relations. La conscience n’est qu’une petite partie déformée d’un ensemble plus vaste; ensemble auquel je peux néanmoins accéder autrement.

L’humilité qui s’opère au moment de reconnaître cette hiérarchie naturelle (relations, méta-relations) s’oppose donc à l’hubris de notre civilisation actuelle qui place un Dieu face à sa création et un individu, imaginé à l’image de Dieu, dans la situation d’exploiter l’univers « sans considération morale ou éthique ». La crise écologique naît de cette arrogance, conséquence de la persistance d’un dualisme qui sépare l’esprit du corps et « échafaude des mythologies à propos de la survie d’un esprit transcendant ». Si Bateson pensait bien que quelque chose devait survivre de lui, ceci ne le ferait qu’en tant qu’élément de l’écologie contemporaine des idées.

« […] les hommes venant à rencontrer hors d’eux et en eux-mêmes un grand nombre de moyens qui leur sont d’un grand secours pour se procurer les choses utiles, par exemple les yeux pour voir, les dents pour mâcher, les végétaux et les animaux pour se nourrir, le soleil pour s’éclairer, la mer pour nourrir les poissons, etc., ils ne considèrent plus tous les êtres de la nature que comme des moyens à leur usage ; et sachant bien d’ailleurs qu’ils ont rencontré, mais non préparé ces moyens, c’est pour eux une raison de croire qu’il existe un autre être qui les a disposés en leur faveur.[10] » Spinoza



[1] « […] L’épistémologie est une branche de la science combinée à une branche de la philosophie. En tant que science, l’épistémologie étudie comment les organismes isolés et les ensembles d’organismes ‘connaissent’, ‘pensent’ et ‘décident’. En tant que philosophie, elle étudie les limites nécessaires et les autres caractéristiques des processus de connaissance, de pensée et de décision ». (Grégory Bateson, p. 234, « La Nature et la Pensée », Seuil, Paris, 1984).

[2] Gregory Bateson, Une Unité sacrée – Quelques pas de plus vers une écologie de l’esprit, chapitre 26, Seuil, Paris, 1996.

[3] D’après source Encyclopédia Universalis.

[4] Bateson, 1980, pp. 155-156, Vers une écologie de l’esprit. t. 2, citation d’après source Wikipédia.

[5] Cf. le livre d’Aristote sur la métaphysique qui suivait directement celui sur la physique.

[6] Dans son ouvrage de référence « Principia Mathematica »

[7] “Steps to an ecology of mind”, Editions du Seuil, 1977 pour la traduction française.

[8] D’après Jean-Jacques Wittezaele : «l’écologie de l’esprit selon Gregory Bateson», revue Multitude n°24.

[9] Gregory Bateson, op. cit., chapitre 32.

[10] Spinoza, l’Ethique, appendice livre I.

http://www.dailymotion.com/video/5cAPYwdf2em7n5pCG

Les écologies de Felix Guattari

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     Pour Félix Guattari, philosophe et psychanalyste français (1930-1992), l’écologie est la science des écosystèmes de toute nature (sociaux, urbains, familiaux, biosphère…). Mais l’écologie est également devenue un phénomène d’opinion regroupant le plus divers, et dont les deux polarités extrêmes seraient d’un côté, le conservatisme réactionnaire prônant un retour aux valeurs ancestrales, un progressisme doux visant à dépasser les clivages politique traditionnels, de l’autre.

C’est donc afin de rendre compte de ces dimensions hétérogènes au sein d’une même notion que Guattari conçoit l’écosophie comme le concept propre à articuler les trois écologies suivantes :

  • l’écologie environnementale pour les rapports à la nature et à l’environnement,

  • l’écologie sociale pour les rapports au « socius », aux réalités économiques et sociales,

  • l’écologie mentale pour les rapports à la psyché, la question de la production de la subjectivité humaine.

Or comme le souligne Anne Querrien dans son article « Broderies sur Les Trois Écologies de Félix Guattari » publié dans la revue Chimère : « […] les tentatives militantes ou professionnelles que nous avons connues jusqu’à présent choisissent toujours de privilégier un seul de ces trois axes, et rencontrent des blocages incontournables dans leur développement faute de travailler les autres dimensions. »

Morceaux choisis :

D’après les trois écologies, version courte originale par  Félix Guattari http://multitudes.samizdat.net/Les-trois-ecologies.html

« La planète Terre connaît une période d’intenses transformations technico-scientifiques en contrepartie desquelles se trouvent engendrés des phénomènes de déséquilibres écologiques menaçants, à terme, s’il n’y est porté remède, l’implantation de la vie sur sa surface. Parallèlement à ces bouleversements, les modes de vie humains, individuels et collectifs, évoluent dans le sens d’une progressive détérioration. Les réseaux de parenté tendent à être réduits au minimum, la vie domestique est gangrenée par la consommation mass-médiatique, la vie conjugale et familiale se trouve fréquemment « ossifiée » par une sorte de standardisation des comportements, les relations de voisinage sont généralement réduites à leur plus pauvre expression… C’est le rapport de la subjectivité avec son extériorité – qu’elle soit sociale, animale, végétale, cosmique – qui se trouve ainsi compromis dans une sorte de mouvement général d’implosion et d’infantilisation régressive. L’altérité tend à perdre toute aspérité. Le tourisme, par exemple, se résume le plus souvent à un voyage sur place au sein des mêmes redondances d’image et de comportement.

Les formations politiques et les instances exécutives paraissent totalement incapables d’appréhender cette problématique dans l’ensemble de ses implications. Bien qu’ayant récemment amorcé une prise de conscience partielle des dangers les plus voyants qui menacent l’environnement naturel de nos sociétés, elles se contentent généralement d’aborder le domaine des nuisances industrielles et, cela, uniquement dans une perspective technocratique, alors que, seule, une articulation éthico-politique, que je nomme écosophie, entre les trois registres écologiques, celui de l’environnement, celui des rapports sociaux et celui de la subjectivité humaine, serait susceptible d’éclairer convenablement ces questions. »

«  C’est de la façon de vivre désormais sur cette planète, dans le contexte de l’accélération des mutations technico-scientifiques et du considérable accroissement démographique, qu’il est question. Les forces productives, du fait du développement continu du travail machinique, démultiplié par la révolution informatique, vont rendre disponible une quantité toujours plus grande du temps d’activité humaine potentielle. Mais à quelle fin ? Celle du chômage, de la marginalité oppressive, de la solitude, du désœuvrement, de l’angoisse, de la névrose ou celle de la culture, de la création, de la recherche, de la réinvention de l’environnement, de l’enrichissement des modes de vie et de sensibilité ?  Dans le Tiers-monde, comme dans le monde développé, ce sont des pans entiers de la subjectivité collective qui s’effondrent ou qui se recroquevillent sur des archaïsmes, comme c’est le cas, par exemple, avec l’exacerbation redoutable des phénomènes d’intégrisme religieux. »

« […] il n’est plus question, comme aux périodes antérieures de lutte de classe ou de défense de la « patrie du socialisme », de faire fonctionner une idéologie de façon univoque, il est concevable, par contre, que la nouvelle référence écosophique indique des lignes de recomposition des praxis humaines dans les domaines les plus variés. A toutes les échelles individuelles et collectives, pour ce qui concerne la vie quotidienne aussi bien que la réinvention de la démocratie, dans le registre de l’urbanisme, de la création artistique, du sport, etc. il s’agit, à chaque fois, de se pencher sur ce que pourraient être des dispositifs de production de subjectivité allant dans le sens d’une re-singularisation individuelle et/ou collective, plutôt que dans celui d’un usinage mass-médiatique synonyme de détresse et de désespoir. Perspective qui n’exclut pas totalement la définition d’objectifs unificateurs, tels que la lutte contre la faim dans le monde, l’arrêt de la déforestation ou la prolifération aveugle des industries nucléaires. Seulement, il ne saurait plus s’agir là de mots d’ordre stéréotypés, réductionnistes, expropriant d’autres problématiques plus singulières et impliquant la promotion de leaders charismatiques. »

D’après entretien avec Félix Guattari « Qu’est-ce que l’écosophie ? » Revue chimère, terminal n°56 http://www.revue-chimeres.org/pdf/termin56.pdf

« […] Il n’y a pas d’opposition dans mon esprit entre les écologies : politique, environnementale et mentale. Toute appréhension d’un problème environnemental postule le développement d’univers de valeurs et donc d’un engagement éthico-politique. Elle appelle aussi l’incarnation d’un système de modélisation, pour soutenir ces univers de valeurs, c’est-à-dire les pratiques sociales, de terrain, des pratiques analytiques quand il s’agit de production de subjectivité. »

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