Archive pour la Catégorie 'Education'

Page 3 sur 4

De l’abeille à la ressource en eau

Deux émissions de France Culture s’accordant aux différents thèmes traités ici: l’état de la ressource en eau, l’état des peuplements d’abeilles.

Les limites des ressources en eau

L’eau est synonyme de vie. Sans eau, pas ou peu de vie. Les ressources en eau douce sont finies et elles sont très inégalement réparties à la surface du globe. Dès lors préservons-nous suffisamment cette ressource rare et précieuse, et les écosystèmes naturels qui y sont associés ? Ne sommes-nous pas en train de la gaspiller? De détruire la biodiversité des milieux aquatiques ? Combien de temps faut-il pour qu’une nappe phréatique polluée soit purifiée? Y a-t-il assez d’eau pour satisfaire les besoins d’une population mondiale en croissance et ceux de la nature? Une conférence donnée par Ghislain de Marsily, professeur émérite d’hydrologie à l’Université Paris VI, membre de l’Académie des sciences, évoque les limites de la gestion des ressources en eau.

Voir le site - Ecouter 

Fin de lune de miel ?

Les abeilles seraient-elles en train de disparaître ? Les témoignages d’apiculteurs du monde entier s’accumulent, qui voient leurs colonies disparaître en quelques jours, sans qu’aucune abeille ne soit retrouvée morte au pied de la ruche pour autant. Elles ne seraient donc pas victimes de pesticides, alors d’où provient ce mystère ? Le phénomène, connu sous le nom de « colony collapse disorder », maladie de la disparition, inquiète les scientifiques notamment par le manque de pollinisateurs et sa répercussion sur l’agriculture. En effet 80% des espèces végétales ont besoin des abeilles pour être fécondées. Mais les chercheurs peinent à trouver les causes de ce qui semble correspondre à une perte de mémoire, qui les empêcherait de retrouver leur ruche. Effets inconnus des OGM ? Emissions d’ondes électromagnétiques émises par les téléphones portables, les GPS, la WiFi? Il faut savoir que cette intelligence qui nous semble collective est armée d’un psychisme extraordinaire, proche des animaux dits supérieurs, s’orientant par rapport au soleil, utilisant des modes de communication visuels, chimiques et tactiles qui laissent encore la part belle à l’inconnu. Les entomologistes mènent leur enquête, et parfois, par cet étrange phénomène de mimétisme qui finit par nous rapprocher de nos ennemis, certains deviennent spécialistes des insectes après les avoir longtemps combattu pour les grandes firmes de pesticides.Entre fantastique cité de petits forçats et entité collective, le petit bourdonnement rayé et sa cohorte de cousines a convoqué dans toutes les mythologies le souvenir mêlé du goût de miel et celui, cuisant, du dard, témoignant de notre longue histoire commune. Mais si aujourd’hui les abeilles sont malades de l’homme, certains tentent de renouer le lien comme le créateur du Parti poétique devenu producteur du miel Béton en collaboration avec elles : elles nous livrent le goût de notre territoire pris dans la gangue des alvéoles. Emerge alors à chaque fois un dialogue, une communication non verbale établie entre le monde humain et la nature.

Voir le site - Ecouter

Capable de dire ceci ou cela… pour, dans, à la place de…

On ne se bat pas pour la planète, pour l’environnement. On ne se bat peut-être même pas avec mais dans la planète, dans un environnement. Non à l’intention de la planète, mais à la place des non humains habitant la planète. Comme le disait Deleuze pour l’écrivain, on n’écrit pas pour les bêtes au sens de « à l’intention de », on écrit pour au sens de « à la place » des bêtes, des analphabètes…

http://www.dailymotion.com/video/2yfvENX3XLTZxoMIU « L’homme qui souffre est une bête, la bête qui souffre est un homme. C’est la réalité du devenir. Quel homme révolutionnaire en art, en politique, en religion ou en n’importe quoi, n’a pas senti ce moment extrême où il n’était rien qu’une bête, et devenait responsable non pas des veaux qui meurent, mais devant les veaux qui meurent. » Gilles Deleuze.

Interrogeons nous donc un instant sur ce que peut bien signifier des slogans tels que « 5mns pour la planète » , et toutes autres formes du « faisons ceci cela pour l’environnement »… Car de quoi on parle-t-on quand on dit ça ? Quelle information sur nous-mêmes dissimule le simple fait de pouvoir dire ça ? Faire pour… pourquoi, comment, ou plutôt pour qui ?

Au sens d’Uexküll, ce que nous appelons environnement ou planète n’est pas autre chose que la partie du monde accessible, visible, traductible par nos organes sensoriels. C’est à dire notre monde vécu, monde construit qui n’a rien à voir avec celui du singe, de la plante et du mollusque avec lesquels nous ne partageons pas les mêmes capacités sensorielles d’être affecté par.

http://www.dailymotion.com/video/BOjuohakUQJDPoMG8 « Un lointain successeur de Spinoza dira : voyez la tique, admirez cette bête, elle se définit par trois affects, c’est tout ce dont elle est capable en fonction des rapports dont elle est composée, un monde tripolaire et c’est tout! La lumière l’affecte, et elle se hisse jusqu’à la pointe d’une branche. L’odeur d’un mammifère l’affecte, et elle se laisse tomber sur lui. Les poils la gênent, et elle cherche une place dépourvue de poils pour s’enfoncer sous la peau et boire le sang chaud. Aveugle et sourde, la tique n’a que trois affects dans la forêt immense, et le reste du temps peut dormir des années en attendant la rencontre [...] » Gilles Deleuze.

Ajoutons que contrairement à la conscience animale, la conscience humaine est le siège de l’irruption de l’inconscient dans ses perceptions/représentations de la réalité. C’est à dire que toutes sortes de rêveries peuvent se brancher sur n’importe quelles de nos perceptions. Intentionnalité inconsciente et refoulement ne cessent donc de venir en contaminer le sens. Comme l’animal, l’action de l’homme a un but manifeste, mais dans le même temps, elle est aussi éclaireur de l’inconscient.

Sur ces points, consulter l’ouvrage de Gérard Pommier (Comment les neurosciences démontrent la psychanalyse), et plus précisément le chapitre consacré à la différence entre la conscience animale et humaine. L’homme habite le langage, et par là l’ordre symbolique. Ainsi, lorsque je lui parle, le chat ne perçoit qu’une musique. Un signifiant (part du signe qui peut devenir sensible) sans signifié (tout ce qui est lié à la signification).

Image de prévisualisation YouTube

Mais nous poussons, hommes et animaux, dans un environnement que nous participons à modifier et dont les modifications nous modifient en retour. L’arbre participe ainsi à créer la forêt dans laquelle il se développe. Ce sont donc les interactions entre les vivants qui tout à la fois composent un milieu et s’y construisent. Si bien que même si nous ne sommes pas capables des mêmes affects, représentations et actions, il existe des passerelles entre les différents mondes des vivants. Ce que démontrent les travaux de Boris Cyrulnik (neuropsychiatre et éthologue) sur l’attachement, l’empreinte, la matérialisation de pensée…etc, etc…

Les éclairages suivants de Boris Cyrulnik sont tirés de l’ouvrage de Karine Lou Matignon « Sans les animaux, le monde ne serait pas humain » (éd. Clés / Albin Michel.)

« Le fait d’étudier la phylogenèse, qui est la comparaison entre les espèces, permet de mieux comprendre l’ontogenèse et la place de l’homme. On comprend mieux aussi la fonction et l’importance de la parole dans le monde humain. Il existe une première gestualité universelle, fondée sur le biologique, proche de l’animalité. Dès que le langage apparaît, une deuxième gestualité imprégnée de modèles culturels prend place. Là, la première gestuelle s’enfouit, les sécrétions d’hormones dans le cerveau changent. Donc, on comprend mieux comment le langage se prépare, comment le choix des mots pour raconter un fait révèle l’interprétation qu’on peut en faire, comment la parole peut changer la biologie en changeant les émotions. »

Image de prévisualisation YouTube

« Lorsqu’un bébé humain pleure, cela nous trouble profondément. Si l’on enregistre ces cris et qu’on les fait écouter à des animaux domestiques, on assiste à des réactions intéressantes : les chiennes gémissent aussitôt, couchent leurs oreilles. Elles manifestent des comportements d’inquiétude, orientés vers le magnétophone. Les chattes, elles, se dressent, explorent la pièce et poussent des miaulements d’appel en se dirigeant alternativement vers la source sonore et les humains. Il semble exister un langage universel entre toutes les espèces, une sorte de bande passante sensorielle qui nous associe aux bêtes [...] Le chien qui vit dans un monde de sympathie est hypersensible au moindre indice émis par le corps du propriétaire adoré. C’est donc bien une matérialisation de la pensée humaine transmise au chien qui façonne ce dernier. »

« Première certitude à abandonner : les animaux ne sont pas des machines. J’insiste beaucoup là-dessus : le jour où l’on comprendra qu’une pensée sans langage existe chez les animaux, nous mourrons de honte de les avoir enfermés dans des zoos et de les avoir humiliés par nos rires. Nous avons peut-être une âme, mais le fait d’habiter le monde du sens et des mots ne nous empêchent pas d’habiter le monde des sens. Il faut habiter les deux si l’on veut être un être humain à part entière. Il n’y a pas l’âme d’un côté et de l’autre la machine. C’est là tout le problème de la coupure. »

Image de prévisualisation YouTube

« Les animaux ne sont pas des machines, ils vivent dans un monde d’émotions, de représentations sensorielles, sont capables d’affection et de souffrances, mais ce ne sont pas pour autant des hommes. Le paradoxe, c’est qu’ils nous enseignent l’origine de nos propres comportements, l’animalité qui reste en nous… En observant les animaux, j’ai compris à quel point le langage, la symbolique, le social nous permettent de fonctionner ensemble. »

Le choix des mots n’est jamais neutre. Ainsi, dire se se battre pour l’environnement ou la planète telle que nous la percevons ne veut pas dire autre chose que de rabattre le reste des habitants de la biosphère sur notre propre vision, soit revient à dire la-même chose que ce que nous disons déjà depuis très longtemps dans un cadre humain. A contrario, dire qu’on se bat dedans revient à reconnaître son appartenance à un tout, son insertion dans un ensemble plus vaste où une partie de soi est hors de soi, précisément dans son environnement. Dire qu’on se bat à la place de revient à reconnaître (situer) la place de l’homme, responsable devant la biosphère.

+ voir le dossier du CERPHI consacré à l’animal : http://www.cerphi.net/lec/animal.htm

Désir d’écologie… entre conscience et inconscience ?

«  Longtemps on a considéré la pensée consciente comme la pensée par excellence : maintenant seulement nous commençons à entrevoir le vérité, c’est-à-dire que la plus grande partie de notre activité intellectuelle s’effectue d’une façon inconsciente.  » Nietzsche

http://www.dailymotion.com/video/21nudjpLzGAzQ5WLP 
« Sauver la terre… », « Aimer-vous les uns les autres… » ….qu’est-ce que tout ça signifie, pourquoi est-on capable de dire ceci, comment est-on sensible à cela, d’où vient le désir de… ?

***

Explorons très rapidement quelques unes des conceptions du désir susceptibles d’éclairer à leur manière notre désir d’écologie. Tout d’abord celle de Spinoza pour qui : « Le désir, c’est l’essence même de l’homme, en tant qu’elle est conçue comme déterminée à quelque action par une de ses affections quelconque ». Le désir, c’est-à-dire l’appétit avec conscience de lui-même, est inconscient des causes qui le déterminent, et non de son objet, effet confondu avec ses causes. 

Extrait audio d’après Les nouveau chemins de la connaissance, France Culture 
Intervention de Henri Atlan

http://www.dailymotion.com/video/KjbaSj2AM7pzWmZxX
Le désir chez Spinoza


Extrait audio d’après Vendredi de la philosophie, France Culture, Le Dieu de Spinoza
Intervention de Chantal Jaquet

Spinoza – Éthique – définition des passions – définition 1 – explication

 » Nous avons dit plus haut […] que le désir, c’est l’appétit avec conscience de lui-même, et que l’appétit, c’est l’essence même de l’homme, en tant que déterminée aux actions qui servent à sa conservation. Mais nous avons eu soin d’avertir […] que nous ne reconnaissions aucune différence entre l’appétit humain et le désir.

Que l’homme, en effet, ait ou non conscience de son appétit, cet appétit reste une seule et même chose [i.e. puisque nous restons quoi qu’il arrive inconscient des causes qui le détermine]  ; et c’est pour cela que je n’ai pas voulu, craignant de paraître tomber dans une tautologie, expliquer le désir par l’appétit ; je me suis appliqué, au contraire, à le définir de telle sorte que tous les efforts de la nature humaine que nous appelons appétit, volonté, désir, mouvement spontané, fussent compris ensemble dans une seule définition.

J’aurais pu dire, en effet, que le désir, c’est l’essence même de l’homme en tant qu’on la conçoit comme déterminée à quelque action ; mais de cette définition il ne résulterait pas que l’âme pût avoir conscience de son désir et de son appétit. C’est pourquoi, afin d’envelopper dans ma définition la cause de cette conscience  [i.e. des effets et non des causes] que nous avons de nos désirs, il a été nécessaire d’ajouter : en tant qu’elle est déterminée par une de ses affections quelconque, etc.

En effet, par une affection de l’essence de l’homme, nous entendons un état quelconque de cette même essence, soit inné, soit conçu par son rapport au seul attribut de la pensée, ou par son rapport au seul attribut de l’étendue, soit enfin rapporté à la fois à l’un et l’autre de ces attributs. J’entendrai donc, par le mot désir, tous les efforts, mouvements, appétits, volitions qui varient avec les divers états d’un même homme, et souvent sont si opposés les uns aux autres que l’homme, tiré en mille sens divers, ne sait plus quelle direction il doit suivre. « 

http://www.dailymotion.com/video/777MMQgeDYjbfbQy0
Spinoza – Éthique – Livre III – Proposition xx – scholie :

 » Personne ne cesse donc de désirer ce qui lui est utile et ne néglige la conservation de son être que vaincu par les causes extérieures qui sont contraires à sa nature. Personne n’est donc déterminé par la nécessite de sa nature, mais seulement par les causes extérieures, à se priver d’aliments, ou à se donner lui-même la mort […] il peut arriver que des causes extérieures cachées disposent l’imagination d’une personne et affectent son corps de telle façon que ce corps revête une autre nature contraire à celle qu’il avait d’abord, et dont l’idée ne peut exister dans l’âme. Mais que l’homme fasse effort par la nécessité de sa nature pour ne pas exister ou pour changer d’essence, cela est aussi impossible que la formation d’une chose qui viendrait de rien; et il suffit d’une médiocre attention pour s’en convaincre. « 

***

Le désir de la psychanalyse 

A partir du l’ouvrage de Gérard Pommier, « comment les neurosciences démontrent la psychanalyse », rappelons tout d’abord quelques notions de base sur l’inconscient freudien.

http://www.dailymotion.com/video/5Rx56qOJSbfyc45BQ
Tout d’abord, précisons que nous confondons bien souvent l’inconscient avec le préconscient (ce qui pourrait devenir conscient), ou encore le non-conscient (les activités automatisées ou intégrées de l’organisme). Or l’activité de l’inconscient détermine la conscience sans jamais être consciente elle-même. C’est l’absence du sujet qui qualifie son inconscience. Certains processus restent inconscient parce qu’ils n’ont pas de sujet : ce dernier ne peut pas ou ne veut pas savoir ce qui demeure inconscient.

L’inconscient se caractérise donc par l’absence de subjectivation de certaines représentations, celles-ci demeurant par ailleurs perceptibles ou mémorisables. Les contenus inconscients sont inclus dans des contenants parfaitement lisibles et perceptibles, seule l’absence du sujet qui leur serait adéquat les rend inconscient. Inconscient veut donc dire qu’il n’y a pas de sujet conscient d’un processus de pensée ou d’un fait. Mais c’est aussi la pensée dont le sujet ne réalise pas qu’il la pense, n’en saisit qu’une dimension, n’en comprend pas la signification.

http://www.dailymotion.com/video/d45MngYrqGfZ5eogu
L’inconscience n’est donc pas un lieu ou une essence. Elle n’a pas de localisation distincte, elle n’est pas organiquement ou géographiquement séparée de la conscience. Elle s’infiltre dans la conscience, elle fonctionne au sein de la conscience. La pensée consciente ne permet de saisir que le non-contradictoire. Elle fonctionne selon les principes de la logique aristotélicienne, à savoir : le principe du tiers exclu (il n’existe pas un troisième terme T qui est à la fois A et non-A, soit une propriété est ou vraie, ou fausse) et la réflexivité (je suis capable d’avoir une idée de mon idée). Se faisant, elle comporte donc en elle-même, à sa surface, le terme que le sujet n’évalue pas (refoule).

Si l’inconscient fonctionne en ultraplat dans la conscience, la représentation inconsciente ne s’intègre pas à celle qui est consciente. L’inconscient travaille dans le conscient à partir de plusieurs dimensions, par exemple, l’ambivalence. C’est-à-dire que tant qu’une contradiction n’est pas subjectivée, elle peut engendrer des symptômes qui extériorisent l’ambivalence : le corps parle à la place du sujet. Désir de non-désir, être vu sans voir, ces processus se structurent hors de l’organisme.

+ Les trois concepts linguistiques de référents, de signifiants et de signifiés , blog Novum Corpus

 ***

http://www.dailymotion.com/video/7apS33zQMyd9EfphY
Le désir inconscient va au-delà des raisons que le sujet s’en donne. C’est-à-dire que l’action signifie davantage que sa réalisation. Inhibé ou divisé, le sujet peut vouloir et ne pas vouloir la réaliser en même temps.

Le désir inconscient ne correspond quant à lui à rien de mémorisé ni de mémorisable. Moteur négatif d’un désir qui ignore son objet, un passé traumatisant engendre un désir de le fuir. Pour aller où, la conscience ne comprend pas ce qu’elle cherche, sinon qu’elle le cherche et qu’il faut juste partir vers.

Le désir inconscient ne peut donc jamais être satisfait puisque son objet échappe à la réalisation. En ce sens, on peut parler de perversité du désir humain, une non-satisfaction peut structurer une satisfaction : le plaisir du manque, le désir pour le désir au point d’oublier ce qu’il désir exactement.

Image de prévisualisation YouTube

Les machines désirantes 

A contrario, pour Deleuze et Guattari : « Le désir ne manque de rien, il ne manque pas de son objet. C’est plutôt le sujet qui manque au désir, ou le désir qui manque de sujet fixe, il n’y a de sujet fixe que par la répression. Le désir et son objet ne font qu’un, c’est la machine, en temps que machine de machine » l’Anti-Oedipe, p.43

Dépasser le signifiant et le sujet : l’agencement collectif d’énonciation, d’après article du blog « L’anti-oedipe en question » par Elias Jabre : 

 » [...] Le modèle de l’inconscient deleuzo-guattarien n’est autre que celui de la perversion où l’inconscient machinique produit en permanence des liaisons avec l’environnement qui « dénaturent » le désir, ou plutôt le font évoluer, à force de tâtonnements avec le dehors, jusqu’à capture de nouveaux codes et remodelage de l’orientation libidinale. Le modèle lacanien est, quant à lui, attaché à rechercher la chaîne signifiante du sujet qui serait inscrite dans la structure de son inconscient. Il pourra ainsi retrouver sa véritable place dans l’existence afin de ne plus être dupe de notre monde d’images où, perdu, il souffre de ne pas réaliser son désir profond.

Le concept d’agencement collectif d’énonciation de Guattari-Deleuze permet de sortir de la logique du signifiant. Le sujet n’est plus un individu isolé avec ses signifiants, mais fait partie d’un agencement où il interagit avec un milieu et un groupe qui produisent un agencement collectif d’énonciation en évolution permanente.

Image de prévisualisation YouTube

« (…)  la fonction langage… n’est ni informative, ni communicative; elle ne renvoie ni  à une information signifiante, ni à une communication intersubjective. Et il ne servirait à rien d’abstraire une signifiance hors information, ou une subjectivité hors communication. Car c’est le procès de subjectivation et le mouvement de signifiance qui renvoient à des régimes de signes ou agencements collectifs. (…) la linguistique n’est rien en dehors de la pragmatique (sémiotique ou politique) qui définit l’effectuation de la condition du langage et l’usage des éléments de la langue. »

 « (…) Il y a « primat d’un agencement machinique des corps sur les outils et les biens, primat d’un agencement collectif d’énonciation sur la langue et les mots. (…) un agencement ne comporte ni infrastructure et superstructure, ni structure profonde et structure superficielle mais aplatît toutes ses dimensions sur un même plan de consistance où jouent les présuppositions réciproques et les insertions mutuelles.(…) mais si l’on pousse l’abstraction, on atteint nécessairement à un niveau où les pseudos-constantes de la langue font place à des variables d’expression, intérieures à l’énonciation même ; dès lors ces variables d’expression ne sont plus séparables des variables de contenu en perpétuelle interaction. Si la pragmatique externe des facteurs non linguistiques doit être prise en compte, c’est parce que la linguistique elle-même n’est pas séparable d’une pragmatique interne qui concerne ses propres facteurs » ( …).

« Car une véritable machine abstraite se rapporte à l’ensemble d’un agencement : elle se définit comme le diagramme de cet agencement. Elle n’est pas langagière, mais diagrammatique, surlinéaire. Le contenu n’est pas un signifié, ni l’expression un signifiant, mais tous deux sont les variables de l’agencement. »
(…) « L’unité réelle minima, ce n’est pas le mot, ni l’idée ou le concept, ni le signifiant mais l’agencement. C’est toujours un agencement qui produit les énoncés. Les énoncés n’ont pas pour cause un sujet qui agirait comme sujet d’énonciation pas plus q’ils ne se rapportent à des sujets comme sujets d’énoncé. L’énoncé est le produit d’un agencement toujours collectif qui met en jeu en nous et dehors de nous des populations, des multiplicités, des tentations, des devenirs, des affects, des évènements. »
(extraits tirés de Dialogues et Mille plateaux) « 

***

Désir conscient inconscient des causes qui le déterminent, désir inconscient qui ignore son objet, désir qui ne manque de rien… à chacun de questionner le désir d’écologie qui sou(en)tend ses actions.

***

http://www.dailymotion.com/video/x3b7x2
+ Variations sur le désir : Texte de Jean-Paul Kornobis, décembre 2000.
+ De Claudel à Gombrowicz, ou de Lacan à Deleuze : deux lectures de l’inconscient, blog de l’anti-oedipe en question par Elias Jabre.

La question de l’éducation à l’écologie

Des lignes directrices anciennes

     Dans son article « Education, Ecologie et Approche Systémique » Joël de Rosnay  s’interrogeait en 1994 sur les nouveaux modes de transmission des savoirs que la question écologique impliquait : « […] l’écologie est un concept intégrateur […] plus qu’une discipline scientifique […] elle représente une nouvelle vision du monde et de l’homme dans la nature. Le nouvel écocitoyen doit mieux comprendre comment situer et insérer son action locale dans un ensemble global […] Il s’agit aujourd’hui de l’aider à passer de l’émotion à la responsabilité grâce à une culture scientifique et technique permettant de relier les éléments épars reçus par l’éducation ou les médias. D’où l’importance d’une approche […] multidimensionnelle de l’écologie et de la gestion de l’environnement. »

En ce sens, la question écologique est avant tout le symptôme de l’émergence de nouvelles capacités cognitives nées des travaux récents de la biologie, de la cybernétique et de la systémique etc…. Nouvelles capacités encore dans l’enfance et qu’il convient de faire grandir patiemment à travers une véritable réactualisation de l’apprendre à apprendre dans nos sociétés. Or dans le cadre d’un ensemble terre qui nous apparaît à présent comme clos, apprendre à apprendre c’est savoir organiser et composer ses inévitables et multiples rencontres avec des corps tant matériels (eau, climat) qu’immatériels (information).

La question de l'éducation à l'écologie dans -> CAPTURE de CODES : image001

Alors en tant que praticien de « l’environnement », tous ces mots peuvent paraître assez théoriques. Cependant, chaque jour de travail confirme que notre connaissance actuelle de l’environnement ne nous conduit pas à prendre des décisions « de tête » tellement meilleures. Quelque soit le choix, l’intention, nous interférons dans des circuits complexes de manière à toujours préparer de nouveaux risques pour demain. Mais parallèlement, le seul fait de prendre en compte l’environnement nous force à repenser l’altérité, à évaluer les besoins d’autrui qu’ils soient humains ou non. Plus largement encore, à déplacer les frontières traditionnelles, à reconnaître l’inscription de ses actions dans un tout : à un type d’agriculture, un type de paysage, un type de biodiversité…

En ce sens la question écologique et la gestion de l’environnement qui en découle, participent à former aujourd’hui un nouveau type de bien collectif. Un bien construit par une multitude d’acteurs qui tous relient et compilent des connaissances, expérimentent sur le mode essaie/erreur. Au final, les externalités positives qui en résultent permettent dès aujourd’hui de multiplier les chemins décisionnels pour chacun. Faut-il acheter ceci, construire comme cela etc…Mais pour que ce « chacun » prenne réellement corps, il est inévitable de concevoir les modes de transmission des savoirs adaptés. Adaptés tant à la nature des informations à transmettre qu’à ses multiples récepteurs.

Externalité

Le point de vue développé par la suite est qu’il s’agit de mettre en avant un mode de transmission des savoirs principalement orienté vers le développement individuel de capacités combinatoires. Cela afin de créer les nœuds de savoirs, les hyperliens de lecture permettant de se glisser entre les différentes sources de connaissance d’un « environnement », qu’il soit artificiel ou naturel, de plus en plus fourmillant et prenant place dans un monde vécu comme de plus en plus étroit.

Constat d’insuffisance

     Avec maintenant plus d’une dizaine d’année de recul vis-à-vis des orientations pédagogiques de Joël de Rosnay, évaluons quelque peu notre situation actuelle. L’écologie politique représente 1, 5% des votes exprimés au premier tour de l’élection présidentielle en France, au moment même ou d’après une enquête récente IFOP – Acteurs Publics (26 octobre 2006), plus de neuf personnes interrogées sur dix (91%) se disaient préoccupées par la protection de l’environnement. Parmi elles, 46% se déclaraient même très préoccupées.

A vrai dire, la véritable surprise de cette étude est surtout l’émergence en seconde position des mesures perçues comme les plus efficaces pour lutter contre les dégradations, d’une attente exprimée en termes de pédagogie, souhait regroupant 22% des interviewés. Ceux-ci appellent de leurs vœux l’introduction de cours d’éducation à l’environnement dans les programmes scolaires.

Cette attente est à éclairer par la note sur « l’état de l’opinion sur l’effet de serre et le changement climatique » de l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie. Fin 2005, celle-ci remarquait que conformément aux années précédentes, les études sur la perception de l’effet de serre révélaient deux grandes tendances paradoxales. D’une part une sensibilisation accrue au sujet, d’autre part une méconnaissance générale de sa définition dans la mesure où 50% des interviewés reliaient encore l’effet de serre à la couche d’ozone ou à une mauvaise gestion des déchets, seulement 14% aux CO2.

image003 dans -> PERSPECTIVES TRANSVERSES

A s’en tenir à ces différents indicateurs, constatons très simplement que la question écologique souffre encore d’un grave déficit en termes d’informations assimilées et assimilables, cela malgré un relais médiatique dorénavant non négligeable.

On serait donc tenter de dire qu’assez loin des objectifs et méthodes proposés par Joël de Rosnay, les diverses tentatives de transmission des savoirs restent encore aujourd’hui bien souvent éclatées et parcellaires, ne regroupant que de petits auditoires autour d’experts ou de thèmes militants ponctuels ; ne regroupant de grands auditoires qu’autour de séance d’imprécations collectives intrinsèquement plus émotionnelles qu’informatives.

Dès lors, comment regretter l’absence de capacité de synthèse, de combinaison des savoirs, quand même les concepts de base ne sont pas connus ? Voilà que le serpent se mord la queue, et la rondeur de la terre ne suffit plus à rendre cette image sympathique. Car à partir du moment où des informations disséminées ne rencontrent pas chez l’auditoire le filet de connaissance nécessaire à assurer une prise de conscience pérenne des phénomènes, par suite il est bien difficile d’enclencher des cycles vertueux du type : information – intégration – action – nouvelle information – synthèse (recombinaison – extraction et constitution du « filet »).

Une conclusion s’impose à ce stade : continuer à se référer aujourd’hui à une indifférence de l’auditoire ne suffit plus à masquer les carences dans la transmission. Etre animé des meilleures intentions, stigmatiser des abus, relever des symptômes parcellaires, tout cela n’autorise pas l’abandon de toute vision prospective et ne fait pas politique.

La question de la question

      Car il s’agit bien malgré « l’urgence » de la situation de continuer à avancer l’écologie en tant que culture nouvelle favorisant l’intégration des connaissances ; la gestion de l’environnement en tant que plus grande visibilité donnée à la diversité des pratiques humaines.

Autrement dit, ne pas abandonner la complexité et continuer à parier sur la lucidité de son auditoire, alors mêmes qu’il va falloir frapper fort et rapidement nous prévient le président du GIEC. Mais on pourrait tenter ici un parallèle entre l’écologisme urgentiste et l’action humanitaire. Si l’intervention est en mesure de régler ponctuellement une crise, elle n’affecte en rien ses conditions de reproduction. Et peut-être même bien au contraire, les crises se manifestant sous bien des formes, de l’eau polluée à l’idée qui le permet. Qui plus est, nous sentons bien qu’il n’est fondamentalement plus possible d’administrer des suppositoires prédigérés à une population très largement en quête de sens, au sens large. Nous vivons à 99% dans un environnement, ou plutôt un milieu, construit par et pour nous-mêmes. Et ce nous-mêmes ne s’arrête pas à la simple description d’individus enfants qui seraient pris dans une folle pulsion de mort.

Mais c’est peut-être précisément à partir de cette pauvre écologie de pensée, paresse ou faillite, qu’il est cependant possible d’avancer en contrepoint quelques lignes d’actions afin de définir quelques lignes de ce que pourrait être un accès équilibré aux connaissances nouvelles qu’ouvre la porte écologique.

main-raphael-richard.jpg 
© Raphael Richard – http://www.24pm.fr

Notre environnement change et nous continuons de nous considérer come un « empire dans un empire », comme hors-circuit. Nous continuons à penser que nos organisations sociétales collectives, mentales individuelles, ne se trouveraient pas elle-même modifiées par ces puissants changements. Changements dont nous ne percevons par ailleurs, en tant que partie prenante aux systèmes, que des fragments sélectionnés et déformés.

Il en est ainsi de notre vieux mode de pensée qui considère l’homme et des objets aux alentour dans une relation sujet – objet et où l’ensemble de ces dernier est communément appelé nature. Par suite confondant largement la question de cette nature préconstituée (dit grossièrement ce que nous appelons gestion de l’environnement) et la question écologique, nous ne pouvons que fatalement rester aveugles à notre propre écologie humaine, sous-système de sous-systèmes de la biosphère. Nous parlons alors en termes d’individus à la frontière figée, d’une forme homme sans devenir, prisonnière du mythe de la fin de son histoire. Conséquence de cette démarche négative, les individus sont toujours analysés sous l’angle de l’adaptation à un dehors transcendant, bien trop rarement en tant que système en interaction et coévolution avec. Alors à partir d’une telle vision statique, ne nous étonnons plus de ne pouvoir concevoir que des représentations floues. Exemple : une fois défini l’environnement comme tout ce qui n’est pas l’homme, que devient cette notion une fois dit qu’il s’agit d’y réintégrer ce-dernier ?

Tout l’enjeu de l’approche systémique que permet l’écologie consiste précisément à nous aider à ajuster notre focale sur ces points, à anticiper plus durablement, à repenser des frontières traditionnelles devenues aujourd’hui obsolètes. Ce dernier point étant peut-être même le principal apport possible de l’écologie à notre temps.

Système et frontière

      Grossièrement, tout système peut se représenter comme une différenciation interne entretenue par un flux énergétique (matière, information) externe. Ce flux qui traverse le système détermine alors un intérieur différencié (un extérieur sélectionné) et un extérieur (l’environnement), système ouvert à la circulation des flux qui assure la régulation de l’ensemble. Un système est donc toujours relié à un environnement (à un autre système plus ouvert), à une écologie (à des relations entre systèmes). Ainsi le système minéral de la lithosphère oriente et délimite les possibilités de vie du système organique de la biosphère, qui lui même, oriente et délimite les possibilités d’association des animaux et végétaux du système social de la sociosphère.

L’approche systémique est donc une façon de percevoir à la fois l’arbre et la forêt, sans que l’un ne masque l’autre. L’arbre est perçu comme une configuration d’interactions appropriée aux conditions de vie de la forêt, elle-même association d’arbres dont les interactions produisent la propre niche écologique des individus.

image005 dans Bateson

De même pour l’homme, sous-système de systèmes, il ne compose qu’un arc dans un circuit plus grand qui toujours le comprend lui et son environnement (l’homme et l’ordinateur, l’homme et la canne…). Gregory Bateson, l’un des fondateurs de la cybernétique de seconde génération, nous donne à voir un exemple de circuit, celui de l’aveugle avec sa canne. Il se demande alors « où commence le soi de l’aveugle ? Au bout de la canne ? Ou bien à la poignée ? Ou encore, en quelque point intermédiaire ? » Mais à vrai dire toutes ces questions sont absurdes puisque la canne est tout simplement une voie au long de laquelle sont transmises des informations, de sorte que couper cette voie c’est supprimer une partie du circuit systémique qui détermine la possibilité de locomotion de l’aveugle. Plus généralement : « l’unité autocorrective qui transmet l’information ou qui, comme on dit, pense,  agit et  décide, est un système dont les limites ne coïncident ni avec celles du corps, ni avec celles de ce qu’on appelle communément soi ou conscience ».

image006 dans Education

Autrement dit, des éléments se combinent et s’agencent entre eux en permanence, de telle manière que les systèmes qui en résultent remettent en question les classiques notions de frontière entre l’artificiel et le naturel, l’individuel et le collectif. Les travaux de Raphaël Bessis  complètent utilement cette perspective.

Pour lui, à la frontière tout est question d’échelle tant les subjectivités racinent dans de multiples expansions, d’agencements en collectivités, de collectivités jusqu’à la biosphère : « […] il me paraît bien plus adéquat de parler de configuration singulière, plutôt que d’individu, configuration singulière qui ne prend forme qu’en rapport à d’autres configurations singulières, lesquelles ne se comprennent que dans un contexte très fortement dynamique. Ainsi, l’homme n’est plus pensé dans une position isolationniste, archipélique où les êtres seraient complètement distincts les uns des autres : atomisés […] C’est à ce niveau d’analyse que l’on commence à percevoir les turbulences dans lesquelles séjourne l’âme humaine : l’individu au sens strict n’existe nullement, tant la subjectivité humaine s’ancre dans de multiples expansions, établissant la pluralité de ces racines dans un champ beaucoup plus large : celui de la collectivité, laquelle n’ayant pas davantage de forme parfaitement close, pleine et isolée, s’ouvrirait et s’ancrerait sur un collectif encore plus vaste. Si bien que d’une expansion à l’autre, nous nous retrouverions assez vite au niveau presque le plus général, celui de la société elle-même. C’est en ce sens que le schisme entre la société d’un côté et l’individu de l’autre est souvent une opinion sociologique non interrogée, qui en fait une problématique tout à fait passionnante. Peut-être pouvons-nous l’exprimer en un chiasme : l’individu est un être social et la société est faite d’individus…»

     Alors d’un point de vue opérationnel, quelles ressources nouvelles extraire de ce type de perspective sur le monde ? Concrètement, en termes d’évaluation des besoins futurs, de politique publique, et surtout de transmission des savoirs.

Si comme le décrit Bessis notre monde moderne devient toujours plus clos, toute altérité se voyant petit à petit dissoute du fait de l’uniformisation des pratiques produite par le processus de la mondialisation, alors les rétroactions de chacune de nos actions nous apparaissent de plus en plus visibles, comme sous la forme d’échos. En conséquence, il n’y a plus de lieu ou je ne trouve une « trace » de moi-même. J’ai même un écho de moi-même quand je retrouve des pesticides dans les glaces polaires. Dès lors la nécessité et la possibilité même du mouvement (pulsion de fuite) devient beaucoup moins essentielle et la stratégie de développement des humains beaucoup plus « végétale ».

image007 dans Joel de Rosnay

Ainsi, à l’image de la plante pour la lumière et l’eau, le nouvel individu étend en surface ses capteurs d’information dans le réseau de réseaux sociétal, à la recherche de sens composites. Autrement dit, il cherche à combiner et expérimenter les approches de toute nature (scientifiques, industrielles, médiatiques, artistiques…), approches dont il a les échos permanents dans la société informationnelle au sein de laquelle il « pousse ». Alors si de par l’arrachement à la nécessité du milieu qu’avait permis la technique l’homme était en capacité de construire son propre terreau, à la carte, il en est peut-être à présent en devoir. En contrepoint, il ne peut évidement plus se satisfaire d’un substrat de connaissance traditionnel : analytique, linéaire et séquentielle. La connaissance « encyclopédique » doit donc faire place à une connaissance plus systémique favorisant relations et interdépendances, et le rôle que peut y jouer l’écologie nous apparaît ici comme majeur.

Car l’écologie est précisément cette science des agencements qui doit nous permettre de devenir des interprètes du monde. A travers la reconnaissance et l’organisation des circuits dans lesquels on s’insère, l’écologue est peut-être finalement assez proche du médecin nietzschéen : il donne du sens à partir d’une compréhension des rapports et non d’une quelconque morale, pour en finir avec : « la monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international – la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous – ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. » G. Bateson.

Cette découverte dont parle Bateson nous ramène à toujours à la question de l’apprendre à apprendre. Car si aujourd’hui 22% des interviewés sont demandeurs d’éducation à l’environnement dans les programmes scolaires, reste à savoir comment. Quoi ? A la place de ? En articulation avec ? Comment combiner ? Si les voies d’accès et réponses possibles sont multiples, il convient de regarder particulièrement la place de l’art, sa puissance propre dans une approche plus systémique.

Art et correction

     Pour G. Bateson, l’ensemble de l’esprit est un « réseau cybernétique intégré » de propositions, d’images, de processus etc. etc.…, la conscience, un échantillon des différentes parties et régions de ce réseau : « si l’on coupe la conscience, ce qui apparaît ce sont des arcs de circuits, non des pas des circuits complet, ni des circuits de circuits encore plus vaste. »

Notre conscience n’est donc qu’une petite partie du réel systématiquement sélectionnée et aboutissant à une image déformée d’un ensemble plus vaste. Bateson donne ici à voir l’exemple de l’iceberg. Si à partir de la surface visible de celui-ci nous pouvons deviner ou extrapoler le type de matière qui se trouve immergée, il n’en est pas du tout de même à partir du matériel livré par la conscience : « le système de la pensée consciente véhicule des informations sur la nature de l’homme et de son environnement. Ces informations sont déformées ou sélectionnées et nous ignorons la façon dont se produisent ces transformations. Comme ce système est couplé avec le système mental coévolutif plus vaste, il peut se produire un fâcheux déséquilibre entre les deux». Ainsi une pure rationalité projective « non assistée » est nécessairement pathogénique et destructrice de la vie, car : « la vie dépend de circuits de contingences entrelacés, alors que la conscience ne peut mettre en évidence que tels petits arcs de tels circuits que l’engrenage des buts humains peut manœuvrer. »

image010

Pour nos actions quotidiennes, les conséquences néfastes sont nombreuses. Elles ont toutes ceci de commun que : « les erreurs se reproduisent à chaque fois que la chaîne causales altérée (par la réalisation d’un but conscient) est une partie de la structure de circuit, vaste ou petit, d’un système. »

Dès lors pour l’homme, la surprise ne peut alors qu’être continue vis-à-vis des effets de  ses « stratégies de tête », cela quelque soit la nature de ses intentions. Prenons l’exemple suivant lequel nous souhaiterions assainir un territoire infesté de moustiques afin d’y développer le tourisme ou l’agriculture, générer des revenus pour le monde rural, maintenir les populations sur le territoire et protéger l’environnement de toute forme de surexploitation.

image009

Première option, nous utilisons du DDT pour tuer les insectes, exemple donné par Bateson. Se faisant nous privons l’ensemble des insectivore de leur nourriture, ce qui en retour à pour effet de multiplier certaines des populations d’insectes. Nous sommes donc conduit à utiliser une plus grande quantité de DDT, jusqu’à la possibilité d’empoisonner y compris les insectivores : « ainsi, si l’utilisation de DDT en venait à tuer les chiens par exemple, il y aurait dès lors lieu d’augmenter le nombre de policier pour faire faire face à la recrudescence des cambriolages. En réponse ces même cambrioleurs s’armeraient mieux et deviendraient plus malin…etc. etc.… ». Deuxième option, plus actuelle, nous produisons des moustiques OGM équipé d’un gène qui les protège contre le paludisme dont ils sont l’un des vecteurs. Quid des effets d’une éventuelle propagation du gène aux autres insectes, aux prédateurs ? Quid des conséquences éventuelles de la prolifération de moustiques mutants sur les niches écologiques ? Et ainsi de suite…Entre ces deux options, cinquante ans, mais peu ou prou, subsiste toujours les même interrogations.

Ainsi, dans un monde fait de structure et de circuits plus ou moins inaccessibles à l’homme, la « sagesse » de ce denier consiste précisément dans la reconnaissance ou la perception de ceux-ci, comme des relations qui nous relient. Comment ? L’art est l’une de ces voies privilégiée d’accès vers, dans la mesure où « […] l’art, à une fonction positive, consistant à maintenir ce que j’ai [Bateson] appelé « sagesse », modifier, par exemple, une conception trop projective de la vie, pour la rendre plus systémique […] ce que la conscience non assistée (par l’art, les rêves, la religion…) ne peut jamais apprécier, c’est la nature systémique de l’esprit. »

image008

Ce qui est souligné dans la profondeur d’une œuvre d’art, dans une composition, ce sont des catégories de relations et non quelques éléments relatés aux contours facilement identifiables. Le projet de l’œuvre d’art est un projet intégrateur qui rencontre ici l’objectif de l’écologie. Ce que disait Nietzsche à propose de ce qu’accomplit le danseur, c’est précisément le dépassement des antinomies. Le corps dansant a le pouvoir d’unir les contraires et « nous avons l’art, afin de ne pas mourir de la vérité ».

Le jeu de la combinaison des sources et des savoirs consiste précisément à accroître cet échantillon qu’est la conscience. Mais pas seulement quantitativement, bien plus qualitativement en reliant les « vides », les coupes de circuit, en éclairant ces zones grises d’un chemin de pensée. Sous cet angle, l’écologie apparaît, en plus de la science, comme l’art des agencements, de la composition de modes d’existence. En résonnance avec le devenir artiste nietzschéen, elle permet la création de perspectives nouvelles au sens où il existerait une boucle (écologie mentale) du type : « les modes de vie inspirent des façons de penser, les modes de pensée créent des façons de vivre », en combinant et expérimentant les approches scientifiques, industrielles, médiatiques et artistiques.

Pistes de réflexions et lignes directrices

     La question écologique telle qu’elle se pose à nous aujourd’hui, c’est la question de la frontière. Mais elle n’est pas sans frontière, c’est peut-être même le jeu de la frontière mobile et de la composition de mode d’existence. Alors bien évidemment tout cela n’est pas sans poser de grave problème à nos systèmes traditionnels de transmission des connaissances, ceux-ci ayant toujours besoin d’étiquettes, de classeurs et de casiers.

Mais peut-être qu’avant cela, il conviendrait déjà de réinterroger le mode opératoire médiatique qui consiste classiquement au niveau de la question écologique à produire de manière séquentielle et linéaire, du connu avec de l’inconnu, du complet avec de l’incomplet, du simple avec du complexe. Car si notre objectif est bien de proposer les étapes clés d’un parcours équilibré d’accès aux connaissances auprès d’un grand public, il convient d’en finir au plus vite avec le prémâché et de viser à toujours plus combiner curiosité, exploration, recherche personnelle, pédagogie, expérimentation, création artistique etc…de sorte à offrir aux différents publics un niveau de lecture adapté à chacun. Soit exploiter véritablement les nouvelles possibilités nées de l’approche systémique, pour « aider à s’élever pour mieux voir, à relier pour mieux comprendre et à situer pour mieux agir. » (Joël de Rosnay)

j1hqucalrbdu1cakuza33caaelo4bcaeblu74catlvt0acakehbk6caksdcg0ca35asspca0e8n09cavm4vabcaul1hmkcamm3foccarbdrhdca3v0b3bcagfci5xcapmwnytcakzp0h2ca9jvk7hcag3ubrr

Toute transmission d’information relative à l’écologie se devrait donc de combiner les trois temps suivants :

·         Transmettre les informations et concepts de bases : par delà les polémiques et les jugements de valeur, pour former les nœuds d’une grille de lecture. Il existe une place pour des informations de base (concepts clés). L’environnement est à bien des égards une machinerie dont les différentes pièces du moteur peuvent être décrites par déconstruction, à la condition qu’une synthèse articulée soit en mesure de resituer ces éléments dans un contexte plus vaste.

·         Employer une tonalité mobilisatrice et interrogatrice : pour initier cette synthèse, il convient de présenter l’ensemble du domaine à communiquer de manière attractive en donnant à penser, en initiant l’exercice créateur de la réflexion individuelle et collective. Car l’objectif est d’apprendre à apprendre à retrouver les informations pertinentes par soi-même et complexifier ainsi sa base de connaissance, conduire à un enrichissement mutuel des concepts (synergie des idées). 

·         Utiliser différents canaux de transmission : opter pour la complexité en pariant sur la lucidité de son auditoire nécessite d’offrir différents niveaux d’accès et de lecture à ses messages (ludique, logique, affectif, interactif…). Car on ne sait pas à l’avance par quel canal on apprend ceci ou cela, on déplie ceci ou cela. Une courbe, un tableau, une musique, un paysage…Le rôle de l’art apparaît ici comme un facteur positif de premier plan, créateur de synergies, catalyseur d’une certaines écologie des idées.

     Pour finir, rappelons une conclusion importante de la théorie des systèmes : plus les voies de circulation de l’énergie (i.e. de l’information) sont nombreuses, plus un système est capable de s’autoréguler. Mais multiplier les voies de circulation de l’information sans adapter les transmetteurs et préparer les récepteurs n’est source que de nouvelles saturations et pollutions. Et voilà à précisément pourquoi nous ne sommes toujours pas prêts aujourd’hui à poser correctement la question de l’écologie, pourquoi en ressort autant de bruit et comment nous risquons de rater une grande partie de ce défi de notre temps. Autrement dit, en rester à la norme.

Bateson disait en son temps: « j’affirme que si vous voulez parler de choses vivantes, non seulement en tant que biologiste académique mais à titre personnel, pour vous-même, créature vivante parmi les créatures vivantes, il est indiqué d’utiliser un langage isomorphe au langage grâce auquel les créatures vivantes elles-mêmes sont organisées – un langage qui est en phase avec le langage du monde biologique». Peut-être pourrait-on ajouter très simplement que si nous voulons parler de quelque chose de nouveau en matière écologique, il nous faut également un langage nouveau.

image011

Fragment d’André Gorz : la personne devient une entreprise

Le déplacement de la production matérielle vers la production immatérielle ou production de soi, bouleverse les catégories classiques de l’économie politique. La richesse ne se mesure plus alors en valeur monétaire, mais l’intelligence se dégage de l’hégémonie d’une science qui allie technologie et subjectivité. Imaginaire et relations de savoirs deviennent les nouveaux moteurs économiques.

Note sur le travail de production de soi
Article d’André Gorz paru dans la revue Écorev N° 7
Voir l’article introductif aux travaux de Gorz par Jean Zin.

Fragment d'André Gorz : la personne devient une entreprise  dans -> ACTUS kapnasjktanarkikapitalisme2005dodo150sjpg       Le 5 mai 2001, à Berlin, le Directeur des Ressources Humaines de Daimler Chrysler expliquait aux participants d’un congrès international que « les collaborateurs de l’entreprise font partie de son capital ». Il précisait que leur comportement, leurs compétences sociales et émotionnelles jouent un rôle important dans l’évaluation de leur qualification. Par cette remarque, il faisait allusion au fait que le travail de production matérielle incorpore une proportion importante de travail immatériel. Dans le système Toyota, en effet, les ouvriers des ateliers de montage final commandent eux-mêmes les pièces aux sous-traitants – les commandes remontent en une cascade inversée, du montage final aux sous-traitants de premier rang dont les ouvriers se font eux-mêmes livrer par ceux du deuxième rang etc. - et sont eux-mêmes en rapport avec la clientèle. Comme le précisait il y a quelques années le directeur de la formation de Volkswagen : « Si les groupes de travail ont une large autonomie pour planifier, exécuter et contrôler les processus, les flux matériels et les qualifications, on a une grande entreprise faite de petits entrepreneurs autonomes. » Ce « transfert des compétences entrepreneuriales vers la base » permet de « supprimer dans une large mesure les antagonismes entre travail et capital ».

http://www.dailymotion.com/video/x40gjv

L’importance que prend désormais le « travail immatériel » dans toutes les activités n’empêche naturellement pas que les grandes entreprises emploient une proportion décroissante de « collaborateurs » permanents quoique « flexibles » – les horaires, en particulier, varient en fonction du volume des commandes – et une proportion croissante de précaires (CDD, intérimaires et, surtout, « externes »). Ceux-ci comprennent 1°) des travailleurs des fabrications et services externalisés, sous-traités avec des entreprises indépendantes mais en fait très dépendantes des grandes firmes qui font appel à elles ; 2°) des télétravailleurs à domicile et des prestataires de services individuels dont le volume de travail est soumis à de fortes variations et qui sont payés au rendement ou à la vacation. Les 50 plus grandes firmes américaines n’occupent directement que 10% des personnes qui travaillent pour elles.

Le travail immatériel suppose de la part des personnels un ensemble d’aptitudes, de capacités et de savoirs qu’on a pris l’habitude d’assimiler à des « connaissances ». Le « capital de connaissances » des prestataires de travail est considéré par l’entreprise comme le « capital humain » dont elle dispose. Il constitue une part tendanciellement prépondérante de leur capital. En fait, les « connaissances », quoique indispensables, ne représentent qu’une part relativement faible des « compétences » que l’entreprise considère comme son « capital humain ». Le DRH de Daimler Chrysler le dit clairement : « Les collaborateurs de l’entreprise font partie de son capital… Leur motivation, leur savoir-faire, leur flexibilité, leur capacité d’innovation et leur souci des désirs de la clientèle constituent la matière première des services innovants… Leur travail n’est plus mesuré en heures mais sur la base des résultats réalisés et de leur qualité… Ils sont des entrepreneurs. »

Les « compétences » dont il est question ne s’apprennent pas à l’école, à l’université ou dans les cours de formation. Elles ne sont pas mesurables ou évaluables selon des étalons préétablis. Elles sont des « talents » – d’improvisation, d’innovation, d’invention continuelles – beaucoup plus que des savoirs. Cela tient à la nature de l’économie de réseau. Chaque entreprise est insérée dans un réseau territorial lui-même interconnecté avec d’autres dans des réseaux transterritoriaux. La productivité des entreprises dépend dans une large mesure des capacités de coopération, de communication, d’auto-organisation de leurs membres ; de leur capacité de saisir globalement une situation, de juger et décider sans délai, d’assimiler et de formuler des idées. Ils sont les acteurs d’une organisation qui ne cesse de s’organiser, d’une organisation en voie d’auto-organisation incessante. Leur produit n’est pas quelque chose de tangible mais, avant tout, l’activité interactive qui est la leur. La capacité de se produire comme activité est à la base de tous les services interactifs : la psychothérapie, activités de conseil, l’enseignement, le commerce etc. sont autant d’activités de mise en œuvre, voire de mise en scène de soi-même. Se produire comme activité vivante est aussi l’essence des sports, des activités ludiques, d’activités artistiques comme le chant, le théâtre, la danse, la musique instrumentale.

Telle étant la nature du « capital humain », la question pose aussitôt : Á qui appartient-il ? Qui donc l’accumule, le produit ?

Les entreprises ne sont de toute évidence pas à son origine. Son accumulation primitive est assumée dans son quasi-intégralité par la société dans son ensemble. Les géniteurs et éducateurs, le système d’enseignement et de formation, les centres de recherche publics assurent la part la plus importante de cette accumulation en transmettant et rendant accessible une part décisive des savoirs et connaissances, mais aussi des capacités d’interprétation, de communication qui font partie de la culture commune.

Les personnes, pour leur part, ont à s’approprier cette culture et à se produire elles-mêmes en utilisant, détournant ou pliant à leurs propres fins les moyens culturels dont elles disposent. Cette production de soi a toujours une dimension ludique. Elle consiste essentiellement à acquérir, développer, enrichir des capacités de jouissance, d’action, de communication, de création, de cognition etc. comme des fins en elles- mêmes..

Et ce développement de soi, cette autoproduction d’un sujet aux facultés personnelles vivantes est le but des jeux et des joutes, des sports et des activités artistiques dans lesquelles chacun se mesure aux autres et cherche de ou à dépasser des normes d’excellence qui elles-mêmes sont l’enjeu de ces activités.

Le « capital humain » est donc tout à la fois un capital social produit par toute la société et un capital personnel dans la mesure où il n’est vivant que parce que la personne a réussi à s’approprier ce capital social et à le mettre en œuvre en développant sur sa base un ensemble de facultés, capacités et savoirs personnels. Ce travail d’appropriation, de subjectivation, de personnalisation, accompli sur la base d’un fond culturel commun est le travail originaire de production de soi.

Les entreprises disposent ainsi presque gratuitement d’un capital social humain qu’elles se bornent à compléter et adapter à leurs besoins particuliers. Á mesure que la capacité de produire des connaissances nouvelles, d’échanger et communiquer des savoirs et des informations, de s’auto-organiser et de s’accorder avec les autres prend une importance croissante dans le travail, la production originaire de soi se prolonge tout au long de la vie et tend à s’autonomiser vis-à-vis du travail et de l’entreprise. Les activités ludiques, sportives, artistiques, culturelles, associatives par lesquelles la personne développe ses capacités et savoirs vivants gagnent en importance. La capacité de se produire excède le besoin qu’en ont les entreprises. Tout travail déterminé n’en est qu’une mise en œuvre contingente, un possible parmi d’autres. Tout en s’y impliquant, le sujet ne s’identifie pas profondément à son travail. Son attachement à une firme déterminée est faible quels que soient les efforts de celle-ci pour se l’attacher. Les activités hors travail tendent à revêtir pour lui une importance plus grande que son travail immédiat. Ce dernier tend à n’être que le moyen qui permet des activités hors travail épanouissantes et créatrices de sens.

La gestion du personnel doit répondre dans ces conditions à des exigences contradictoires. Les firmes doivent s’emparer de la créativité des personnels, la canaliser vers des actions et des buts prédéterminés et obtenir leur soumission. Mais elles doivent éviter en même temps d’enfermer la capacité d’autonomie dans des limites trop étroites pour ne pas mutiler la capacité d’adaptation, de perfectionnement, d’invention. La stratégie patronale tend par conséquent à se déplacer de la domination directe de l’activité de travail vers la domination sur la production de soi, c’est-à-dire sur l’étendue et la division des capacités et des savoirs que les individus doivent acquérir, et sur les conditions et modalités de leur acquisition. La domination s’étendra donc vers l’amont et l’aval du travail direct. Elle s’étendra au temps de non-travail, aux possibilités d’aménager et d’organiser le temps hors travail. La vie entière se trouve soumise aux contraintes d’horaires et de rythmes de travail flexibles et imprévisibles qui fragmentent le temps, introduisent des discontinuités et font obstacle aux activités sociales et familiales. Le temps de travail, quoique réduit, pèse plus lourdement sur et dans la vie qu’au temps des horaires réguliers et du travail continu.

Un récent rapport, rédigé à la demande d’une fondation de recherche des syndicats allemands, par des membres d’instituts universitaires et patronaux, conclut ceci : « En raison des changements de plus en plus importants des conditions d’emploi, de leur flexibilisation et de la mobilité lieux de travail, des interruptions désormais « normales » de l’activité par des congés de formation, des activités familiales, des vacances mais aussi des périodes récurrentes de chômage, la vie privée devient de plus en plus dépendante de l’emploi qu’on peut trouver… » Le travail empiète et déborde de plus en plus sur la vie privée par les exigences qu’il fait peser sur elle. De plus en plus souvent, l’individu doit assumer la responsabilité de sa qualification, de sa santé, de sa mobilité, bref de son « employabilité« . Chacun est contraint de gérer sa carrière tout au long de sa vie et se voit ainsi transformé en « employeur de son propre travail ». Les auteurs suggèrent que des syndicats modernes devraient se comporter comme des « unions des employeurs de leur propre travail » dont les membres, à l’égal des chefs d’entreprise, investissent leurs revenus dans l’acquisition, tout au long de leur vie de nouvelles connaissances, en vue d’une meilleure valorisation de leur capital humain.

La précarité de l’emploi, les conditions changeantes de « l’employabilité », une temporalité fragmentée, discontinue font finalement de la production de soi un travail nécessaire sans cesse recommencé. Mais la production de soi a perdu son autonomie. Elle n’a plus l’épanouissement et la recréation de la personne pour but, mais la valorisation de son capital humain sur le marché du travail. Elle est commandée par les exigences de « l’employabilité » dont les critères changeants s’imposent à chacun. Voilà donc le travail de production de soi soumis à l’économie, à la logique du capital. Il devient un travail comme un autre, assurant, à l’égal de l’emploi salarié, la reproduction des rapports sociaux capitalistes. Les entreprises ont trouvé là le moyen de faire endosser « l’impératif de compétitivité » par les prestataires de travail, transformés en entreprises individuelles où chacun se gère lui-même comme son capital.

On retrouve là la quintessence du « workfare » dans sa version blairiste (mais le blairisme a maintenant gagné la France et l’Allemagne sous d’autres appellations). Le chômage est aboli, n’est plus que le signe que votre « employabilité » est en défaut et qu’il faut la restaurer. Les intermittences du travail emploi, comme d’ailleurs l’accroissement du temps dit « libre », doivent être comprises comme des temps nécessaires à cette restauration.

Celle-ci devient obligatoire, sous peine de perte des « indemnités de recherche d’emploi » (la « jobseekers’ allowance », nouvelle appellation de l’indemnité de chômage.) La production de soi est asservie.

Mieux encore : Dans la foulée on abolit le salariat. Non pas en abolissant le travail dépendant mais en abolissant, par le discours au moins, la fonction patronale. Il n’y a plus que des entrepreneurs, les « collaborateurs » des grandes entreprises étant eux-mêmes des « chefs d’entreprise » : leur entreprise consiste à gérer, accroître, faire fructifier un capital humain qui est eux-mêmes, en vendant leurs services.

Un néophyte de l’ultra-néolibéralisme a parfaitement exprimé cette idéologie : « La caractéristique du monde contemporain est désormais que tout le monde fait du commerce, c’est-à-dire achète et vend… et veut revendre plus cher qu’il n’a investi… Tout le monde sera constamment occupé à faire du business à propos de tout : sexualité, mariage, procréation, santé, beauté, identité, connaissances, relations, idées… Nous ne savons plus très bien quand nous travaillons et quand nous ne travaillons pas. Nous serons constamment occupés à faire toutes sortes de business… Même les salariés deviendront des entrepreneurs individuels, gérant leur carrière comme celle d’une petite entreprise…, prompts à se former au sujet des nouveautés. La personne devient une entreprise… Il n’y a plus de « famille » ni de « nation » qui tienne. »

Tout devient marchandise, la vente de soi s’étend à tous les aspects de l’existence personnelle, l’argent devient le but de toutes les activités.

Comme le dit Jean-Marie Vincent, « l’emprise de la valeur n’a jamais été aussi forte ». Tout est mesuré en argent, mercantifié par lui. Il s’est soumis tous les espaces et toutes les activités dans lesquels l’autonomie de la production de soi était censée pouvoir s’épanouir : les sports, l’éducation, la recherche scientifique, la maternité, la création artistique, la politique. L’entreprise privée s’empare de l’espace public et des biens collectifs, vend les loisirs et la culture comme des marchandises, transforme en propriété privée les savoirs, les moyens d’accès aux connaissances et à l’information. Une poignée de groupes financiers cherche monopoliser les fréquences radio, la conception et la vente de cours universitaires. La victoire du capitalisme devient totale et précisément pour cela la résistance à l’emprise de la valeur devient de plus en plus éloquente, massive. Dix ans après l’effondrement des États qui s’en étaient réclamés, le communisme retrouve son inspiration anarcho-communiste originaire : abolition du travail abstrait, de la propriété privée des moyens de production, du pouvoir l’argent, du marché.

Tout cela serait dérisoire si l’anarcho-communisme n’avait déjà trouvé une traduction pratique et si cette pratique n’avait pour protagonistes ceux-là mêmes dont le « capital humain » est le plus précieux pour les entreprises : à savoir les informaticiens de haut niveau qui ont entrepris de casser le monopole de l’accès au savoir que Bill Gates était en train d’acquérir. Ils ont inventé et continuent de développer à cette fin les logiciels libres (principalement Linux, au code source ouvert) et commencent à développer le « réseau libre ». Leur philosophie de départ est que les connaissances reproductibles sont toujours le résultat d’une coopération à l’échelle de toute la société et d’échanges à l’échelle du monde entier. Elles doivent être traitées comme un bien commun de l’humanité, être librement accessibles à tous et partout. Chaque participant de la « communauté Linux » met ses talents et connaissances à la disposition des autres et peut disposer gratuitement de la totalité des savoirs et connaissances ainsi mis en commun. La force productive la plus importante pour « l’économie de l’immatériel » se trouve ainsi collectivisée, employée à combattre son appropriation privée et sa valorisation capitaliste.

Richard Barbrook voit là l’ébauche d’une économie anarcho-communiste du don, seule alternative à la domination du capitalisme monopoliste. D’autres voient surgir la possibilité d’une auto-organisation par les usagers/producteurs de la production et de l’échange de connaissances, de services, de biens culturels et, potentiellement, matériels, sans qu’il y ait besoin de passer par le marché et la forme valeur (le prix).

La production de soi tend ainsi à s’émanciper à son plus haut niveau technique et à se poser dans son autonomie comme sa propre fin combattant non plus seulement le monopole de Microsoft mais toute appropriation privée de connaissances, tout pouvoir sur des biens collectifs.

La chose était prévisible : quand le savoir (knowledge) devient la principale force productive et la production de soi la condition de sa mise en œuvre, tout ce qui touche à la production, à l’orientation, à la division du savoir devient un enjeu de pouvoir. La question de la propriété privée ou publique, de l’usage payant ou gratuit des moyens d’accès au savoir devient un enjeu du conflit central. Celui-ci, tout transcendant d’anciennes barrières de classe, définit de nouvelles formes, de nouveaux protagonistes et de nouveaux terrains de luttes sociales.

***

Voir aussi : « L’immatériel » d’André Gorz : notes de lecture pour Ecorev par  Yann Moulier Boutang – Site web de la revue Multitudes

Image de prévisualisation YouTube

Transmettre et bombarder

     D‘un certain point de vue, une idée, c’est l’extraction et la transmission d’une différence : « une unité d’information peut se définir comme une différence qui produit une autre différence. Une telle différence qui se déplace et subit des modifications successives dans un circuit constitue une idée élémentaire » - Vers une écologie de l’esprit, tome 1, Grégory Bateson, éditions du Seuil 1977.

Un affect, est la perception, sentiment ou expérience vécue d’une transition entre deux idées : « La joie est le passage de l’homme d’une moindre à une plus grande perfection. » [II, EIII]. C’est à dire que toute idée englobe un affect en ce qu’elle succède toujours à une autre idée. Si nous suivons Spinoza, les idées qu’on a impliquent et enveloppent des affects de joie ou de tristesse. La règle dans la Nature, c’est la perpétuelle rencontre des corps. Et nous ne cessons d’avoir des idées qui correspondent aux effets, aux affections que produisent ces corps sur le nôtre. L’esprit humain - attribut pensée - est donc idée du corps - attribut étendu. Nos idées sont alors dites adéquates lorsque nous sommes capables de composer un certain type de rapport avec le corps affectant, rapport caractérisé par la production d’un affect de joie qui augmente (transition) notre puissance ou persistance dans notre être. 

Le plus souvent au hasard des rencontres extérieures, nos sentiments oscillent ainsi entre joie et tristesse: « L’Amour est la joie accompagnée de l’idée d’une cause extérieure » [VI, EIII] -  » Le repentir est la tristesse qu’accompagne l’idée de quelque action que nous croyons avoir faite par un libre décret de l’esprit. » [XXVII, EIII]….

Inland Empire

De telles notions sont-elles utiles à celui qui chercherait à transmettre un savoir « écologique » ? C’est à dire un ensemble d’idées ayant la propriété de fonctionner entre elles de manière peut-être plus systémique que d’autres. Question, ce dernier point a-t-il des conséquences :

  • quantitatives, sur notre production d’idée au sens d’une identification plus poussée des différences perçues dans l’environnement, des rencontres possibles;

  • qualitatives, sur le caractère adéquat ou inadéquat des idées que nous pouvons en former;

  • enfin, sur le types d’affects que ces mêmes idées sont capables de produire en nous ?

En ce sens, il n’est peut-être pas inintéressant de s’intéresser à l’écologie particulière de cinéastes tels que David Lynch. On dit souvent d’un bon metteur en scène que ce dernier est capable de créer des mondes et de les transmettre. Autrement dit, nous donne accès à de nouvelles rencontres, sous forme d’idées et d’affects transmis par des supports conducteurs : des agencements, des dispositifs faits de sons, mouvements, lumières, couleurs…

Si nous suivons Spinoza, on peut dire que nos affects correspondent aux idées qu’on a. Et qu’à la limite, on ne « reconnaîtrait » quelque chose dans la Nature qu’à partir du moment où nous nous serions préalablement formés une idée de cette chose. Mais les choses nous rentrent dedans comme pour nous forcer à penser. Favoriser et accélérer les rencontres en nous bombardant, voilà peut-être un des objectifs du cinéaste, de tout passeur de points de vue :

http://www.dailymotion.com/video/gJryxuW8OzKa0kUAM

Tabac

http://www.dailymotion.com/video/47ZfOPgdOmH2je6zB

http://www.dailymotion.com/video/7HPnk8bwr0rRVipH0

http://www.dailymotion.com/video/4v2ZybhJSoH3bfgY6

Les diversités

« On ne remarque pas l’absence d’un inconnu. » Jérôme Lindon

« Human societies now make the choices concerning the allocation of lands, water and other resources which determine which of the diversity of life forms will continue to exist.” Timothy M. Swanson

«  Plus le sentiment de l’unité avec nos contemporains augmente, plus les hommes s’uniformisent, plus aussi ils ressentent sévèrement la moindre différence comme immorale. C’est ainsi que se forme nécessairement le sable humain : tous très semblables, très petits, très arrondis, très accommodants, très ennuyeux […] Un petit sentiment faible et obscur de bien-être médiocre uniformément répandu, une chinoiserie générale améliorée et poussée au bout – serait-ce là l’ultime image de l’humanité ? Inévitablement, si elle persévère dans les voies de la moralité antérieure. Il faut y réfléchir à fond : peut-être faudra-t-il que l’humanité tire un trait sous son passé, peut-être faudra-t-il appliquer à tout homme ce canon nouveau : soit différent de tous les autres et sois heureux que chacun diffère de son voisin.  » Nietzsche 187 La volonté de puissance II

D’après l’Unesco :

  • plus de 50% des 6000 langages présents dans le monde sont en danger d’extinction;
  • 96% des 6000 langages ne sont parlés que par 4% de la population mondiale;
  • 90% des langages ne sont pas représentés sur Internet;
  • en moyenne, un langage disparait toutes les deux semaines.

D’après le Millenium Ecosystem Assessment, environ 60 % des écosystèmes de la planète sont aujourd’hui détruits ou utilisés de manière non durable.

     Notre hypothèse est qu’il existe entre ces deux « compartiments » de la diversité, des échos ou résonances, symptômes communs d’un processus d’uniformisation global. S’il existe moins d’éléments biophysiques, alors il existe moins de possibilités d’agencements (symbiose, alliance, compétition), moins de possibilités de vie, d’où un appauvrissement de la production dans l’immatériel. Autrement dit, les agencements entre les différentes formes constituées déterminent des modes de pensés et de représentation possibles. Parmi ceux-ci émerge alors un mode de « domestification » dominant de la nature, mode qui va conditionner les modes d’existence, des degrés de coexistence et de couplage possibles, c’est à dire les conditions particulières de production de l’immatériel (organisation de la production artistique, artisanale…).

En ce sens, les équilibres écologiques nous renverraient donc aux conditions matérielles de production de l’immatériel. Une époque peut-être vue comme une combinaison de forces particulière (révélée, rencontrées, associées) constituant des corps, des formes singulières (l’homme se combinant aux forces du carbone, de l’atome, du fer…). Extraits de “Pourparlers”, Gilles Deleuze : « [...] C’est que les forces de l’homme ne suffisent pas à elles seules à constituer une forme dominante où l’homme peut se loger. II faut que les forces de l’homme (avoir un entendement, une volonté, une imagination, etc.) se combinent avec d’autres forces [...] La forme qui en découlera ne sera donc pas nécessairement une forme humaine, ce pourra être une forme animale dont l’homme sera seulement un avatar, une forme divine dont il sera le reflet, la forme d’un Dieu unique dont l’homme ne sera que la limitation (ainsi, au XVIIe siècle, l’entendement humain comme limitation d’un entendement infini) [...] C’est dire qu’une forme-Homme n’apparaît que dans des conditions très spéciales et précaires : c’est ce que Foucault analyse, dans Les mots et les choses, comme l’aventure du XIXe siècle, en fonction des nouvelles forces avec lesquelles celles de l’homme se combinent alors. Or tout le monde dit qu’aujourd’hui l’homme entre en rapport avec d’autres forces encore (le cosmos dans l’espace, les particules dans la matière, le silicium dans la machine…) : une nouvelle forme en naît, qui n’est déjà plus celle de l’homme […] »

A partir de là, on ne peut plus se satisfaire de penser isolément la seule écologie environnementale, ie conserver nos schémas de représentation anciens comme Guattari le constatait au début des années 90′:  » […] les formations politiques et les instances exécutives paraissent totalement incapables d’appréhender cette problématique dans l’ensemble de ses implications. Bien qu’ayant récemment amorcé une prise de conscience partielle des dangers les plus voyants qui menacent l’environnement naturel de nos sociétés, elles se contentent généralement d’aborder le domaine des nuisances industrielles et, cela, uniquement dans une perspective technocratique.  » Or la question écologique bouleverse les rapports de l’humain au non humain, de l’humain à l’humain. Ensemble de rapports sur lesquels il convient de changer notre perspective anthropocentrée, projeter notre cosmologie constituant le degré zéro de la pensée des rapports au non humain. Il est donc nécessaire d’articuler les différents « contextes » de l’existence (naturel, social, mental), dans la mesure où  il existe une écologie, comme une biodiversité, tant des espèces immatérielles (idée, œuvre d’art, mode d’existence, …) que matérielles (végétaux, animaux…).

La récente ratification de la convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel sous l’égide de l’UNESCO, faisant écho à la convention sur la biodiversité, semble être un pas important vers la reconnaissance des liens de production unissants les divers patrimoines vivants.

Convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel

     Constatant que « beaucoup d’éléments du patrimoine culturel immatériel sont mis en péril par la mondialisation, les politiques uniformisantes et le manque de moyens », la Convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel est rentrée en vigueur le 20 avril 2006. 

Complètant le dispositif normatif de l’UNESCO pour la préservation du patrimoine matériel, celle-ci vise à sauvegarder le patrimoine culturel immatériel (PCI), patrimoine vivant  »creuset de la diversité culturelle et sa préservation le garant de la créativité permanente de l’homme ». Sur le site dédié de l’Unesco on pourra lire les définitions et axes suivants :

 » [...] Concrètement, le PCI ainsi défini concerne :

  • les traditions et expressions orales, y compris la langue comme vecteur du patrimoine culturel immatériel ;
  • les arts du spectacle (comme la musique, la danse et le théâtre traditionnels) ;
  • les pratiques sociales, rituels et événements festifs ;
  • les connaissances et pratiques concernant la nature et l’univers ;
  • les savoir-faire liés à l’artisanat traditionnel.

En termes plus abstraits, le PCI concerne les pratiques, représentations, expressions, ainsi que les connaissances et savoir-faire que des communautés, les groupes et, le cas échéant, les individus reconnaissent comme faisant partie de leur patrimoine culturel.

Le PCI protégé par la Convention :

  • est transmis de génération en génération ;
  • est recréé en permanence par les communautés et les groupes, en fonction de leur milieu, de leur interaction avec la nature et de leur histoire ;
  • procure aux communautés et aux groupes un sentiment d’identité et de continuité ;
  • contribue à promouvoir le respect de la diversité culturelle et la créativité humaine ;
  • est conforme aux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme ;
  • est conforme aux exigences de respect mutuel entre les communautés et de développement durable.

Le PCI est à la fois traditionnel et vivant. Il est constamment recréé et transmis oralement dans la majorité des cas.

Le dépositaire de ce patrimoine est l’esprit humain, le corps humain étant le principal instrument de sa représentation ou – littéralement – de son incarnation. Les connaissances et le savoir-faire sont souvent partagés par une communauté et les manifestations du patrimoine culturel immatériel sont souvent des événements collectifs.

La Convention parle des communautés et des groupes qui sont les détenteurs des traditions, mais ne précise pas qui ils sont. Les experts gouvernementaux chargés de rédiger le projet de Convention ont insisté à plusieurs reprises sur le caractère ouvert de ces communautés, sur le fait qu’elles peuvent être dominantes ou non, qu’elles ne sont pas nécessairement liées à des territoires spécifiques et qu’une personne peut très bien appartenir à différentes communautés et changer de communauté. En établissant la Liste représentative, la Convention introduit l’idée de « représentativité ». « Représentatif » pourrait signifier, à la fois, représentatif de la créativité de l’homme, du patrimoine culturel des États, mais aussi du patrimoine culturel des communautés qui sont les détenteurs des traditions en question [...] « 

Voir le Préambule de la Convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel

Voir le site internet de la convention

1234



Secrétaire-Chsct-Crns |
Communication NonViolente -... |
ma vision des choses!!! |
Unblog.fr | Annuaire | Signaler un abus | Boîte à idées
| robert robertson
| Le VP Marie-Victorin