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La biodiversité : l’autre choc

     D’après le constat d’étape de l’office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques intitulé « la biodiversité : l’autre choc » : « le choc climatique dont nous commençons à sentir les effets va se doubler d’un choc biologique »

Concernant plus particulièrement l’état des écosystèmes aquatiques, ce dernier nous renvoie au récent  rapport de l’Académie des Sciences sur l’état des eaux continentales : « l’irrigation agricole est responsable de plus de 70 % des extractions et conduit, suivant les besoins et les milieux, à une concentration de pollutions, à une extinction des nappes et de leurs écosystèmes ou à une salinisation des eaux. Du fait de leur accroissement récent, qui s’additionne à des épisodes de sécheresse, ces prélèvements dépassent les capacités de résilience des écosystèmes aquatiques qui sont pourtant habitués aux variations du cycle hydrologique. »

Dans le cadre de notre approche générale des écosystèmes, notre question est alors : qu’est-ce qu’une capacité de résilience d’un écosystème ? En quoi cette notion est-elle liée à la biodiversité ?

La biodiversité : l'autre choc dans -> ACTUS image00127

De la biodiversité à la résilience écologique

      Dit simplement, la résilience écologique d’un écosystème est sa capacité à retrouver un fonctionnement et un développement « régulier » après avoir subi une perturbation importante. On parle ainsi de résilience d’un écosystème forestier pour décrire sa capacité à se reconstituer à la suite d’un incendie.

Nous avons vu précédemment qu’un écosystème était un système complexe dynamique. En ce sens, ce n’est pas un système stable, figé dans un état qui serait le seul état viable pour lui. Nous avons ainsi vu que plus le système est mature, plus il dispose d’alternatives ou de stratégies de croissance différenciées, plus les flux de matières et d’énergies peuvent opter pour des cheminements différents du fait de l’existence de redondances, d’accumulation d’information (relations symbiotiques). Or la biodiversité joue un rôle majeur dans les redondances et le stockage d’information. Plus d’espèces pouvant se substituer les unes aux autres sur la même fonction, plus espèces stockant plus de gênes et donc plus de possibilités ou potentialités de comportementales. De manière analogique, on pourrait dire que tout se passe un peu comme si la nature gérait un portefeuille d’actif, en répartissant les risques et en se préservant des portes de sortie.

Un écosystème évolue donc en permanence selon les fluctuations de son environnement, par à-coups sous l’effet de perturbations naturelles ou anthropiques. On peut même dire qu’il ne survit que grâce à ces perturbations, celles-ci étant un facteur de maintien de la biodiversité. En leur absence, le phénomène de compétition entre espèces peut en effet devenir prépondérant et permettre à l’une d’elles de prendre le dessus.

     Cependant l’écosystème peut perdre cette aptitude à retrouver un état d’équilibre, on dit alors qu’il perd sa capacité de résilience : lorsque la perturbation est trop importante, lors de certaines pollutions graves par exemple, et que les seuils dits d’irréversibilité sont dépassés. Concernant les écosystèmes aquatiques, leur capacité de résilience dépend en grande partie de leur la capacité d’épuration. Celle-ci est limitée la vitesse du processus de dégradation des matières organiques effectué par les bactéries aérobies. Vitesse dépendant de la teneur en oxygène du milieu aquatique et de la température de l’eau influençant l’activité bactériologique. Lorsque ce cumul naturel de matière organique devient trop important, le milieu n’est plus à même de réaliser ainsi son autoépuration et l’équilibre naturel est rompu. La concentration des nitrates d’origines agricole est une parfaite illustration de ce cas. On parle alors d’eutrophisation lorsque le milieu reçoit trop de matières nutritives assimilables par les algues et que celles-ci prolifèrent au détriment de l’équilibre général des espèces.

Transfert d'énergie dans l'écosystème sol

D’autres modifications irréversibles des écosystèmes aquatiques peuvent également survenir lorsque trop de substances toxiques pour les espèces vivantes sont introduites dans ces écosystèmes, provoquant une raréfaction, voire une disparition de certaines espèces fragiles déséquilibrant ainsi la chaîne alimentaire. De même, l’introduction, intentionnelle ou non, de nouvelles espèces peut aussi être à l’origine de profondes modifications de l’écosystème.

En dix ans, plus de 150 pays ont ratifié la Convention sur la biodiversité.  Mais le fait que certains pays comme les Etats-Unis s'en soient abstenu affaiblit considérablement sa portée. : (en orange, les pays qui n'ont pas ratifié la Convention sur la biodiversité signée à Rio en 1992)

En vert les pays adhérents à la convention internationale sur la biodiversité

Les autres « bénéfices » et « services » issus de la biodiversité 

     Si biodiversité et capacité de résilience des écosystèmes sont intimement liées, les « bénéfices » de la biodiversité sont également à rechercher par ailleurs :

  • En termes de santé le rapport précise : « des expériences convergentes effectuées au Brésil et aux Etats-Unis prouvent que la biodiversité est un facteur important d’inhibition de nombreuses maladies (leishmaniose, maladie de Chagas, maladie de Lyme, etc.). A l’opposé, la destruction des milieux est un facteur favorisant de propagation de ces maladies […] »

  • En termes d’agriculture : « [...] près de 20 000 espèces apparentées aux abeilles contribuent à la survie et à l’évolution de plus de 80 % des espèces de fleurs à travers la pollinisation [...] des recherches menées en Europe et aux Etats-Unis sur les herbacées révèlent une corrélation positive entre le nombre d’espèces plantées et la récolte de biomasse à l’hectare […] ceci s’explique, notamment, par le fait qu’un mélange d’espèces permet de combiner celles d’entre elles qui fixent le mieux l’azote et celles d’entre elles qui injectent le plus de carbone dans le sol. »

  • En termes de résistance : « des expériences […] faites aux Etats-Unis et au Burkina Fasso montrent que l’accroissement de la biodiversité permet de mieux résister à la sécheresse […] Des études de l’INRA ont mis en évidence que l’insertion de feuillus dans des plantations industrielles de conifères faisait baisser l’impact des ravageurs (probablement parce que ces feuillus hébergent les prédateurs de ces ravageurs). »

  • En termes de services hydrologiques : « les zones humides – dont la moitié ont disparu en France depuis cinquante ans –, les forêts, les talus jouent un rôle capital dans la distribution hydrologique. Et principalement sur deux points, la filtration et le cycle de rétention/élimination lente de l’eau. Par exemple, les zones humides ont une capacité précieuse à éliminer l’azote des nitrates provenant des bassins versants suivant un processus complexe de rétention puis d’élimination par des micro-organismes du sol. »

     Si le rapport insiste sur l’importance des différents services rendus par la biodiversité, ce dernier n’écarte cependant pas l’éternel problème de la mesure de ceux-ci dans notre champ économique classique (calcul des externalités positives) : « le chiffrage des biens et services fournis par la biodiversité a été calibré autour de 33 000 milliards de dollars en 1997, soit un chiffre analogue à celui du PIB mondial d’aujourd’hui. D’autres estimations, effectuées a contrario sont plus modestes, estimant les coûts non marchands – environnementaux et sanitaires – d’une forte dégradation de la biodiversité à 11 points du PIB ». En effet : « les services de biodiversité sont utilisés par le marché mais ne répondent pas aux critères de ce marché :

  • temps long de constitution contre temps court du marché,

  • utilité collective pas toujours clairement appropriable par des acteurs individuels,

  • absence actuelle apparente de rareté. 

[…] une évolution est donc nécessaire pour donner aux services de la biodiversité une assiette économique, et dans un premier temps sur deux points : l’agriculture et l’eau. »

Les forces à l’oeuvre

     Evolution d’autant plus nécessaires que les forces à l’œuvre pesant sur la biodiversité sont structurellement extrêmement lourdes, pouvant se regrouper sous les deux chapeaux suivants : les variations climatiques et la pression démographiques (besoins agricoles, urbanisation et déforestation).

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Les changements climatiques

     « Sur des échelles de temps longues, le changement climatique isole les espèces, leur permettant de diverger, et est donc plutôt favorable à l’enrichissement de la biodiversité (pompe à biodiversité). Cependant, à l’échelle de quelques décennies, une évolution climatique brutale n’a surement pas les mêmes effets sur les capacités d’adaptation des écosystèmes, sur les temps de réaction des écosystèmes au changement. Les possibilités d’évolution des organismes à cycle rapide de reproduction […] (i.e. des écosystèmes jeunes) ne sont pas les mêmes que pour les massifs forestiers dont la durée de réaction relève de plusieurs décennies, voire de plusieurs siècles […]  Une étude européenne – assise sur des hypothèses basses de réchauffement – montre qu’au moins 19 % des plantes européennes devront migrer d’un km/an pour survivre d’ici 2050 – ce qui correspond à la vitesse de repeuplement du chêne après la dernière glaciation. »

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Les conséquences de la pression démographique

     Déforestation : « une expérience menée sur plus de vingt ans suivant la même méthodologie en Guyane et au Brésil et les modélisations de cette expérience montrent qu’en cas de coupe sévère, les essences se reconstituent sur un siècle et les écosystèmes associés sur plus de deux siècles. On rappellera qu’un hectare de forêt stocke, suivant les essences, de 7 à 10 tonnes de CO2 et que la déforestation annuelle aboutit à l’émission de 2 GT de CO2. »

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     Sur les besoin en matière première : « l’extension dans les dernières années des plantations de palmiers à huile destinés à des biocarburants devrait nous alerter, d’autant plus qu’elles sont situées dans des zones de haute concentration de biodiversité (Asie du Sud-Est, Afrique équatoriale). Pour le seul territoire français, on rappellera que pour atteindre l’objectif de 5,75 % de biocarburant dans l’essence ou le diesel, il serait nécessaire de mobiliser la totalité des jachères. Même si la forêt française bénéficie d’accrus forestiers (70 000 hectares/an), et que sa surface est double de celle qu’elle occupait en 1800, elle pourrait être, à terme, menacée par les besoins des biocarburants. »

Par ailleurs inutile de revenir plus en détail sur les besoins concurrents en nourriture (donc en eau et agriculture intensive !) à venir…dans un monde de plus de neuf milliards d’individus d’ici à 2050 !

Quelques chiffres du rapport

  • « la perte de biodiversité des espèces dans les milieux humides et les eaux continentales a atteint 37 % entre 1970 et 2000 »

  • « la réduction des forêts tropicales sèches (Madagascar, forêt atlantique brésilienne, dont il ne reste plus que 7 à 10 %, se poursuit), »

  • « on observe une poursuite de la déforestation des forêts tropicales humides (Afrique, Asie, Amérique du Sud) à un rythme de 13 millions d’hectares par an, alors que ce milieu héberge 50 % de la flore mondiale. »

  • « en trente ans, la Beauce a perdu plus de 30 % des composés organiques de son sol. »

  • « en Allemagne, par exemple, 100 hectares de milieux naturels sont détruits chaque jour à des fins de construction ou d’installation d’infrastructures ;

  • «  au Brésil, la construction d’une route en milieu forestier, détruit la biodiversité de ce milieu jusqu’à 50 km de part et d’autre de cette route ;

  • «  Pour ne s’intéresser qu’au cas de la France, le nombre d’espèces invasives dénombrées a augmenté de 50 % en quatre ans (104 en 2002, 153 en 2006). »

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Valeurs de la biodiversité globale: en rouge une biodiversité élevée, en bleu une biodiversité réduite.
Source:
Biogeography & Conservation Lab, The Natural History Museum, London, UK.

Notions de base sur les pollutions aquatiques

Notions de base sur les pollutions aquatiques dans -> NOTIONS D'ECOLOGIE image0014

     A partir de quelles variables ou « indicateurs » fixe-t-on les valeurs limites de rejets des eaux usées (eaux domestiques, effluents industriels et agricoles…) dans les milieux aquatiques ? Les rejets ou effluents liquides sont principalement caractérisés à partir des paramètres suivants.

Tout d’abord, leur DCO ou demande chimique en oxygène. C’est la quantité d’oxygène nécessaire aux oxydants chimiques forts afin de dégrader (oxyder) les substances organiques et minérales contenus dans les rejets. Elle permet ainsi d’évaluer globalement la charge polluante totale des eaux usées.

Leur DBO, ou demande biologique en oxygène. Celle-ci correspond à la quantité de d’oxygène nécessaire aux micro-organismes aérobies de l’eau pour oxyder les matières organiques, dissoutes ou en suspension dans l’eau. Ce paramètre constitue un bon indicateur de la teneur en matières organiques biodégradables des rejets.

Au final, il convient d’évaluer l’ensemble de ses demandes « étrangère » en oxygène qui une fois rejetées dans le milieu vont constituer des besoins additionnels venant concurrencer ceux de la faune et de la flore aquatique, à offre constante. Ainsi un rapport DCO / DBO relativement élevé indique la présence d’une importante quantité de matières non biodégradables. Celles-ci seront lentement dégrader par le dioxygène (oxydant faible) dissous dans l’eau, constituant ainsi une demande à long terme sans contrepartie ou presque.

     La température. Les conditions d’équilibres du milieu aquatique requièrent que la température des rejets aqueux n’excède pas les 30 °C. En effet, l’oxygénation de l’eau (offre en oxygène) se fait, soit à travers la photosynthèse des végétaux aquatiques (abortion de CO2 et rejet d’O2), soit par la dissolution de l’oxygène atmosphérique. Ce dernier processus étant favorisé à température moyenne.

Par ailleurs une hausse de la température est susceptible d’accélérer le processus dit d’eutrophisation. Dans des eaux peu courantes, ce phénomène se caractérise par une prolifération des algues de surface. Par suite, cette accumulation empêche la lumière de parvenir aux couches inférieures, bloquant ainsi leur photosynthèse et précipitant une chute de l’offre en oxygène etc etc…

L’eutrophisation est principalement favorisée par la surabondance de nutriments tels que les nitrates et phosphates (les principaux rejets agricoles). Cependant une hausse des températures favorisant l’efficacité photosynthétique des algues, celle-ci accélère encore le phénomène. Une température trop élevée est donc possiblement une double cause d’accroissement de la demande en oxygène dans les milieux aquatique.

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Cartes des  » zones sensibles à l’eutrophisation  » de 1987 et 1994 d’après source INRA

     Les MES, ou matières en suspension dans l’eau. Leur abondance favorise la réduction de la luminosité (turbidité de l’eau). A une certaine concentration, on assiste alors à une baisse de l’activité photosynthétique précipitant la chute de l’offre en oxygène dissous et entrainant en retour une réduction de la production biologique du milieu. Par ailleurs les effets mécaniques des matières en suspension sont également importants (colmatage des branchies, sédimentation, décantation etc…).

L’un des facteurs limitant de la faune et de la flore des milieux aquatiques est donc bien la disponibilité en oxygène dissous dans l’eau (respiration, dégradation des matières…). Chacun des écosystèmes correspond donc, entre autres facteurs, à un certain type de partage de cette quantité d’oxygène, résultat de la compétition que se livre les espèces pour sa captation.

Dès lors tout apport extérieur visant à accroitre la demande en oxygène (pollution industrielle et domestique), à favoriser un type d’organisme ou une espèce au profit d’une autre (pollution agricoles), est susceptible de bouleverser profondément les équilibres dans les échanges de flux et matière, cela de sorte à très rapidement remettre en cause  la structure biologique du milieu.

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Processus d’eutrophisation des milieux aquatiques

L’écosystème

Notion de base sur les écosystèmes

     Un écosystème est un complexe dynamique composé de communautés de plantes, d’animaux et de microorganismes et de la nature inerte, sujet à des interactions en tant qu’entité fonctionnelle. Les écosystèmes varient énormément en taille, en durée de vie et en fonction. Un bassin temporaire dans le creux d’un arbre et un bassin océanique sont tous deux des exemples d’écosystèmes. Définition d’après groupe de travail sur le cadre conceptuel de l’Évaluation des écosystèmes pour le Millénaire.

    Les communautés de plantes, d’animaux et de microorganismes sont autrement dénommés biocénose. Celle-ci se caractérise par une chaîne alimentaire (ou trophique), allant du producteur primaire (le végétal fabriquant de la matière organique à partir de l’énergie lumineuse, du CO2 de l’air et des ions minéraux du sol), aux divers consommateurs (de l’herbivore au super prédateur), en passant par les divers décomposeurs en charge d’assurer le retour de la matière organique sous forme minérale dans le sol. La nature inerte est également connue sous l’appellation de biotope. Celle-ci regroupe l’ensemble des caractères géographiques et physico-chimiques de l’écosystème (climat, nature du sol, relief, eau…). Pour analyser et décrire un écosystème donné, on utilise la notion de facteur écologique. Est dit facteur écologique, tout élément du milieu extérieur susceptible d’affecter le développement des êtres vivants.

A ce titre, on distingue plusieurs types de facteurs écologiques:

  • les facteurs biotiques, liés aux composantes biologiques (biocénose), interactions du vivant sur le vivant, intraspécifique (au sein de la même espèce) et interspécifique (entre deux espèces différentes ou plus) ;

  • les facteurs abiotiques, liés aux conditions physico-chimiques du milieu (biotope).

Un facteur écologique joue le rôle de facteur limitant lorsqu’il conditionne les possibilités de succès d’un organisme dans ses tentatives de colonisation d’un milieu. Ce facteur peut être limitant tant par son absence que par son excès. Chaque être vivants présente donc vis-à-vis des facteurs écologiques des limites de tolérances entres lesquelles se situe la zone de tolérance et l’optimum écologique. Ainsi la valence écologique d’une espèce représente sa capacité à supporter les variations plus ou moins grandes d’un facteur écologique.

Les facteurs écologiques peuvent donc agir de différentes façons sur la biocénose. Ils vont notamment intervenir sur :

  • l’aire de répartition biogéographique des espèces ;

  • la densité des populations ;

  • l’apparition de modifications (comportement, métabolisme) adaptatives.

Ainsi lorsque la présence de telle ou telle espèce nous renseigne sur les caractéristiques de son milieu, celle-ci sera appelée bio-indicateur (coquelicot sur sol calcaire ensoleillé, bruyère en sous-bois sur sol acide…). Les caractéristiques propres (un biotope impliquant telle type de biocénose et inversement) à chaque écosystème permettent un zonage tel que celui reproduit sur la page suivante à l’échelle des écorégions. Dès lors pour chaque type écosystème, il est possible d’associer à ce zonage : un mode de fonctionnement, des biens et des services produits, des risques et menaces connus….

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Source : Millenium Ecosystem Assessment

    Les êtres humains, en tant que partie intégrante[1] des écosystèmes, tirent bénéfices des « biens et services » produit par le fonctionnement des  écosystèmes. Les services produits par les écosystèmes comprennent les services de prélèvement tels que celui de la nourriture et de l’eau; les services de régulation comme la régulation des inondations, de la sécheresse, de la dégradation des sols, et des maladies ; les services d’auto-entretien tels que la formation des sols, le développement du cycle nutritionnel; enfin les services culturels tels que les bénéfices d’agrément, les bénéfices d’ordre esthétiques et les autres avantages non matériels. Ces différents « services » résultent du fonctionnement des écosystèmes, c’est-à-dire de l’ensemble des réactions biogéochimiques[2] affectant la biosphère et se caractérisant par des échanges permanant de matière et d’énergie le long des différents cycles (eau, carbone, azote…) et chaines alimentaires.

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Du fait des différents cycles (ici celui de l’eau), tous les écosystèmes sont fortement ouverts les uns aux autres. Il existe cependant des frontières plus ou moins poreuses dénommées écotones. La lisière d’un bois le séparant d’une parcelle agricole, une haie coupe vent en sont de bons exemples. Comme toute frontière ces zones sont d’importants lieux de transit et d’échange, connaissant une diversité biologique accrue du fait du mélange des qualités des divers écosystèmes la composant. L’un des écotones les plus connu est la zone humide, zone de transition entre les milieux terrestres et aquatiques. Celles-ci constituent un vaste réseau interconnecté d’échange incluant les lacs, rivières, marais et les régions côtières. Dans le monde, on estime à minima qu’elle couvre une surface sensiblement équivalente à 25 fois le territoire français, cela bien que durant le 20ème siècle, plus de 50% des zones humides[3] d’Amérique du Nord, d’Europe et Australie aient été détruites du fait de l’urbanisation, des infrastructures de transport, du surpompage…

Services fournis par les zones humides

Approvisionnement

Nourriture Poisson, fruits, céréales
Eau douce Réservoir
Fibre et combustible Bois énergie
Biochimie Médicament
Biodiversité Matériel génétique

Régulation

Climat Régulation température et précipitations
Cycle de l’eau Recharge des nappes souterraines
Epuration de l’eau Filtration des polluants
Régulation de l’érosion Rétention des sols
Régulation des risques naturels Contrôle des inondations
Pollinisation Habitat

Support

Formation des sols Rétention des sols
Cycle des nutriments Stockage, recyclage des nutriments

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Les différents services fournis selon le type d’écosystème

Apports méthodologique de l’approche écosystémique

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     Au niveau d’un cadrage initial, il est possible de découper un territoire en sous unités fonctionnelle (écozones) et d’ainsi utiliser le concept d’écosystème comme grille de lecture structurante des évaluations.

Les conditions de vie et de production d’une collectivité dépendent toujours directement ou indirectement des services fournis par les écosystèmes locaux (eau, nourriture, bois, fibre, matériel génétique…). Aujourd’hui, le développement des transports à grande vitesse associés à une énergie peu chère, rendent possible la consommation de certains biens et services produits par des écosystèmes distants, d’où la notion de ville « hors-sol » allant capter son eau parfois à plusieurs milliers de kilomètre. Cependant la question de la durabilité et du coût global de tels systèmes d’approvisionnement lointains demeure en suspend.

En effet, les projections démographiques et la nécessaire poursuite de la croissance économique mondiale[4] vont encore accentuer la consommation de biens et services pour une offre ou capacité environnementale au mieux constante, à priori déjà saturée. A titre d’exemple les études prospectives menées dans le cadre du « Millenium Ecosystem Assessment » nous enseignent que la demande en nourriture (donc en service de prélèvement, d’auto-entretient…) pourrait croître de 70 à 80% sur les 50 prochaines années. Avec quels écosystèmes ?

Cette demande croissante engendrera nécessairement des difficultés plus grandes pour les collectivités au niveau de l’accès aux ressources et augmentera pour tous le coût de la sécurisation des approvisionnements, d’où le concept de vulnérabilité territoriale.

Vulnérabilité territoriale et évaluation

      Du fait de l’interconnexion de tous les écosystèmes, se croise sur un même territoire des échelles de temps hétérogènes. L’environnement global (climat, grands cycles biogéochimiques) qui évolue sur la longue période, l’environnement local (production de biomasse) sur la moyenne, les collectivités humaines sur la courte période. L’exemple suivant nous montre comment une déforestation exercée même à longue distance d’un territoire, peut par effets successifs, avoir un impact non négligeable sur l’environnement local ce dernier.

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Que dire également du changement climatique, véritable producteur d’incertitudes affectant l’environnement global. Ces temporalités et frontières mouvantes au sein des territoires renforcent le besoin prospectif des analyses.

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Pour tenir compte de ces dépendances et interconnections multiples, des temporalités et distances de contamination variables, l’approche écosystèmique des territoires parait la plus pertinente.

Conclusion et synthèse

    Retenons donc qu’il existe des relations directes et indirectes entre vulnérabilité de l’environnement, au sens de l’ensemble des écosystèmes présent sur un territoire, et vulnérabilité  des collectivités humaines qui y sont inclus et vivent pleinement, sur un territoire, des biens et services procurés par ses écosystèmes.

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Source : Millenium Ecosystem Assessment

    Illustrant cette approche, le Global Environmental Change and Human Security Project a cartographié les régions soumises à un fort stress écologique associé à une vulnérabilité du bien-être des populations. Pour ce faire a été développé un index, ‘‘index of vulnerability’’, résultat de l’agrégation de 12 indicateurs et dont la matrice d’analyse est représentée ci-dessous.

Indicateurs composants l’index de vulnérabilité

  • Food import dependency ratio,

  • Water scarcity,

  • Energy imports as percentage of consumption,

  • Access to safe water,

  • Expenditures on defense versus health and education,

  • Human freedoms,

  • Urban population growth,

  • Child mortality,

  • Maternal mortality,

  • Income per capita,

  • Degree of democratization,

  • Fertility rates.

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Source : International Human Dimensions Programme on Global Environmental Change



[1] L’être humain a donc lui aussi une valence écologique, celle-ci est artificiellement largement étendue par la maîtrise de l’énergie et les outils techniques.

[2] Les interactions existantes entre les différents êtres vivants (facteur biotique) vont de pair avec un mixage permanent avec des substances organiques et minérales (facteur abiotique), absorbés par les organismes vivants pour leur croissance et reproduction, puis rejetés sous forme de déchets. Ce recyclage permanent d’éléments (en particulier carbone, oxygène, azote et l’eau) est appelé cycle biogéochimique.

[3] 90% en Californie, 67% en France…

[4] Infrastructure de transport, urbanisation, consommation de matières premières…

Suivez les abeilles…

     En 2005, les ruches des campagnes ont subi 33 % de perte de population contre 6 % seulement en ville. Victime des pesticides, de l’assèchement des zones humides et de la modification des écosystèmes, l’abeille disparaît des campagnes. Depuis 1993-1994, les pertes sont estimées de 20% à 45% selon les régions. Or l’abeille constitue dans les écosystèmes une relation quasi unique entre l’animal et le végétal. Pas d’abeilles = pas de pollinisation = disparition de certaines espèces végétales = disparition de certaines espèces animales … Ce qu’Einstein traduisait de manière polémique par : « si l’abeille venait à disparaître, l’homme n’aurait plus que quelques années à vivre ». Plus de 80% des espèces végétales sont pollinisées par les abeilles. 

Suivez les abeilles... dans -> ACTUS abeille2

     Les abeilles et autres oiseaux sembleraient donc avoir déjà compris une chose importante. Tout du moins une chose que nous autres humains ne devinons pas clairement comme nous en restons le plus souvent à une vision symbolique et confuse de la « nature »: plus ce que nous voyons est vert et plus c’est propre. Or entre des campagnes de plus en plus polluées et des villes dont les ressources financières permettent de réduire les pollutions, tout en favorisant leurs transferts vers les campagnes, une telle vision devient de plus en plus erronée.

Aujourd’hui, pesticides, métaux, hormones diverses et antibiotiques présents dans nos eaux usées viennent s’accumuler dans les nappes phréatiques de sorte que nous créons le parfait bouillons de culture de nos maladies de demain. Or si les divers groupements en charge de la potabilisation des eaux des principales agglomérations ont sans doute les capacités (techniques, humaines et financières) de réduire les risques sanitaires associés, il n’en n’est pas du tout de même au niveau des petits groupements ruraux. A terme, c’est donc à une véritable fracture territoriale qu’il faut s’attendre : une eau de plus en plus « sécurisée » en ville, une eau de plus en plus « fragilisée » dans les campagnes. Pour les villes, après avoir exploité les ressources naturelles de campagnes de plus en plus distantes (tant du point de vue qualitatif que quantitatif), celles-ci pourraient se voir  »noyées » en retour par un exode rural (pollution humaine de type surpopulation) du fait de l’apparition de zones grises un peu partout sur les territoires.

abeille dans -> NOTIONS D'ECOLOGIE

     Les voitures circulent certainement dans les villes, mais les NOx émis par les échappements sont transférés dans les campagnes voisines sous l’effet des vents. Aujourd’hui les pollutions à l’ozone, les dépassement de seuils concernent l’ensemble des territoires indépendamment de leurs usages. Par ailleurs, les industries les plus polluantes ont été petit à petit transférées des centres vers les périphéries éloignées des villes. Des agglomérations où les progrès réalisés dans les modes de chauffage urbain ont réduit bon nombre des pollutions (SO2, CO). Au final la tendance actuelle est assez claire, des villes de plus en plus consommatrices (énergie, matière) mais de moins en moins polluées, des campagnes de plus en plus exploitées et de plus en plus polluées.

En 1950, environ 750 millions de personnes vivaient dans les villes. En 2000, ce chiffre s’était élevé à 2,9 milliards. Les Nations unies prévoient qu’en 2050 plus des deux tiers d’entre nous vivront dans des villes, soit environ 6 milliards d’individus. Une telle concentration n’est pas tenable au regard des transferts à mettre en oeuvre pour l’alimenter… sauf à penser que ces villes hors sol constitueront les inévitables super arches de Noé de demain.

Un atlas du changement environnemental (UNEP-Google Maps)

China

Urbanisation de la région de Shenzhen : http://na.unep.net/digital_atlas2/webatlas.php?id=41

Le Programme des nations unis pour l’environnement, en association avec les éditeurs du logiciel Google Earth, propose une cartographie comparée et commentée des différentes zones du monde ayant connu, sur les 20 ou 30 dernières années, les plus grands changements dans l’occupation des sols (urbanisation, déforestation, désertification…).
Voir en ligne : http://na.unep.net/digital_atlas2/google.php

US

Urbanisation de la région aride de Las Vegas : http://na.unep.net/digital_atlas2/webatlas.php?id=83

Annuaire écologie

L’ouverture du GIEC au temps présent ?

     Les experts du GIEC semblent placer au premier rang des conséquences du changement climatique, les difficultés d’approvisionnement en eau et la problématique de la biodiversité.

Bien qu’il ne soit pas nécessaire d’anticiper les conséquences futures des variations climatiques pour constater dès aujourd’hui les effets de pressions anthropiques excessives sur la ressource en eau et la biodiversité, ce faisant le GIEC ouvre (enfin ?) une voie de dégagement à la mono-communication des calculs climatiques.

Si le changement climatique, entendu au singulier, est un formidable producteur d’incertitude dans l’équation générale drivant les aménagements humains, il n’en demeure pas moins en l’état des connaissances une force globale et abstraite capable d’influer sur les variables réelles que sont l’accès à la ressource en eau, les stocks de la « banque mondiale » génétique, etc. 

Or la vulnérabilité présente de ces variables est encore assez largement indépendante des variations climatiques futures. Et comme ces variables sont porteuses en elles-mêmes d’un potentiel d’atténuation de ces variations, elles en sont donc tout autant des causes que des conséquences.

     La question est donc : quel seront les « états » (qualitatif et quantitatif) futurs des ressources en eau et de la biodiversité ? États à partir desquels les variations climatiques s’exprimeront plus ou moins violement. Il convient ainsi et dès à présent d’apprécier au mieux leurs états actuels, l’ensemble des forces à l’œuvre. Voir à ce titre les remarquables travaux du Millenium Ecosystem Assessment.

D’un point de vue méthodologique, notons que si le GIEC partait de l’hypothèse d’un risque global pour en déduire des conséquences à analyser localement, l’approche du Millenium Ecosystem Assessment, bien que complémentaire, faisait le pari inverse. A savoir qu’à partir de l’observation de la vulnérabilité locale des différents écosystèmes, elle en induit une notion de risque global, sans avoir à raisonner en termes de conséquences, chose bien difficile dans des systèmes ou tout est lié et interagi dans le temps comme l’espace.

Eau et biodiversité ne sont donc pas des conséquences uniquement dérivées de la « question climatique », elles sont des tampons vulnérables, à conjuguer au présent à mesure que leurs états participeront à renforcer ou diminuer les impacts des variations climatiques à venir.

     Le tableau suivant s’appuie sur les données parues dans le monde du 05/04/2007 s’appuyant sur un rapport du WWF « Les 10 plus grands fleuves en danger » (PDF, En). Ici pas besoin de CO2, de courbes et de calculs corrélatifs pour s’expliquer. Pour qu’un hydrosystème fonctionne, il demande une quantité d’eau minimum pour lui-même afin d’éviter les ruptures de cycle entrainant salinisation, eutrophisation, espèces envahissantes, etc. Une quantité d’eau dont il est précisément privé par les dérivations successives (barrages, captages canalisations, endiguements, etc.) Autrement dit, du fait d’un mauvais partage de la ressource en eau entre besoins humain et non-humains.

Quantité et qualité sont bien souvent les deux faces d’un même problème, tout du moins dans le sens suivant : une diminution de la quantité entraine de facto une plus grande concentration des polluants. Ainsi, globalement :

  • dans les régions agricoles les prélèvements excessif afin d’irrigation altèrent le débit des cours d’eau, concentrant et restituant des pollutions organiques (nitrates) et chimiques (pesticides) en retour ;
  • dans les régions urbaine les prélèvements excessif afin domestiques altèrent le débit des cours d’eau, concentrant et restituant des pollutions organiques (bactériales) et chimiques (micropolluants) en retour ;
  • dans les régions industrielles les prélèvements excessifs afin des processus de production altèrent le débit des cours d’eau, concentrant et restituant principalement des pollutions chimiques (métaux lourd) ou thermique (eaux de refroidissement) en retour.

L’ouverture du GIEC au temps présent ? dans -> ACTUS image0011

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