Archive pour la Catégorie 'Konrad Lorentz'

Fragments d’éthologie

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Source audio d’après conférence d’Élisabeth de Fontenay ENS :   »De l’animal à l’humain »

1854 Isidore Geoffroy Saint-Hilaire utilise pour la première fois le terme « éthologie » dans son sens actuel (étude comparative du comportement animal) pour désigner les descriptions des mœurs des animaux telles qu’elles ont été faites par Aristote, Buffon, Réaumur, G. Leroy ou Lamarck.
 
1859 Dans L’Origine des espèces au moyen de la sélection naturelle, ou la Préservation des races favorisées dans la lutte pour la vie (The Origin of Species by Means of Natural Selection, or the Preservation of Favoured Races in the Struggle for Life), Charles Robert Darwin introduit deux concepts clés de l’éthologie, la survie du plus apte et la sélection sexuelle, mécanismes sur lesquels reposent l’origine des comportements et leur rôle dans l’évolution. 
 
1884 Dans L’Évolution mentale chez les animaux (Mental Evolution in Animals), George John Romanes développe une psychologie comparative qui ouvrira sur le behaviorisme - c’est-à-dire la définition des lois associant stimulus et réponses (de John B. Watson, 1913, à Burrhus Frederic Skinner, 1938) - et sur l’étude des comportements intentionnels (Wolfgang Koehler, 1927 ; Edward C. Tolman, 1932).
 
Vers 1900 Construction du concept biologique d’instinct, rigide et héréditaire, à travers l’œuvre du Français Jean-Henri Fabre (1879-1914), et celle des Américains William Morton Wheeler (1902-1905), Wallace Craig (1918) et William McDougall (1923) qui font suite aux travaux de Douglas Spalding (1873) et de Charles Otis Whitman (1880).
 
1909 Jakob von Uexküll fonde le concept d’univers subjectif, propre à chaque espèce : l’Umwelt, qui est partagé en mondes d’actions et de perceptions reliés par un monde intérieur. Ce concept sera largement exploré par l’éthologie classique.
 
1910 Oskar Heinroth, à la suite de Charles Otis Whitman, utilise les similitudes et les différences dans les comportements instinctifs spécifiques homologues de diverses espèces pour reconstruire leur taxinomie (étho-taxinomie).
 
1911 Edward Lee Thorndike, dans la deuxième édition de L’Intelligence animale (Animal Intelligence), établit les lois provisoires du comportement acquis et de l’apprentissage (loi de l’effet). Ivan Petrovitch Pavlov (conditionnement classique) est traduit en anglais en 1925, et les travaux de Karl Spencer Lashley (généralisation) et de Burrhus Frederic Skinner (conditionnement opérant) datent des années 1930.
 
1927 Dans La Vie des abeilles (Aus dem Leben der Bienen), Karl von Frisch expose ses découvertes sur la capacité de ces insectes à communiquer par les danses, à apprendre des odeurs et des couleurs (dont l’ultraviolet), à s’orienter à distance et à percevoir la lumière polarisée.
 
1930-1940 Naissance de l’éthologie, dite classique ou objectiviste, qui est définie comme l’étude comparative du comportement animal. Elle est fondée sur les travaux de Konrad Lorenz et de Nikolaas Tinbergen effectués sur les oiseaux. 
 
1951 Nikolaas Tinbergen publie L’Étude de l’instinct (The Study of Instinct) qui rassemble toutes les connaissances établies par l’éthologie objectiviste, généralisant le concept d’instinct aux comportements instinctifs complexes et proposant des hypothèses sur leur organisation neurophysiologique.
 
1966 Robert A. Hinde publie un ouvrage encyclopédique, Comportement animal : une synthèse de l’éthologie et de la psychologie comparative (Animal Behaviour. A Synthesis of Ethology and Comparative Psychology), qui donne l’état des avancées dans ce domaine, en réconciliant les apports de la psychologie expérimentale et ceux de l’éthologie objectiviste.
 
1973 Le prix Nobel de physiologie ou médecine est décerné conjointement à Konrad Lorenz, Nikolaas Tinbergen et Karl von Frisch pour leurs travaux en éthologie.
 
1975 Dans Sociobiologie (Sociobiology), Edward O. Wilson propose une théorie des sociétés, structures construites par l’évolution pour optimiser le succès reproducteur des génotypes des individus qui les composent. Il prédit l’éclatement de l’éthologie en sociobiologie et neurosciences.
 
1976 Sur les racines posées par Graham Hoyle en 1970 et selon la prédiction d’Edward O. Wilson, Jörg-Peter Ewert publie Neuroéthologie. À la suite des travaux d’Edward C. Tolman (1948), Donald R. Griffin (1976), David S. Olton (1978) et Charles R. Gallistel (1992) développent les bases d’une éthologie cognitive très vivante aujourd’hui.
 
1978 Sur les principes de la sociobiologie et de l’intelligence artificielle, John R. Krebs et Nicholas B. Davies publient Écologie comportementale (Comportemental Ecology). Le comportement consiste en des stratégies (ensemble de règles de décision) optimisées par l’évolution selon leur incidence sur le succès reproducteur.
 
1987 Colloque sur L’Auto-organisation : de la physique au politique, étape fondatrice vers une généralisation, dans L’Arbre de la connaissance, 1994 (The Tree of Knowledge, 1992), de règles de construction autonome du vivant (autopoïèse) à tous les processus de comportement, en particulier les activités collectives (par exemple Scott Camazine et al., Self-Organization in Biological Systems, 2001).

Critique du réductionnisme ontologique par Konrad Lorentz

Critique du réductionnisme ontologique par Konrad Lorentz dans -> CAPTURE de CODES : image00118

     Dans un article précédant nous avions repris l’hypothèse que les écosystèmes, en tant que systèmes complexes,  posaient un problème de méthode vis à vis du réductionnisme scientifique standart. En effet, malgré une connaissance parfaite des composants élémentaires d’un système complexe, il est impossible de prévoir son comportement autrement que par l’expérience ou la simulation.

Dans l’introduction de son ouvrage (1978) sur les fondements de l’éthologie (étude du comportement animal), Konrad Lorentz nous renseigne, à partir de sa description comparative des objectifs de la physique et ceux de la biologie, sur quelques caractéristiques du réductionnisme en tant que méthode scientifique. S’il ne renie pas l’intérêt voire l’obligation d’une telle approche, il convient selon lui de ne pas tomber dans le piège d’un réductionnisme « ontologique » qui ignorerait les connaissances nouvelles issues de la systémique. En effet : « on ne connaît pas suffisamment les structures à l’intérieur desquelles les lois générales de la physique se manifestent ». Extraits.

Les objectifs de la physique

     « La physique recherche les lois les plus générales qui régissent la matière et l’énergie. La biologie cherche à comprendre la structure et le fonctionnement des organismes vivants tels qu’elle peut les observer dans le monde […] » 

« […] Depuis Galilée, la physique procède selon la méthode de généralisation réductrice. Le physicien considère toujours le système qu’il étudie — un système planétaire, le pendule ou la pierre qui tombe — comme le cas particulier d’une classe supérieure de systèmes relevant de la même catégorie [...] »

« […] Pour le physicien, la connaissance des structures et des fonctions du système particulier n’est qu’un moyen, qu’une étape sur la voie qui mène à l’abstraction de la loi générale. Une fois qu’il est parvenu à l’établissement de cette loi, les propriétés spécifiques du système ne l’intéressent plus le moins du monde […] »

Les objectifs de la biologie

     « Pour son étude des organismes vivants, le biologiste utilise exactement la même méthode, avec quelques restrictions [...] Mais le but de sa recherche n’est pas du tout le même […] le biologiste cherche à comprendre le système vivant, ne fût-ce qu’un système partiel, en tant que tel et pour lui-même»

« Tous les systèmes vivants l’intéressent indépendamment de leur niveau d’intégration et de leur degré de complexité. Comme la démarche du physicien, celle du biologiste procède du particulier vers le général. Il est lui aussi persuadé que l’univers est régi par un seul et unique ensemble de lois générales et particulières parfaitement cohérentes, les dernières pouvant toujours être ramenées aux précédentes à condition toutefois que l’on connaisse les structures de la matière dans lesquelles elles s’appliquent et le devenir historique de ces structures. Nous reviendrons sur ce dernier point et sur les limites que cette nécessité impose à notre démarche réductrice. »

«  […] notre volonté de comprendre le monde du vivant serait radicalement absurde si nous ne partions pas du principe que, si nous parvenions à l’objectif utopique de notre analyse, nous réussirions à expliquer tous les processus du vivant, pour autant qu’ils puissent être appréhendés dans leur réalité objective, et tous les processus qui se déroulent en nous à partir des lois générales de la physique – et des structures organiques infiniment complexes – qui déterminent leur forme particulière respective. »

« […] En tant qu’éthologistes, nous espérons avant tout ramener les phénomènes que nous étudions à des processus physico-chimiques comme ceux qui se déroulent dans les synapses, au niveau des membranes cellulaires, dans les chaînes sensori-motrices et ainsi de suite. Nous aussi, nous sommes réductionnistes ! »

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Le réductionnisme ontologique

     « Le postulat fondamental de toute science selon lequel tout ce qui existe est le produit de la réunion d’éléments matériels au cours d’un grand devenir cosmique, l’ensemble étant toujours régi par les lois inhérentes à ces éléments, peut aisément conduire à une erreur philosophique d’autant plus dangereuse qu’elle est susceptible de discréditer toutes les sciences de la nature aux yeux de la pensée rationnelle. Cette erreur découle comme beaucoup d’autres de ce que l’on ne connaît pas suffisamment les structures à l’intérieur desquelles les lois générales de la physique se manifestent sous la forme de lois spécifiques extrêmement complexes. Mais ces dernières peuvent prétendre être considérées comme des lois de la nature exactement au même titre que le premier principe de physique ou les lois de conservation de l’énergie […] La conséquence logique de cette erreur est l’affirmation selon laquelle tout ce qui repose sur la matière ne serait rien d’autre que cette matière. » 

« Mais c’est dans le domaine du vivant que le réductionnisme ontologique devient véritablement dangereux […] L’erreur fondamentale du réductionnisme ontologique apparaît encore plus nettement si l’on compare deux autres propositions : les hommes sont des êtres vivants de la classe des mammifères et de l’ordre des primates et les hommes ne sont jamais rien d’autre que des mammifères de l’ordre des primates. »

« Le rien d’autre que du réductionnisme ontologique […] implique l’ignorance de deux données essentielles : premièrement la complexité des structures organiques et leurs différents niveaux d’intégration, deuxièmement les jugements de valeur que tout homme normalement constitué porte sur les niveaux inférieurs et les niveaux supérieurs du devenir organique. Dans le cours de l’évolution, l’apparition de nouvelles propriétés de systèmes résulte souvent de la réunion de systèmes fonctionnant jusqu’alors indépendamment les uns des autres. »

Lorentz fait ici référence au concept d’émergence. Sur Wikipédia on peut lire que l’émergence est un phénomène que l’on trouve dans les systèmes dynamiques comportant des rétroactions. On peut définir l’émergence par deux caractéristiques :

  • l’ensemble fait plus que la somme de ses parties. Ceci signifie qu’on ne peut pas prédire le comportement de l’ensemble par la seule analyse de ses parties.

  • l’ensemble adopte un comportement caractérisable sur lequel la connaissance détaillée de ses parties ne renseigne pas.

À partir d’un certain seuil critique de complexité, ces systèmes complexes voient apparaître de nouvelles propriétés, dites propriétés émergentes. Celles-ci deviennent observables lorsqu’elles vont dans le sens d’une organisation nouvelle (cf. auto-organisation).

Et Lorentz de conclure : « […] c’est en cela que réside le contenu de vérité de la formule des représentants de la Gestaltpsychologie (psychologie de la forme) qui pour avoir des consonances mystiques n’en est pas moins exacte :  » le tout est davantage que ses parties réunies. «  La cybernétique et la théorie des systèmes ont expliqué la brusque apparition de propriétés et de fonctions nouvelles à partir de données purement physiques et elles ont mis ainsi ceux qui les étudiaient à couvert de tout soupçon de croyance au miracle vitaliste […] la plupart des penseurs et philosophes qui n’ont pas connaissance de cette propriété de l’évolution ont tendance à croire que l’évolution est un processus très lent qui se fait graduellement. Il en résulte souvent un débat ontologique entre ceux qui ne voient entre deux stades de l’évolution qu’une différence de degré et ceux qui y voient une différence de nature. […] En réalité, chaque étape de l’évolution fait apparaître quelque chose qui n’a jamais été et engendre donc une différence de nature. » 

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