Archive pour la Catégorie 'Frederic Gros'

Avatar review – draft bêta …

Monde à poils

Monde à poils et  libido végétale, le porno chic de la terre vue du ciel des idées s’enrichit-il  de nouvelles images ?

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Avatar, premier blockbuster bio exploitant des symboles naturels à grand coup d’artifices, et puisque tout est lié, sans grand souci de cohérence. Mais pas que ?
Film paradoxal qui initie un imaginaire confus sur la machinerie naturelle, Avatar vaudrait cependant par les symptômes qu’il exhibe. Quelques lignes rapides sur cette affaire.

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Sur la forme en guise de liminaire. L’accélération du monde se porte bien, notre capacité à intégrer de nouveaux mouvements entre les images avec. Mouvements de cameras à priori inacceptables et cut façon jeu vidéo, notre cerveau intègre comme digère les derniers artifices à très haute vitesse. Voilà qui nous permet une économie brutale de structure narrative, par le texte, et maintenant par les images même.

Dans le fond immédiat, des cowboys capitalistes s’affrontent à des indiens, Pocahontas au milieu avec des questions de propriétés, passons donc bien vite sur l’horizon d’attente, tout est su à l’avance.
Consommation neuronale basse tension du côté du prétexte narratif quand toute dramatique tient dans la fumeuse chute d’un arbre. Pour le film le plus artificiel de l’histoire, faire l’apologie du naturel revient aussi (et surtout ?) à en maximiser l’exploitation émotionnelle.

On pourrait donc rapidement poser la formule suivante, petit abc de l’inquiétant de l’époque :
a-  syncrétisme globale entre chamanisme, acuponcture et jardinage;
b-  béatitude imaginaire qui nous exile de nous-mêmes;
c- mimétisme sentimental d’une nature apparente dans laquelle on basculerait toute histoire.

Néanmoins, dans un fond un plus profond et par éclats, nous sont présentées quelques captures partielles et symptomatique de la toile du temps. Evoquons ici succinctement quelques possibilités de développement.

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Des machineries naturelles ?

Monde de poils

Un mondes de poils

Que dire de la jongle-monde de Pandora ?

Son « naturel » est une machine, plus précisément un vaste cybernetic network où se mélangent images, idées, animaux et végétaux, neurones et rhizomes, passé, présent, futur. D’un point de vue esthétique, une version glamour à gros traits de ce vaste réseau intégré que Gregory Bateson appelait « écologie de l’esprit ».
Un monde de poil et de branchements donc, un réseau de réseau s’exprimant à travers un modèle végétal, une certaine manière de gérer le temps et l’espace, et qui forme l’habitat du corps des vivants comme le lieu de stockage de leurs mémoires. Le stockage décentralisé des mémoires fait ici communauté.

Les vivants ? On passera sur rapidement sur le rhinocéros à tête de requin marteau et autres hyènes des plus communes pour ne s’intéresser, à l’image du film, qu’à ces bleues figures coloniaires, expressions d’un devenir végétal et d’une connectique du poil sommet de la pyramide de l’évolution pandorienne.
A ce monde auto-réglé, qui s’affecte de lui-même dans ses capacités, s’oppose le monde intrusif, infecté et désaffecté d’humains incapables de respirer de son air pur sans masques et marteaux. De ce coté là du miroir, seul un improbable happy few pourrait empêcher ce monde capitalisto-militaire d’agir en vue de ses « faims ». 
Happy few qui se compose ainsi. Primo de scientifiques dont on devine qu’ils sont sortis des moules du GIEC plutôt que de ceux des OGM, bande de sympathiques szchizo-philanthropes au service d’une machine capitaliste et pour qui vouloir savoir peut libérer de ce que l’on croit savoir.
Secundo, d’un idiot militaire aux jambes raccourcies. La chanson de l’heureux élu en quelques mots : mon frère sait que je ne sais rien, je suis physiquement exclu d’un monde qui marche à toute vitesse, je suis la figure du joueur moderne cloué derrière son écran d’ordinateur.
Voilà donc pour un portrait partiel de nos « bons à bascule », une science réaffectée qui dirait plus de « Nous » que de « On », une figure du paralytique connecté qui mimerait sa reconnexion aux machineries naturelles. Au milieu, Internet, où la préfiguration d’un revenir dans le super network de la biosphère.

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Des hommes bleus coloniaires ?

Devenir vegetal

L’homme coloniaire, tapisserie des Ibans de Bornéo, 
les sociétés d’animaux font des super-organismes qui sont plutôt végétaux ?

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(…) R.Bessis :Je finirai ce dialogue entre nous par la phrase la plus philosophique qui termine votre travail et votre éloge de la plante. Vous dites, en citant René Thom : « Une contrainte fondamentale de la dynamique animale, qui distingue l’animal du végétal est la prédation (…). La plante n’a pas de proie individuée, elle cherche donc toujours à s’identifier à un milieu tridimensionnel » . Chez le végétal, « on trouve une sorte de dilution fractale dans le milieu nourricier ambiant ». Vous rajoutez alors ceci : « Peut-être à la transcendance de l’animal et de l’être humain faut-il opposer l’immanence de la plante. » Comment entendez-vous, au juste, cette dernière phrase ?
F.Hallé : Si l’on se place sur le plan de l’évolution biologique, celle de Darwin, alors l’évolution de la plante et celle de l’animal, sont très différentes. Evoluer pour les animaux, c’est se dégager de mieux en mieux des contraintes du milieu, et en ce sens, l’homme est bien placé au sommet de la pyramide, parce que pour nous à la limite, on ne sait même plus ce qu’est le milieu. Evoluer pour une plante, c’est se conformer de mieux en mieux aux contraintes du milieu, cela consiste donc, non pas à échapper mais au contraire à se dissoudre dedans, à disparaître d’une certaine manière. C’est en quoi la plante m’est apparue immanente, alors que l’animal serait transcendant.
R.Bessis : Je pense que notre société actuelle développe un devenir de type végétal, mais elle n’en a pas véritablement le choix. Tout ce qu’elle fait, soi-disant à ‘‘l’autre’’ (au milieu, à la nature, au monde) par volonté carnassière, c’est en fait, à elle-même qu’elle le fait. Si bien que le meurtre de l’autre se retourne en suicide, et la pulsion d’agression en pulsion de mort. Le devenir végétal appelle au contraire à ne plus vivre une opposition, mais à déployer une immanence.

Extraits tirés d’un dialogue de septembre 2001 entre le botaniste Francis Hallé et le psychologue Raphaël Bessis sur ce que pourrait-être le devenir végétal des sociétés contemporaines. L’intégralité des échanges est disponible sur le site caute.lautre.net.

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Faire une bonne histoire, une histoire efficace, c’est donc construire à grandes lignes l’affrontement de deux mondes.
Si dans le monde humain, mieux vaut savoir mais ne pas avoir de corps, un dedans, dans le monde des bleus, mieux vaut ne pas savoir et avoir un corps, un dehors.
La société des hommes bleus forme un organisme vivant, ensemble solidaire lui-même sous-système de l’organisme plus vaste qu’est le système naturel. Dans le même temps, les membres de cette société sont tous parfaitement individués. A chacun ses affects et ses capacités propres, le tout s’accompagnant d’une structure sociale rudimentaire.
Intégrés au système naturel de Pandora, ces hommes bleus nous apparaissent comme des êtres de médiation et de communication, dont les médiations sont collectives. Autrement dit, et dans le contexte pandorien, comme fonctionnant sur un modèle végétale de gestion du temps (mémoires inscrites dans les racines et la canopée) et de l’espace (habitat dans les branches).
Passons pour l’heure sur les incohérences, ce film oppose donc deux modèles de colonisation et de stratégie de développements. D’un côté celui des cellules volumiques que nous qualifieront pour le dire vite « d’animales ». Celles-ci sont dissipantes, centralisatrices, en quête d’immortalité. Elles sont représentées par des hommes blancs. De l’autre, des cellules surfaciques de type « végétales ». Celles-ci sont intégrantes, en quête de diversification et d’inscription dans une certaine forme d’éternité. Elles sont représentées par des hommes bleus.
Si l’on acceptait de suivre cette ligne, pour les hommes bleus croitre équivaudrait donc à maximiser ses surfaces d’échanges avec le dehors. Ainsi leur puissance ne grandit qu’à mesure qu’ils deviennent capables de se connecter, d’opérer des transactions – choisir et être choisit, affecter et être affecter – avec et par de nouvelles entités du dehors (un cheval, un oiseau, un dragon, etc.)
Êtres de surface, leur intériorité est comme retournée vers le dehors, les lieux de stockage qu’il propose, c’est à dire ces vastes parties du réseau la pensée qui situées hors des corps bleus individués collectent de manière non centralisée des traces mémorielles, des « codes génétiques » hétérogènes capables de cohabiter et de coévoluer.
La nature est alors, et pour ainsi dire, un super système d’information où la notion d’information renverrait à une certaine structuration pour concentration des énergies. Dès lors, si l’homme bleu connecté sélectionne, prélève, capture, les produits de ses transformations du monde pandorien sont restitués sous forme de traces mémorielles au super système d’information naturel.

Principe hologrammique

Principe hologrammique, la partie est dans le tout, le tout est inscrit dans la partie

Habiter dans un certain rapport de participation au dehors forme donc le point de stabilité de l’homme bleu. Le jongle se remplit de leurs pensées, leurs corps s’impriment de la jongle. A l’inverse, pour des humains dont le dedans égotique forme le point de stabilité, ceux-ci sont exposés à un dehors jongle qu’ils ne visitent que depuis leur dedans. Jongle intraductible sous ce rapport, ils ne cessent donc de vouloir s’en protéger, s’en couper, s’affronter.

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Pourquoi tout cela ne tient-il pas ensemble ?

Tenir ensemble

A l’envers de nulle part …

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(…) Nous appelons longitude d’un corps quelconque l’ensemble des rapports de vitesse et de lenteur, de repos et de mouvement, entre particules qui le composent de ce point de vue, c’est-à-dire entre éléments non formés. (…) Nous appelons latitude l’ensemble des affects qui remplissent un corps à chaque moment, c’est-à-dire les états intensifs d’une force anonyme (force d’exister, pouvoir d’être affecté). Ainsi nous établissons la cartographie d’un corps. (…) Vous allez définir un animal, ou un homme, non pas par sa forme, ses organes et ses fonctions, et pas non plus comme un sujet : vous allez le définir par les affects dont il est capable (…)  
L’éthologie, c’est d’abord l’étude des rapports de vitesse et de lenteur, des pouvoirs d’affecter et d’être affecté qui caractérisent chaque chose. Pour chaque chose, ces rapports et ces pouvoirs ont une amplitude, des seuils (minimum et maximum), des variations ou transformations propres. Et ils sélectionnent dans le monde ou la Nature ce qui correspond à la chose, c’est-à-dire ce qui affecte ou est affecté par la chose, ce qui meut ou est mû par la chose. Par exemple, un animal étant donné, à quoi cet animal est-il indifférent dans le monde infini, à quoi réagit-il positivement ou négativement, quels sont ses aliments, quels sont ses poisons, qu’est-ce qu’il « prend » dans son monde ? (…) Jamais donc un animal, une chose, n’est séparable de ses rapports avec le monde : l’intérieur est seulement un extérieur sélectionné, l’extérieur, un intérieur projeté ; la vitesse ou la lenteur des métabolismes, des perceptions, actions et réactions s’enchaînent pour constituer tel individu dans le monde. Et, en second lieu, il y a la manière dont ces rapports de vitesse et de lenteur sont effectués suivant les circonstances, ou ces pouvoirs d’être affecté, remplis. Car ils le sont toujours, mais de manière très différente, suivant que les affects présents menacent la chose (diminuent sa puissance, la ralentissent, la réduisent au minimum), ou la confirment, l’accélèrent et l’augmentent : poison ou nourriture ?
(…) Comment des individus se composent-ils pour former un individu supérieur, à l’infini ? Comment un être peut-il en prendre un autre dans son monde, mais en en conservant ou respectant les rapports et le monde propres ? Et à cet égard, par exemple, quels sont les différents types de sociabilité ? Il ne s’agit plus d’un rapport de point à contrepoint, ou de sélection d’un monde, mais d’une symphonie de la Nature, d’une constitution d’un monde de plus en plus large et intense. Dans quel mesure et comment composer les puissances, les vitesses et les lenteurs ?

Extraits de Spinoza, Philosophie pratique, Editions de Minuit; Édition : [Nouv. éd.] (1 avril 2003) Collection : Reprise.

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Entre les blancs et les bleus, des relations dedans/dehors qui diffèrent déterminent un certain rapport au temps, une certaine gestion de l’énergie, mode d’occupation de l’espace, l’insertion dans des machines naturelles ou dans la fabrication d’artefact technico-guerriers, etc. Et tout s’oppose pour faire histoire.
Problème ?
Quelque chose ne colle pas chez les hommes bleus. Très précisément le rapport au temps et à l’espace qu’on serait en droit d’attendre au regard de leur connectique au super réseau naturel.
Question initiale avant développement : pourquoi le personnage bleu féminin est-il de loin le personnage qui fonctionne ou fictionne le mieux ? Autour de cette interrogation simple on s’aperçoit bien vite que le film en reste le plus souvent à des intentions artificielles et confuses, et que ces hommes bleus ne sont finalement que ces hommes blancs débarrassés de quelques uns des encombrants soulignés par l’époque.

Ce qui choque, ce qui ne colle pas, c’est le manque de lenteur(s) de l’homme bleu. La lenteur, c’est-à-dire l’expression de la valorisation d’un certain style d’énergie en résistance à la dissipation brutale des forces. Un style d’intégration végétale au dehors que seule porte par instant le personnage bleu féminin.
Quand la vitesse maximale de leurs connexions au réseau naturel devrait renvoyer à la limite à une forme d’immobilité dans l’environnement, l’homme bleu reste enfermé par le film dans un éloge de la vitesse visible et de la communication.
Humain trop humain, on reste tous blanc : vitesses spectaculaires, vols héroïco-deltaplanesques et sports de l’extrême où la vie est plus forte car plus rapide, plus d’adrénaline et de pulsion de fuite.
Pour le dire autrement, dans son rapport à la nature de la jongle, son niveau d’intégration à la machinerie naturelle tel que présenté sous l’aspect de ses connectiques rhizomiques, l’homme bleu nous apparaît le plus souvent comme animés par des affects étrangers à ce rapport, de sorte que toute sa végétalo-cybernétique devient simple gadget. Si l’homme bleu habitait réellement le mode d’existence singulier qui nous est proposé, alors il ne pourrait faire ceci et cela, à commencer par courir dans tous les sens du dehors.

Nous voilà donc comme confronté à un problème d’ordre éthologique relatif aux vitesses et aux lenteurs des formes de vie qu’on invente, et dont l’organisation interne et le degré d’intégration au dehors ne colle pas aux affects qu’on lui attribue pour les besoins de l’histoire.
Cette imcompossibilité, que l’on pourrait qualifier de rythmique, produit incohérence et indifférence dans le récit. Dans l’opposition des mondes telle que posée initialement, l’homme bleu à la stratégie et connectique « végétale », celui-ci ne peut avoir les mêmes rythmes que l’homme blanc « volumique animal ». Et si les rythmes des hommes bleus ne cohabitent pas avec ses affects supposés, à contrario, humains et bleus ayant des vitesses tout à fait communes, ceux-ci devraient donc pouvoir coexister.

Le mode d’existence de l’homme bleu est un faux, situé à la bonne mi-distance classique de l’anthropocentrisme et de l’ethnocentrisme. La question du film se pose alors ainsi. Si l’homme bleu n’est qu’un homme amélioré par une sorte de super connectique végétale, en est-il une figure du passé ou de l’avenir ? Faut-il devenir ou revenir bleu ?
C’est à cette question centrale que le syncrétisme tout azimut du film n’apporte précisément aucune réponse, sauf celle d’une coexistence impossible.

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 (Re)(De)venir des bleus ?

Intention

C’est quoi le programme ?

A propos de Thoreau, Fréderic Gros soulignait (en marchant) cette idée du grand Ouest : le sauvage ce sont les forces de l’avenir. Ce qui est le plus primitif, ce qui déborde de l’humain représente en même temps la source de renouveau, les forces du futur.
Finalement, bien peu de traces du primitif sur Pandora, seules quelques bêtes sauvages. Mais persiste néanmoins cette idée du renouveau par un primitif dont différentes symboliques nous sont jetées en mélange sur la pellicule.
Car par ailleurs, il semble bien qu’il n’y ait pas de revenir possible. Il faut devenir bleu. Un peu par la grâce de l’ignorance, du saint esprit cybernétique de la forêt, mais sans oublier pour autant de posséder les quelques vertus cowboys nécessaires à son initiation.
C’est ainsi que les méchants humains, exception faite du happy few des heureux élus, sont priés de retourner sur leur planète dite agonisante. Quant à notre paralytique idiot, il quitte sa forme humaine pour devenir bleu.
Si l’on voulait retrouver un peu de cohérence dans le propos, on dirait qu’il gagne en intensité au fil de ses croisements bleus, accédant ainsi au stade d’une sorte de surhomme végétalo-cybernétique. L’homme blanc n’était donc ainsi qu’un avatar préparatoire à l’homme bleu dans l’histoire.
L’homme blanc doit mourir, il est maintenant bleu. Reste qu’il n’y aurait donc pas d’autres alternatives que de devenir bleu. Et cette curieuse alchimie, elle tombe toujours du ciel ?

Arrivé à ce stade, on ne sait plus ce que le film propose ou ne propose pas d’ailleurs. Est-on choisit par l’esprit cybernétique qui habite les lieux ? Si oui suffit-il d’être idiot au sens socratique pour être élu ? Doit-on redevenir indien ou devenir quelque chose d’autres dont on nous mélange des traces à l’écran ? Comment se brancher ? Par où ça commence ? Un retour au primitif et un oubli de quoi dans les mémoires ? Pourquoi doit-on être adoubé par les hommes bleus pour ce faire ? Sont-ils les gardiens mot de passe d’un nouveau temple ?

L’absence de proposition qui caractérise ce film semble néanmoins satisfaire un public qui se lève comme un seul homme. Soudainement conquis par la cyberbotanique et les joies du jardinage, il s’en vient à applaudir à sa propre expulsion. Quoi en penser ?

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Godard, Virilio, Gros : désynchroniser les images, réinvestir le dehors

http://www.dailymotion.com/video/x9sqct Vitesse de circulation, images et marche à pied. 

 » Chacun de nous devient trop nombreux à l’intérieur de lui-même, et pas assez à l’extérieur, où nous sommes remplacés peu à peu par des chaînes ininterrompues d’images esclaves les unes des autres. Chacune à sa place, comme chacun de nous, à sa place, dans la chaîne des évènements sur lesquels nous avons perdus tout pouvoir.  »
Jean-Luc Godard, Ici et ailleurs

 » Aujourd’hui, l’image l’emporte sur le langage, l’écran domine l’écrit (…) Aujourd’hui on synchronise les images, et donc la puissance de conditionnement ne concerne pas tant l’opinion, c’est-à-dire le rapport à une vérité ou à une erreur, que l’émotion que l’on ressent tous (mimétisme des affects) en même temps. Savoir que l’on ressent dans le monde entier, en même temps parce qu’il y a eu un Tsunami ou le World Trade center, c’est un pouvoir considérable, c’est un pouvoir de la vitesse …  »
Paul Virilio, Les revers du progrès

«  Tout ce qui est du côté de la marche, et de la marche à pied, s’oppose à la quête de performance … à un certains nombre de valeurs qui représentent la modernité … tout ce qui va du côté de la vitesse, de la médiation, de la rapidité, de la communication, etc. … la marche à pied représente une résistance à tout cela (…) 
Je pense que la marche permet de ne plus avoir d’image du monde … le rapport au paysage dans la marche n’est plus un rapport de représentation … on y lit un effort du corps, c’est le paysage qui insiste lentement dans le corps en marche … il écrit [Nietzsche] les sentiers sont méditatifs … il arrive un moment où c’est le paysage lui-même qui se rempli de la pensée du philosophe.  »
Frédéric Gros, Les vendredis de la philosophie, émission du vendredi 3 juillet 2009 : philosopher en marchant

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Godard, Virilio, Gros : désynchroniser les images, réinvestir le dehors dans Des figures, des visages. image001

Pour une ville qui marche
Marie Demers, Écosociété, 2008 

Synopsis
Tournant le dos à la marche, notre aménagement urbain nous incite à privilégier la position assise pour nos déplacements, nos loisirs et notre travail. Or, poussé à l’extrême, ce mode de vie sédentaire a des répercussions désastreuses. Pour une ville qui marche met en lumière différents choix d’environnements urbains aux États-Unis, au Canada et en Europe, et montre à quel point le modèle nord-américain de l’étalement urbain est lourd de conséquences, que ce soit en matière de santé publique ou de vie en société. Entièrement dévoué à la voiture, l’espace urbain est aujourd’hui réduit à un lieu de passage. En cédant l’espace public, les villes ont ainsi délaissé leurs lieux de convivialité et avec eux ont perdu le sentiment d’appartenance à une même communauté. L’espace déterminant la manière dont la communication s’établit au sein d’une population, l’étalement urbain et le tout-voiture ont peu à peu produit de l’isolement et détruit la fonction sociale et politique de la rue. En se basant sur une abondante documentation, l’auteure examine les causes et les conséquences néfastes de l’abandon de la marche et analyse comment l’omniprésence de la voiture et la création d’un environnement urbain déshumanisé nous tuent à petit feu.

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 studio08 dans Frederic Gros

Le Grand Pari(s)
Projet de l’equipe Studio 09

« La ville poreuse est une ville perméable et connecté, une ville des différents idiorythmes (…) Se substituant à une capitale traversée de fractures qui séparent les individus à toutes les échelles, la ville poreuse rétablit les connexions, facilite les échanges, mixe les populations »
Projet de l’équipe des architectes Bernardo Secchi et Paola Viganò pour le Grand Paris.

Bernardo Secchi, architecte-urbaniste italien, fondateur avec Paola Vigano du cabinet Studio 09 en 1990 à Milan, est Grand Prix de l’urbanisme.
Il intègre toujours dans son analyse de la ville les apports de l’écologie et des paysages tout en prenant en compte des éléments plus artistiques comme la musique ou le cinéma. Ses projets sont variés : coordination des plans directeurs urbains de nombreuses villes italiennes (dont Bergame, Sienne, etc.) ; lauréat du concours pour une nouvelle ville en Ukraine (Kortrijk), « Rome ville du Tevere » ou encore le Rectangle d’Or à Genève. Par ailleurs, il a remporté avec son associée Paola Vigano des projets phare dont Spoornord et le Théâtre plein à Anvers, la Ville-Port à Saint-Nazaire, enfin La Courrouze à Rennes.

> Propositions et synthèses :
synthese_STUDIO_08_chantier_1.pdf 
synthese_STUDIO_09_chantier_2.pdf

De la ville du besoin à la ville du désir – La ville « poreuse » – Equipe Studio 09 – Débat public du 17 mars 2009 Débat public « Le grand Pari(s) – A la recherche de nouveaux équilibres » – organisé par la Cité de l’architecture et du patrimoine au Théâtre national de Chaillot.
> voir la vidéo

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Philosopher en marchant, Frédéric Gros sur France Culture

Image de prévisualisation YouTube  » Chacun de nous devient trop nombreux à l’intérieur de lui-même et pas assez à l’extérieur.  » J.L. Godard 

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Entre-deux mondes étrange, le temps où la fiction, l’imaginer, pourrait susciter ce dont nous avons besoin et que nous ne faisons juste que pressentir. Des intercesseurs dans le champ, nouvelles figures et fictions instauratrices dont la rencontre viendrait nous forcer à repenser le présent, réouvrir un dehors qui ne soit pas celui des images de la catastrophe, figures imposées et situées à l’avance.
Ce qui arrive, ce qui nous arrive, ce qui change et nous change. Faire l’expérience de son chez soi. Imager, fictionner, face à ce que nous ne pouvons pas encore dire, remettre de l’écrit dans les images.
Travailler les images. Marcheur, flaneur, baladeur, monteur, … ces figures qui se dévoilent leurs propres clichés. Remontage, détricotage, désynchroniser et resynchroniser, l’art de se fabriquer un drôle de miroir-regard sur les différentes « méduses » de nos temps, (se) faire voir ce qui passe entre, comment un « je » assemble.

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« La grandeur de l’art véritable, au contraire de celui que M. de Norpois eût appelé un jeu de dilettante, c’était de retrouver, de ressaisir, de nous faire connaître cette réalité loin de laquelle nous vivons, de laquelle nous nous écartons de plus en plus au fur et à mesure que prend plus d’épaisseur et d’imperméabilité la connaissance conventionnelle que nous lui substituons, cette réalité que nous risquerions fort de mourir sans avoir connue, et qui est tout simplement notre vie.

La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par conséquent réellement vécue, c’est la littérature. Cette vie qui en un sens, habite à chaque instant chez tous les hommes aussi bien que chez l’artiste. Mais ils ne la voient pas parce qu’ils ne cherchent pas à l’éclaircir. Et ainsi leur passé est encombré d’innombrables clichés qui restent inutiles parce que l’intelligence ne les a pas «développés».

Notre vie ; et aussi la vie des autres car le style pour l’écrivain aussi bien que la couleur pour le peintre est une question non de technique, mais de vision. Il est la révélation, qui serait impossible par des moyens directs et conscients de la différence qualitative qu’il y a dans la façon dont nous apparaît le monde, différence qui, s’il n’y avait pas l’art, resterait le secret éternel de chacun.

Par l’art seulement nous pouvons sortir de nous, savoir ce que voit un autre de cet univers qui n’est pas le même que le nôtre et dont les paysages nous seraient restés aussi inconnus que ceux qu’il peut y avoir dans la lune. Grâce à l’art, au lieu de voir un seul monde, le nôtre, nous le voyons se multiplier et autant qu’il y a d’artistes originaux, autant nous avons de mondes à notre disposition, plus différents les uns des autres que ceux qui roulent dans l’infini, et bien des siècles après qu’est éteint le foyer dont il émanait, qu’il s’appelât Rembrandt ou Ver Meer, nous envoient encore leur rayon spécial. »

Proust, Le Temps Retrouvé

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marche et vitesse

Ainsi, et parmi, la figure du danseur chez un Gregory Bateson, du sculpteur chez un Jean-Claude Ameisen, de Gaïa telle que redéployée par Isabelle Stengers, et ici, la figure du marcheur chez F. Gros.

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« (…) Il faut du reste absolument alterner les promenades urbaines et campagnardes, et ne pas en privilégier une, car si leur fond est commun, un jeu libre de l’imagination composant ses propres impressions, leur vertu est différente. Marcher sur les allées publiques suppose une flânerie qui permet de faire sur la diversité du genre humain et le comportement de nos semblables, de micro-découvertes qui sont un enchantement pour l’esprit. Marcher seul en compagnie des ruisseaux et des arbres va plutôt entrainer une rêverie absolument éloignée des raideurs de l’introspection systématique, mais par là-même féconde. C’est comme si, doucement distraite par le spectacle des fleurs et des lignes d’horizon, l’âme s’oubliait un peu, et par là dévoilait à ses propres yeux certains de ces visages ordinairement masqués. Le secret de la promenade, c’est bien cette disponibilité de l’esprit, si rare dans nos existence affairées, polarisées, captives de nos propres entêtements. La disponibilité c’est une synthèse rare d’abandon et d’activités faisant tout le charme de l’esprit à la promenade. L’âme s’y trouve en effet disponible au monde des apparences. Elle n’a de compte à rendre à personne, n’a aucun impératif de cohérence, et dans ce jeu sans conséquence, il se peut que le monde se livre d’avantage au promeneur tout au long de ses déambulations fantasques, qu’à l’observateur sérieux et systématique. »

Extrait de : Marcher, une philosophie, Ed. Carnets Nord - 2009.

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http://www.dailymotion.com/video/x83r1j Paul Virilio. Face à la vitesse ? Remettre de l’écrit dans l’écran.

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Les vendredis de la philosophie, émission du vendredi 3 juillet 2009 : philosopher en marchant, avec Frédéric Gros.

Retranscription partielle et non exhaustive du début de l’entretien :

« Tout ce qui est du côté de la marche, et de la marche à pied, s’oppose à la quête de performance … à un certains nombre de valeurs qui représentent la modernité … tout ce qui va du côté de la vitesse, de la médiation, de la rapidité, de la communication, etc. … la marche à pied représente une résistance à tout cela. »

« Je voulais reconstruire un certain nombre de légendes et construire un certain nombre de mythes. De grandes figures comme celle de Rousseau, Nietzsche, Rimbaud … ont vraiment lié leur destin à l’expérience de la marche à pied … A chaque fois ce sont des styles de marche tout à fait différents » 

« Le grand style de marche chez Nietzsche est une marche soit dans les montagnes, soit qui suis toujours des sentiers ascendants, … l’idée qu’il faut s’élever au-dessus des grandes constructions ordinairement reçues … la construction en aphorisme souligne cet effort de la pensée qui gravit un certain point, et là se découvre un tout autre paysage … l’expérience d’un passage de col en montagne, qu’on fait par la marche, où se découvre quelque chose d’absolument nouveau, avec tout le problème de la perspective est au cœur de l’écriture aphoristique de Nietzsche … »

« Je pense que la marche permet de ne plus avoir d’image du monde … le rapport au paysage dans la marche n’est plus un rapport de représentation … on y lit un effort du corps, c’est le paysage qui insiste lentement dans le corps en marche … il écrit [Nietzsche] les sentiers sont méditatifs … il arrive un moment où c’est le paysage lui-même qui se rempli de la pensée du philosophe. »

« Si vous philosophez en marchant, la pensée est plus à la verticale d’elle-même … il y a une simplification … dans la marche, il y a une inversion des logiques habituelles dans lesquelles le point de stabilité repose sur un chez soi, un dedans, depuis lequel on visite des dehors. Dans la marche on va de gite en gite, et c’est précisément le dehors qui ne bouge pas. Ce que j’entends par dehors, c’est vraiment cette idée d’exposition … exposition entière du corps aux éléments, aux paysages, à la nature, etc. Et au fond ce serait ça le dehors, ce dont à quoi on s’expose … »

« La marche comme expérience de l’exténuation, non du retour à soi … » 

« Cette idée du rythme est essentiel dans la marche … celui qui vous correspond … » 

«  Pour Thoreau, le sauvage, ce sont les forces de l’avenir … la réserve de l’avenir, elle est dans le sauvage, elle et dans le primitif. Alors que pour nous européens … on renvoie toujours le sauvage à l’origine. C’est vraiment l’idée de l’Ouest, ce qui est le plus primitif, ce qui déborde de l’humain, représente la source de renouveau … »

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http://www.dailymotion.com/video/x910kh Nietszche, histoires 

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>> Frédéric Gros, professeur de philosophie à l’université de Paris 12, Marcher, une philosophie, Carnets Nord - 2009

4e de couverture : La marche à pied connaît de plus en plus d’adeptes qui en recueillent les bienfaits : apaisement, communion avec la nature, plénitude… Nous sommes très nombreux à bénéficier de ces dons. Marcher ne nécessite ni apprentissage, ni technique, ni matériel, ni argent. Il y faut juste un corps, de l’espace et du temps.
Mais la marche est aussi un acte philosophique et une expérience spirituelle. Allant du vagabondage au pèlerinage, de l’errance au parcours initiatique, de la nature à la civilisation, l’auteur puise dans la littérature, l’histoire et la philosophie : Rimbaud et la tentation de la fuite, Gandhi et la politique de résistance, sans oublier Kant et ses marches quotidiennes à Königsberg.
Et si l’on ne pensait bien qu’avec les pieds ? Que veut dire Nietzsche lorsqu’il écrit que « les orteils se dressent pour écouter » ? C’est ce que l’on cherche ici à comprendre. A la fois traité philosophique et définition d’un art de marcher, ce livre en réjouira beaucoup, qui ne se savaient pas penseurs en semelles.

***

« (…) Je suis un indien
Je suis un apache
Auquel on a fait croire
Que la douleur se cache
Je suis un apache
Je suis un indien
Auquel on a fait croire
Que la montagne est loin (…) »
Alain Bashung, « Je tuerai la pianiste »




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