Notions de phytosociologie : la sociologie des plantes

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     La phytosociologie est une branche de l’écologie et de la botanique qui étudie la manière dont les plantes s’associent dans l’espace et dans le temps pour composer différentes colonies de végétation. Autrement dit, c’est l’étude descriptive et causale des associations végétales. La notion d’association végétale ne doit pas être confondue avec celle de formation végétale (forêt, lande, prairie, etc.), qui ne tient pas compte de la composition et des associations spécifiques des groupements.

Sauf exceptions, les végétaux, organismes « individuellement » ouverts, sont toujours associées avec d’autres espèces végétales et animales, selon trois niveaux:

  • un niveau dit statique, réunissant les paramètres abiotiques du milieu (climat, sol).

  • un niveau d’interactions, qui tient compte des nombreuses relations interspécifiques (concurrence, symbiose, mutualisme entre différentes espèces..) et formant une association particulière: chaînes trophique, interactions biotiques ou abiotiques.

  • un niveau dit de succession, où les groupements passent par des stades différents pour tendre vers ce qu’on appellera un climax. Ce terme désignant l’ensemble sol-végétation caractérisant un milieu donné et parvenu, en l’absence de perturbations extérieures, à un état « stable » d’évolution.

C’est ce dernier niveau de succession qui nous intéressera dans la suite de cet article.

      Dans l’espace, la succession dynamique des différents stades de peuplement tend vers l’institution d’un équilibre populations-milieu qui modifie l’occupation de l’espace : densification des populations, structuration verticale et horizontal, augmentation des relations entre des espèces de plus en plus variées…

      Dans le temps, la succession végétale ou colonisation est le processus naturel par lequel un groupe de plantes d’une même station[1] y remplace progressivement un autre. Au début d’une succession végétale, les plantes sont en général des lichens et des mousses, suivis par des herbes, puis des arbustes et enfin des arbres. Une succession végétale est donc une séquence, une série dynamique de communautés qui sur un même complexe climat-sol, préparent le terrain à une autre communauté plus complexe, jusqu’au stade théorique ultime qu’est le climax.

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Processus de colonisation à petite échelle

D’après extraits et sources du centre de ressource pédagogiques en biologie végétale

       A partir d’eau, du carbone et de l’azote contenus dans l’air, la roche nue va donc être progressivement colonisée par différentes associations (séries dynamiques) de végétations.

     Le premier stade de la colonisation est effectué par les végétaux dits « pionniers ». Ainsi des lichens, puis mousses diverses viennent occuper les espaces libres (roche nues, flaque d’eau…). En l’absence de matière organique accessible dans le sol, ces végétaux sont les seuls capables de se développer dans un milieu strictement minéral (autotrophie). C’est notamment le cas des lichens à algues bleues, autotrophes pour le carbone et l’azote.

Comme ces végétaux de structure très simple ne sont pas capables d’une grande adaptation, leur « moment » sur la séquence correspond au temps de la faible compétition, soit à un espace caractérisé par des variations dures et brutales du milieu. C’est l’activité même de ces organismes qui en modifiant le biotope (humidité, brise-vent, création d’humus, compétition intraspécifique…) va alors favoriser l’arrivée de nouvelles espèces plus adaptées et compétitives. C’est donc en se développant que ces pionniers marquent la fin de leur « moment ». Cependant, leur destinée étant de disparaître de la station plus ou moins rapidement, ceux-ci sont programmés pour employer leur énergie à préparer ce départ : appareil végétatif très réduit, toute leur stratégie étant orientée vers la reproduction.

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     Le deuxième stade de colonisation est assuré par les végétaux dits « pionniers intermédiaires ». Tout comme les précédents, ils sont aussi destinés à disparaître une fois leur travail accompli. Celui-ci consiste en une densification et une meilleure structuration de l’occupation de l’espace  (structuration aérienne et terrestre). Apparaît alors à ce stade une plus grande diversité des espèces et donc des associations et interactions possibles (inter et intraspécifique).

Cette complexité croissante du milieu nécessite alors un peu plus d’énergie de l’appareil végétatif, lequel est à présent bien plus développé. Ainsi la vie est plus longue, la reproduction plus tardive et moins importante.Cependant il s’agit d’associations d’espèces encore instables, héliophiles (soleil) et sciaphiles (ombre). A ce stade la production brute est forte, la dépense d’énergie étant faible. La biomasse augmente rapidement, la productivité est importante.

     Le dernier satde, ou stade « climacique » est une association dense d’espèces qui toutes se maintiennent dans un milieu maintenant surpeuplé et donc soumis à une compétition très forte. En réponse, la végétation est très structurée, chaque espèce possède une niche écologique étroite. Les interrelations sont fondamentales et aboutissent à une coopération importante et des réseaux trophiques complexes. La biomasse individuelle est importante, la longévité aussi, la reproduction est faible et tardive. Les individus orientent donc leur métabolisme vers la survie et les populations fluctuent selon une stratégie de compétition.

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     Un exemple bien connu de série dynamique est celle menant au stade climacique de la forêt de chêne vert sur les sols calcaire de Provence. Dans le processus de colonisation il existe les différents stades d’espèces pionnières qui vont « préparer le terrain » pour l’arrivée de la forêt de chêne vert sur sa niche écologique. Les premières associations végétales vont construire le sol (travail de la roche, formation d’humus…), c’est le cas des diverses pelouses, des landes (garrigue ouvertes à ciste, romarin, ajonc). Les suivantes, comme le Pin d’Alep, permettrons de protéger la croissance (ombre, guide de croissance) des jeunes chênes vert. Voir plus

Conséquences en termes agricoles

     Les cultures de base choisies par l’homme sont majoritairement des végétaux appartenant à des stades pionniers intermédiaires. Ces espèces sont donc très productives à ce stade du fait de la rapidité de la croissance et du renouvellement des individus. Ainsi, afin de satisfaire à des besoins alimentaires importants et immédiats, l’agriculture requière des écosystèmes jeunes ou tout du moins continuellement rajeunis (déboisement, défrichement, pâturages, cultures sur brûlis, labourage…)

Or une caractéristique des écosystèmes jeunes réside dans leur recherche de stabilité, notamment par l’augmentation de la diversité et de la biomasse, d’où la production des « mauvaises » herbes. Parallèlement, leur forte production provoque le développement des consommateurs (parasites, rongeurs, insectes…)

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     Pour éviter que ces diverses compétitions ne grèvent les rendements, le travail agricole consiste précisément à s’opposer à cette « logique » naturelle, cela à travers des apports exogènes en eau, engrais minéraux ou organiques, pesticides, énergie…Cependant, dans les écosystèmes jeunes, les cycles sont encore ouverts et les végétaux ne retiennent pas l’ensemble de ces apports au milieu. Dès lors les surplus s’infiltrent dans les sols, l’eau ou passe dans l’atmosphère. Les intrants deviennent alors des polluants, à différent degré selon leur quantité ou leur qualité. L’agriculture moderne productive est donc excessive par essence. Il conviendrait donc de réduire les surplus tout en laissant une place plus importante aux mécanismes de régulation naturels (recyclage, diversité…)

Processus de colonisation à grande échelle

D’après extraits et sources Laboratoire de Chrono-Ecologie, Université de Franche-Comté, CNRS

     A grande échelle, on appelle écozone ou biome, l’ensemble des écosystèmes caractéristiques d’une aire biogéographique. Le biome est donc l’expression des conditions écologiques à une échelle régionale ou continentale. En d’autres termes, l’expression des conditions physiques (nature du sol, topographie…) et climatiques (température et précipitation moyenne), induisant les conditions écologiques auxquelles va répondre une biocénose adaptée : des producteurs primaires, les végétaux autotrophes capables de transformer l’énergie solaire en énergie chimique, des consommateurs que sont les animaux, des décomposeurs ou recycleurs, champignons et micro-organismes hétérotrophes.

Les grandes formations climaciques de ces biomes sont des forêts, sauf dans les régions désertiques, arctiques ou de hautes montagnes.

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Dans les régions tempérées et froides

  • les forêts de conifères des régions boréales : la taïga

Localisation : 31% des forêts du globe réparti entre le Canada et dans le nord de l’Eurasie.
Climat : 4 mois T°m > 10°C, 6 mois T°m < 0°C, enneigement de 160 à 200 jours par an.
Essences végétales : arbres adaptés au froid : conifères (pin, sapin, épicéa, mélèze) et quelques feuillus (aulne, bouleau et le saule).
Production végétale : décomposition lente, croissance et productivité primaire faible. Biomasse de 100 à 300 t/ha du nord au sud, productivité primaire en moyenne de 800 g/m2/an.

  • les forêts décidues des régions tempérées

Localisation : Europe tempérée, Chine septentrionale et centrale, continent nord américain jusqu’à la latitude du Saint Laurent.
Climat : Tempéré.
Essences végétales : arbres à feuilles caduques, chêne 34%, hêtre 15%, châtaignier, charme 8%, tilleul, érable et conifères tels que le pin maritime 12%, pin sylvestre 7%, sapin 7%, épicéa 3%.
Production végétale: la productivité primaire est d’environ 1200 g/m2/an et la biomasse de 240 à 320 t/ha.

  • les forêts sempervirentes des régions méditerranéennes

Localisation : bassin méditerranéen, régions de Californie, Afrique du sud et Australie.
Climat : T°m 15 à 20°C, étés secs et chauds, hivers doux et humides à gelées exceptionnelles.
Essences végétales : la végétation méditerranéenne primitive a été presque partout détruite par le feu particulièrement et remplacée par des stades de dégradation du maquis et de la garrigue (cistes, romarin, lavande, végétation sclérophylle et pyrophyte …) accompagnés de conifères (pin d’Alep et pin maritime).
Production végétale: Productivité primaire de 1300 g/m2/an et biomasse entre 250 et 350 t/ha.

  • les formations herbacées naturelles : prairies et steppes

Localisation : 24% de la surface de tous les continents : formations herbacées naturelles de la steppe russe, prairie nord-américaine et la pampa sud-américaine.
Climat : régions tempérées continentales, étés chauds et humides et hivers froids, pluviosité annuelle de 300 – 500 mm/an jusqu’à 1000 mm/an.
Essences végétales : diverses familles de graminées ou apparentées. Les arbres sont presque totalement absents.
Production végétale: productivité primaire 600 g/m2/an et biomasse 16 t/ha faibles (biomasse souterraine supérieure à la biomasse aérienne).

Dans les régions tropicales humides

  • les forêts équatoriales sempervirentes

Localisation : forêts denses et ombrophiles : Amazonie, Afrique occidentale et centrale, Indo-Malaisie.
Climat : régions chaudes à la pluviométrie élevée (2500 à 8000 mm/an), sans saison sèche ou de très courte durée.
Essences végétales : arbres sempervirents d’une grande diversité : palmiers, diptérocarpacées, orchidées, euphorbiacées, rubiacées, répartis par strates. La strate herbacée est clairsemée et formée d’espèces sciaphiles (fougères, sélaginelles).
Production végétale: productivité primaire et biomasse élevées : 2200 g/m2/an et 450 t/ha.

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  • les savanes

Localisation : formations végétales intertropicales couvrant de larges surfaces.
Climat : régions à climat ensoleillé, chaud en été (T°m 26°C) et pluviosité faible de 250 à 1000mm/an.
Essences végétales : Savanes herbeuses en Afrique, en Amérique du sud, végétation formée de poacées dures formant un tapis herbacé dense et difficilement pénétrable. Savanes arbustives Acacia, Baobab, en Afrique, Eucalyptus en Australie, Cactées en Amérique du sud).
Production végétale: productivité primaire et biomasse faibles : 900 g/m2/an et 40 t/ha.

La savane

Dans les régions arides et semi-arides

  • les déserts

Localisation : 34% de la surface des terres émergées sont des déserts ou des semi-déserts On estime que 810 millions d’ha ont été désertifiés depuis 50 ans.
Climat : pluviosité annuelle moyenne est inférieure à 100 mm et très irrégulière.
Essences végétales : végétation rare, localisée dans les dépressions ou les rares zones favorables. Arbustes, des plantes succulentes  sont caractérisés par une vie courte localisée à la période humide.
Production végétale: productivité primaire et biomasse très faibles : 90 g/m2/an et 7 t/ha.

  • la toundra

Localisation : zone située au delà de la limite naturelle des arbres.
Climat : période sans gelée < 3 mois,  T°m du mois le plus chaud < 10°C et précipitations < 250 mm/an.
Essences végétales : Au sud, arbrisseaux nains mêlés de tourbières à sphaignes. Au nord, pelouses et des tourbières, puis des tapis de lichens. Les conditions thermiques particulières expliquent que la croissance des plantes soit très lente et leur longévité très grande.
Production végétale: Productivité et biomasse très faibles : 140 g/m2/an et 6t/an.

Toundra

Pour une répartition géographique des différents biomes voir source Wikipédia



[1] Étendue de terrain de superficie variable (quelques m2 à plusieurs dizaines d’ha), homogène dans ses conditions physiques et biologiques.

7 Réponses à “Notions de phytosociologie : la sociologie des plantes”


  • Jacques KAYISU VUELU

    Permettez moi de vous demander des informations sur la repartition géographique de rotang au monde.

    je suis enseignant en RDCongo, à Kisangani à la Faculté d’agronomie (IFA / Yangambi). Je suis entrain de préparer un protocole de recherche pour une thèse de doctorat.

    Tout en esperant que nos contacts seront fructueux, je vous remercie d’avance.

    Merci

    Jacques

  • En partant de la succession post-culturale, discuter les mécanismes et les théories de la succession de la succession végétale.

  • Je vous felicite pour toutes ces imformations. Merci

  • merci pour ces informations

  • salambiaku N'singi

    Je suis chercheur en RDC, sur les PFNL, je demande des infos sur la documentation de PFNL, concernant sa transformation , et leur conservation.

    Merci

  • Ecrit remarquable. J’ai découvert par hasard ce site et vais continuer à le suivre !

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  • Je trouve votre site hyper génial, je vous souhaite pleins de succès car vous le méritez, bonne continuation et encore bravo pour ce superbe site !

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