Archive mensuelle de mars 2007

Définition et quantification de la ressource en eau

D’après extraits du rapport de l’Académie des Sciences sur l’état des eaux continentales, octobre 2006.

La ressource en eau

     Les eaux sont très irrégulièrement réparties à la surface de la planète : 97 % du volume total s’accumule dans les océans, 2 % sur les continents, 0,6 % en phase solide dans les inlandsis polaires et les glaciers, enfin une part très modeste demeure en phase gazeuse dans l’atmosphère.

Les continents de notre planète reçoivent en moyenne 119 000 km3/an de précipitations  parmi lesquelles :

  • 44 000 km3/an proviennent de l’excès de l’évaporation sur les précipitations au-dessus des océans : la même quantité retourne aux océans principalement via les fleuves et dans une moindre mesure via les nappes souterraines et la fusion des glaces polaires ;

  • 75000 km3/an proviennent de l’évapotranspiration à partir des continents eux-mêmes.

La notion de « ressource en eau » se réfère classiquement aux eaux liquides en écoulement, accessibles aux usages humains.

     Les ressources en eau se constituent donc à partir des 44 000 km3/an d’eau douce qui rejoignent les nappes souterraines ou s’écoulent dans les cours d’eau. Elles négligent donc l’eau de pluie utilisée directement par l’agriculture pluviale (i.e. non irriguée) et l’ensemble des écosystèmes naturels, qui fait partie de ce qu’on appelle l’eau verte. L’eau de pluie a en effet deux cheminements possibles : court, 63 % des précipitations sur les continents sont utilisées par les écosystèmes terrestres ou directement réévaporées par les sols dans un « recyclage » permanent dont la maille est de l’ordre de quelques centaines de kilomètres; 37 % sur un cycle plus long impliquant les océans. Elles négligent également les stocks très importants d’eau douce contenus dans les réservoirs que sont les nappes souterraines, les glaciers ou les lacs. Stock estimé à plus de 30 000 fois les ressources renouvelables annuelles utilisables.

Comme une part importante des débits de ces cours d’eau s’écoule lors de crues ou dans des endroits peu habités, il faut de plus que l’utilisation de cette eau ne mette pas en péril les équilibres et dynamiques naturels, tant en ce qui concerne les écosystèmes de surface que les nappes souterraines : les ressources renouvelables utilisables sont ainsi estimées à seulement de 10 000 à 12 000 km3/an.

Usages de la ressource

Définition et quantification de la ressource en eau dans -> ACTUS image00120

image00213 dans -> NOTIONS D'ECOLOGIE

Par habitant, les prélèvements chutent d’ici 2050 de 13 % par rapport à l’année 2000, de 640 à 558 m3/hab.an.

Disparité de la ressource et commerce agricole

     Les disparités de distribution des ressources en eau d’une part, et d’évolutions démographiques d’autre part, sont patentes ; l’agriculture est par ailleurs et de loin le plus gros usager de l’eau. L’échelle mondiale des marchés de denrées alimentaires est donc le facteur de couplage plus immédiat entre les questions d’eau et de démographie des divers continents. Sont ainsi en question la capacité collective mondiale à faire face aux besoins en eau à venir et à la distribution future de l’agriculture mondiale. La possibilité de fournir des aliments à la population mondiale, quelle que soit son évolution, est en effet la première question à examiner quand on réfléchit aux problèmes de l’eau.

image00314 dans Ressource en eau

Processus de la photosynthèse

     Pour produire de la matière sèche végétale, les plantes transpirent d’importantes quantités d’eau. L’ordre de grandeur moyen, très variable d’une plante à l’autre, est globalement de 1 000 l d’eau transpirée par kg de matière brute végétale produite. On appelle « eau virtuelle » la quantité d’eau qu’il a fallu utiliser pour produire les aliments.

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Ordres de grandeur des quantités d’eau requises en l/kg pour produire les denrées alimentaires (partie consommée).

Dans ce contexte, les échanges de produits alimentaires augmentent et avec eux les échanges d’eau « virtuelle » qui représentent déjà de l’ordre de 1 200 km3/an, soit près du dixième de la ressource renouvelable utilisable, près du quart de l’ensemble des prélèvements.

 Le rapport de l’Académie des Sciences

Télécharger le rapport dans son intégralité (pdf, 3Mo)

« Ce rapport sur les eaux continentales, établi par le Comité RST de l’Académie des sciences à la demande du ministre chargé de la Recherche, s’est donné pour objectif d’apporter un éclairage sur les difficultés que nos sociétés sont susceptibles de rencontrer dans le domaine de l’eau, à court, moyen et long terme, principalement en France, mais aussi dans le reste du monde, et en particulier dans les pays en développement. L’analyse de ces difficultés potentielles, dont tout le monde pressent qu’elles pourraient être dramatiques, l’analyse de leur probabilité d’occurrence, l’analyse de leur échelonnement dans le temps, ont pour objet de tenter, par l’action, de les prévenir, ou, si elles survenaient, d’en amoindrir les effets. »

Plan du rapport

Chapitre 1 : Eau, aménagements et usages

1. Bilan besoins-ressources à l’échelle mondiale et alimentation
2. La gestion des eaux à l’échelle régionale des bassins versants
3. L’eau à l’échelle locale des grandes mégalopoles

Chapitre 2 : Écosystèmes aquatiques

Chapitre 3 : Eau et santé

Chapitre 4 : Eau et climat Conclusions et recommandations

Analyse et synthèse, les méthodes de Descartes à Spinoza

Deleuze

      Notre esprit parvient à la connaissance à l’aide des deux principaux « mouvements » que sont l’induction et la déduction. Ceux si se combinant par suite afin de composer diverses méthodes d’accès à la connaissance.

  • Avec l’induction, nous nous élevons à la connaissance des lois générales pour aboutir à une synthèse, à la recomposition des faits (adaptée à la découverte, aux sciences physiques et naturelles).

  • Avec la déduction, nous descendons du général au particulier pour aboutir à une décomposition, à une analyse qui  distingue l’objet de tous ceux qui l’entourent (adaptée à l’enseignement, aux mathématiques et à la philosophie).

Dans le chapitre intitulé Spinoza contre Descartes de son ouvrage « Spinoza et le problème de l’expression », Gilles Deleuze revient sur cette opposition entre analyse et synthèse, déduction et induction, de la cause vers l’effet, de l’effet vers la cause. Extraits.

René Descartes par Frans Hals.

« Descartes […] dit que la méthode analytique a le mérite de nous faire voir comment les effets dépendent des causes […] nous avons une connaissais claire et distincte d’un effet avant d’avoir une connaissance claire et distincte de la cause. Par  exemple, je sais que j’existe comme être pensant avant de connaître la cause par laquelle j’existe […] La connaissance claire et distincte de l’effet suppose donc une connaissance confuse de la cause, mais en aucun cas ne dépend d’une connaissance plus parfaite de la cause. Au contraire, c’est la connaissance claire et distincte de la cause qui dépend de la connaissance claire et distincte de l’effet […] Chez Descartes, donc, deux thèmes sont fondamentalement liés : la suffisance théorique de l’idée claire et distincte, la possibilité pratique d’aller d’une connaissance claire et distincte de l’effet à une connaissance claire et distincte de la cause.

Portrait de 1665 tiré de la Herzog-August-Bibliothek

« […] Spinoza ne croit pas à la suffisance du clair et du distinct, parce qu’il ne croit pas qu’on puisse de manière satisfaisante aller d’une connaissance de l’effet à une connaissance de la cause. Il ne suffit pas d’une idée claire et distincte, il faut aller jusqu’à l’idée adéquate. C’est-à-dire : il ne suffit pas de montrer comment les effets dépendent des causes, il faut montrer comment la connaissance vraie de l’effet dépend elle-même de la connaissance de la cause. Telle est la définition de la méthode synthétique […] »

« […] Descartes veut dire : la méthode synthétique prétend toujours connaître par la cause, mais elle n’y réussit pas toujours. L’objection fondamentale est la suivante : comment la cause elle-même serait-elle connue ? […] La thèse de Descartes se présente donc ainsi : la méthode synthétique a une ambition démesurée, mais elle ne nous donne aucun moyen de connaître les causes réelles. En fait, elle part d’une connaissance confuse de l’effet, et s’élève [induction] à des abstraits qu’elle nous présente à tort comme des causes. C’est pourquoi, malgré ses prétentions, elle se contente d’examiner les causes par les effets. La méthode analytique, au contraire, est d’intention plus modeste. Mais, parce qu’elle dégage d’abord une perception claire et distincte de l’effet, elle nous donne le moyen d’inférer [tirer une conclusion d'une proposition ou d'un fait] de cette perception une connaissance véritable de la cause ; c’est pourquoi elle est apte à montrer comment les effets eux-mêmes dépendent des causes. »

« La méthode synthétique n’est donc légitime qu’à une condition : quand elle n’est pas livrée à elle-même, quand elle vient après la méthode analytique, quand elle s’appuie sur une connaissance préalable des causes réelles. La méthode, synthétique ne nous fait rien connaître par elle-même, elle n’est pas une méthode d’invention ; elle trouve son utilité dans l’exposition de la connaissance, dans l’exposition de ce qui est déjà inventé […] Le seul problème est donc de savoir si la méthode synthétique est capable, d’abord et par elle-même, de nous faire connaître les principes qu’elle suppose. »

Synthèse soustractive

« […] Quelle est la vraie méthode du point de vue de la connaissance ? Alors l’anti cartésianisme de Spinoza se manifeste pleinement : selon Spinoza, la méthode synthétique est la seule méthode d’invention véritable, la seule méthode qui vaille dans l’ordre de la connaissance. Or, une telle position n’est tenable que si Spinoza estime avoir les moyens, non seulement de retourner les objections de Descartes »

« […] Dans le Traité de la réforme, Spinoza groupe […] deux procédés très divers, dont il dénonce l’insuffisance. Le premier consiste à inférer [induction] une cause à partir d’un effet clairement perçu : on reconnaît ici la méthode analytique de Descartes […] le second consiste à  tirer une conclusion d’un universel qui est toujours accompagné d’une certaine propriété, on reconnaît la méthode synthétique d’Aristote, son processus déductif à partir du moyen-terme conçu comme caractère spécifique. »

« […] C’est donc le parallélisme [du corps et de la pensée selon le principe d’une seule substance pour tous les attributs] qui donne à Spinoza le moyen de dépasser les difficultés de [la synthèse aristotélicienne]. La cause formelle d’une idée n’est jamais un universel abstrait. Les universaux, genres ou espèces, renvoient bien à une puissance d’imaginer, mais cette puissance diminue au fur et à mesure que nous comprenons plus de choses. La cause formelle de l’idée vraie, c’est notre puissance de comprendre ; et plus nous comprenons de choses, moins nous formons ces fictions de genres et d’espèces. Si Aristote identifie la cause formelle avec l’universel spécifique, c’est-parce qu’il en reste au plus bas degré de la puissance de penser, sans découvrir les lois qui permettent à celle-ci d’aller d’un être réel à un autre réel sans passer par les choses abstraites. D’autre part, la cause matérielle d’une idée n’est pas une perception sensible confuse : une idée de chose particulière trouve toujours sa cause dans une autre idée de chose particulière déterminée à la produire […] »

« Sous son premier aspect, la méthode synthétique est réflexive, c’est- à dire nous fait connaître notre puissance de comprendre. Il est vrai aussi que la méthode synthétique forge ou feint une cause en fonction d’un effet ; mais loin d’y voir de contradiction, nous devons reconnaître ici le minimum de régression qui nous permet, le plus vite possible, d’atteindre à l’idée de Dieu comme à la source de toutes les autres idées. Sous ce second aspect, la méthode est constructive ou génétique […] les idées qui découlent de l’idée de Dieu sont des idées d’êtres réels : leur production est en même temps la déduction du réel, la forme et la matière du vrai s’identifient dans l’enchaînement [ordre] des idées. La méthode, sous ce troisième aspect, est déductive. Réflexion, genèse et déduction, ces trois moments constituent tous ensemble la méthode synthétique [de Spinoza] »

Voir sur le web : http://www.cosmovisions.com/methode.htm

La perspective de l’alcyon : le corps conciliateur

http://www.dailymotion.com/video/NaSS2Qr3JGkokdJ5N

« Tout ce que nous autres, les alcyoniens, cherchons en vain chez Wagner : la gaya scienza ! Les pieds ailés, l’esprit, la flamme, la grâce, la danse des étoiles  » Nietzsche contre Wagner

« Il faut beaucoup de chaos en soi pour accoucher d’une étoile qui danse » Ainsi parlait Zarathoustra

«  Qu’il soit perdu pour nous, le jour où nous n’avons pas dansé  » Ainsi parlait Zarathoustra

« On voit à la démarche de quelqu’un s’il a trouvé sa route, car l’homme qui approche du but ne marche pas; il danse » Nietzsche

« Je ne sais rien qu’un philosophe souhaite plus qu’être un bon danseur. Car la danse est son idéal, son art aussi, sa seule piété enfin : son culte » Le Gai savoir

« Des vérités faites pour nos pieds, des vérités qui se puissent danser » Nietzsche

« Il faut apprendre  » à tout considérer comme un geste : la longueur et la césure des phrases, la ponctuation, les respirations » Les dix commandements de l’école du style, aphorismes rédigés par Nietzsche pour Lou Andréas Salomé

     Ce qu’accomplit le danseur, c’est le dépassement des antinomies. Le corps dansant a le pouvoir d’unir les contraires, de laisser advenir , dans les contraires mêmes, une identité par le fond. Aussi, pour Nietzsche, le danseur est-il à la fois de la terre et du ciel, fils de la pesanteur et de la légèreté, médiateur entre le visible et l’invisible, réconciliateur des forces animales et des forces spirituelles, du corps et de l’esprit. La danse est le lieu fécond de la coïncidence des contraires. Pour Nietzsche dont le corps est malade, pour Nietzsche qui souffre de migraines violentes (le corps a mal là où il pense, là où il œuvre), la danse est identifiée à cet oiseau marin, présage de calme et de paix – «  l’alcyon  ». Michèle Finck

Alcyon pie en vol

     Puisque la vérité dernière exile l’esprit hors de la nature où il peut vivre et prospérer, la volonté de puissance irait inéluctablement à sa perte, si elle devait suivre l’injonction inconditionnelle à la probité et à la justice. « La connaissance est pour l’humanité un magnifique moyen de s’anéantir elle-même «  (X, 160). Pour échapper à cette menace, l’homme assigne une limite à sa véracité, il se fait l’avocat de l’apparence vitale ; cette apparence sanctifiée grâce au renoncement lucide de l’esprit le plus véridique, c’est l’art. « Nous avons l’art, dit Nietzsche, afin de ne pas mourir de la vérité » (XVI, 248). En effet,  »si nous n’avions pas approuvé les arts et inventé cette sorte de culte du non-vrai, nous ne saurions du tout supporter la faculté que nous procure maintenant la science, de comprendre l’universel esprit de non-vérité et de mensonge, de comprendre le délire et l’erreur en tant que conditions de l’existence connaissante et sensible » (V, 142). D’après source : Encyclopédia Universalis 2004

« Nietzsche est le philosophe de la vie. Il célèbre le corps en marche, le corps emporté par le mouvement, la danse, la musique [...] Contre le nihilisme qui, rongeant son époque, nie la vie et s’abîme dans le séculaire mépris du corps, Nietzsche propose une nouvelle image de la pensée. Une philosophie à coups de marteau qui fait tinter les entrailles des vieilles (et creuses) idoles et s’éprend de l’apesanteur, du geste, de la musique. Ainsi, se libérant des illusions métaphysiques, Nietzsche veut proposer une esthétique de l’existence [...] » D’après le dossier Nietzsche contre le nihilisme, Magazine littéraire n° 383 -Janvier 2000

Mensch, gib acht !

Ainsi parlait Zarathoustra, Friedrich Nietzsche : Le chant de la danse

     Un soir Zarathoustra traversa la forêt avec ses disciples; et voici qu’en cherchant une fontaine il parvint sur une verte prairie, bordée d’arbres et de buissons silencieux: et dans cette clairière des jeunes filles dansaient entre elles. Dès qu’elles eurent reconnu Zarathoustra, elles cessèrent leurs danses; mais Zarathoustra s’approcha d’elles avec un geste amical et dit ces paroles:

« Ne cessez pas vos danses, charmantes jeunes filles! Ce n’est point un trouble-fête au mauvais œil qui est venu parmi vous, ce n’est point un ennemi des jeunes filles! Je suis l’avocat de Dieu devant le Diable: or le Diable c’est l’esprit de la lourdeur. Comment serais-je l’ennemi de votre grâce légère? L’ennemi de la danse divine, ou encore des pieds mignons aux fines chevilles?

Il est vrai que je suis une forêt pleine de ténèbres et de grands arbres sombres; mais qui ne craint pas mes ténèbres trouvera sous mes cyprès des sentiers fleuris de roses. Il trouvera bien aussi le petit dieu que les jeunes filles préfèrent: il repose près de la fontaine, en silence et les yeux clos.

En vérité, il s’est endormi en plein jour, le fainéant! A-t-il voulu prendre trop de papillons? Ne soyez pas fâchées contre moi, belles danseuses, si je corrige un peu le petit dieu! Il se mettra peut-être à crier et à pleurer, mais il prête à rire, même quand il pleure!

http://www.dailymotion.com/video/x47a5j

Et c’est les yeux pleins de larmes qu’il doit vous demander une danse; et moi-même j’accompagnerai sa danse d’une chanson. Un air de danse et une satire sur l’esprit de la lourdeur, sur ce démon très haut et tout puissant, dont ils disent qu’il est le « maître du monde ».

Et voici la chanson que chanta Zarathoustra, tandis que Cupidon et les jeunes filles dansaient ensemble:

Un jour j’ai contemplé tes yeux, ô vie! Et il me semblait tomber dans un abîme insondable! Mais tu m’as retiré avec des hameçons dorés; tu avais un rire moqueur quand je te nommais insondable.

« Ainsi parlent tous les poissons, disais-tu; ce qu’ils ne peuvent sonder est insondable. Mais je ne suis que variable et sauvage et femme en toute chose, je ne suis pas une femme vertueuse: Quoique je sois pour vous autres hommes « l’infinie » ou « la fidèle », « l’éternelle », « la mystérieuse ». Mais, vous autres hommes, vous nous prêtez toujours vos propres vertus, hélas! Vertueux que vous êtes! »

C’est ainsi qu’elle riait, la décevante, mais je me défie toujours d’elle et de son rire, quand elle dit du mal d’elle-même. Et comme je parlais un jour en tête-à-tête à ma sagesse sauvage, elle me dit avec colère: « Tu veux, tu désires, tu aimes la vie et voilà pourquoi tu la loues! »

Peu s’en fallut que je ne lui fisse une dure réponse et ne dise la vérité à la querelleuse; et l’on ne répond jamais plus durement que quand on dit « ses vérités » à sa sagesse. Car s’est sur ce pied-là que nous sommes tous les trois. Je n’aime du fond du cœur que la vie – et, en vérité, je ne l’aime jamais tant que quand je la déteste!

Mais si je suis porté vers la sagesse et souvent trop porté vers elle, c’est parce qu’elle me rappelle trop la vie! Elle a ses yeux, son rire et même son hameçon doré; qu’y puis-je si elles se ressemblent tellement toutes deux?

Et comme un jour la vie me demandait: « Qui est-ce donc, la sagesse? » J’ai répondu avec empressement: « Hélas oui! La sagesse! On la convoite avec ardeur et l’on ne peut se rassasier d’elle, on cherche à voir sous son voile, on allonge les doigts vers elle à travers les mailles de son réseau.

http://www.dailymotion.com/video/x47cou

Est-elle belle? Que sais-je! Mais les plus vieilles carpes mordent encore à ses appâts. Elle est variable et entêtée; je l’ai souvent vue se mordre les lèvres et de son peigne emmêler ses cheveux. Peut-être est-elle mauvaise et perfide et femme en toutes choses; mais lorsqu’elle parle mal d’elle-même, c’est alors qu’elle séduit le plus. »

Quand j’eus parlé ainsi à la vie, elle eut un méchant sourire et ferma les yeux. « De qui parles-tu donc? dit-elle, peut-être de moi? Et quand même tu aurais raison – vient-on vous dire en face de pareilles choses! Mais maintenant parle donc de ta propre sagesse! »  Hélas! Tu rouvris alors les yeux, ô vie bien-aimée! Et il me semblait que je retombais dans l’abîme insondable.  

Ainsi chantait Zarathoustra. Mais lorsque la danse fut finie, les jeunes filles s’étant éloignées, il devint triste. « Le soleil est caché depuis longtemps, dit-il enfin; la prairie est humide, un souffle frais vient de la forêt. Il y a quelque chose d’inconnu autour de moi qui me jette un regard pensif. Comment! Tu vis encore, Zarathoustra? Pourquoi? A quoi bon? De quoi? Où vas-tu? Où? Comment? N’est-ce pas folie que de vivre encore? Hélas! Mes amis, c’est le soir qui s’interroge en moi. Pardonnez-moi ma tristesse! Le soir est venu: pardonnez-moi que le soir soit venu! »

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Lire Poésie moderne et danse : le corps en question, un article de Michèle Finck.

Voir le site webnietzsche

Intensité des corps

http://www.dailymotion.com/video/3cW9QomIR1O0PaQqz

     « Faire du corps une puissance qui ne se réduit pas à l’organisme, faire de la pensée une puissance qui ne se réduit pas à la conscience. Le célèbre premier principe de Spinoza (une seule substance pour tous les attributs) dépend de cet agencement, et non l’inverse. Il y a un agencement-Spinoza : âme et corps, rapports, rencontres, pouvoir d’être affecté, affects qui remplissent ce pouvoir, tristesse et joie qui qualifient ces affects.
La philosophie devient ici l’art d’un fonctionnement, d’un agencement. Spinoza, l’homme des rencontres et du devenir, le philosophe à la tique, Spinoza l’imperceptible, toujours au milieu, toujours en fuite même s’il ne bouge pas beaucoup, fuite par rapport à la communauté juive, fuite par rapport aux Pouvoirs, fuite par rapport aux malades et aux venimeux. Il peut être lui-même malade, et mourir; il sait que la mort n’est pas le but ni la fin, mais qu’il s’agit au contraire de passer sa vie à quelqu’un d’autre.
Ce que Lawrence dit de Whitman, à quel point ça convient à Spinoza, c’est sa vie continuée : l’Ame et le Corps, l’âme n’est ni au-dessus ni au-dedans, elle est « avec », elle est sur la route, exposée à tous les contacts, les rencontres, en compagnie de ceux qui suivent le même chemin, « sentir avec eux, saisir la vibration de leur âme et de leur chair au passage », le contraire d’une morale de salut, enseigner à l’âme à vivre sa vie, non pas à la sauver. »

Gilles Deleuze, Spinoza, Philosophie pratique

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Que peuvent les corps ?

« L’artifice fait complètement-partie de la Nature, puisque toute chose, sur le plan immanent de la Nature, se définit par des agencements de mouvements et d’affects dans lesquels elle entre, que ces agencements soient artificiels ou naturels […] l’Ethique de Spinoza n’a rien à voir avec une morale, il la conçoit comme une éthologie, c’est-à-dire comme une composition des vitesses et des lenteurs, des pouvoirs d’affecter et d’être affecté sur ce plan d’immanence. Voilà pourquoi Spinoza lance de véritables cris : vous ne savez pas ce dont vous êtes capables, en bon et en mauvais, vous ne savez pas d’avance ce que peut  un corps ou une âme, dans telle rencontre, dans tel agencement, dans telle combinaison. » Gilles Deleuze

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     Un milliard et demi d’années avant Albena Denkova et Maxim Staviski, l’évolution célébrait une grande composition, un grand saut : le passage de la cellule vivante indifférenciée (procaryote)  à la cellule vivante à noyau (eucaryote). Le vivant passait alors de la reproduction par contact (division asexuée) à la reproduction sexuée, les chromosomes, autrement dit l’information génétique, étant maintenant enclose dans un noyau.

Pour reprendre une métaphore économique, c’est l’abolition du libre échange génétique, l’apparition de membranes externes et de noyau en tant que nouvelles frontières, la constitution d’un dehors exposé à l’environnement et d’un intérieur protégé. Sexualité et noyau, individuation et mort ont été inventés de pair, par accident, et sélectionnés par l’évolution.

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     Dès lors que la cellule à noyau absorbera par symbiose les algues bleues (cyanobactérie) pour en faire des chloroplastes, c’est la création possible des végétaux verts, structures capables de synthétiser de la matière organique à partir de l’énergie solaire. C’est le début des organisations pluricellulaires: coopération, sélection, différenciation et spécialisation : la formation des premiers squelettes, la création des premières interdépendances…des premiers agencements…composition des vitesses et des lenteurs…

cellule eucaryote

     Pour les tenants de l’hypothèse de l’endosymbiose, la cellule eucaryote c’est ainsi « composée » progressivement dans le temps. En effet, tout comme la mitochondrie, les  chloroplastes possèdent leur propre ADN, ce qui nous fait penser que ces bactéries d’origine exogène ont été « adoptées » au fur et à mesure par la cellule eucaryote.

Pour les structures animales à venir, c’est l’activité photosynthétique des algues bleues, puis des végétaux verts qui va absorber le carbone de l’air (CO2) : constitution des sédiments océaniques pour les premières, matière végétale pour les autres, et concourir ainsi à réduire l’effet de serre. En rejetant de l’oxygène, en tant que déchet de la photosynthèse, ces organismes permettront également la création de la couche d’ozone (O3), protection vitale contre les radiations UV.

  Atmosphères de le Terre primitive - Atmosphère actuelle

H2O

80-90%

Traces

O2

0%

21%

CO2

10-20%

Traces

N2

1-4%

78%

Date (millions d’années)

Evénements

-400 Colonisation de la terre ferme.
-500 Couche d’ozone (protection contre les UV).
-1000 Premiers métazoaires (animaux).
-1800 Apparition des cellules eucaryotes.
-2000 Apparition du dioxygène dans l’atmosphère.
-3500 Apparition des bactéries anaérobies et des cyanobactéries.
-4500 Formation de la Terre.

Chlorophylle

Ecologie, composition de rapports et agencement

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     Sous un certain angle, l’écologie pourrait être vue comme l’art de composer des rapports, des agencements. Une fois dit que ceux-ci acquièrent une certaine permanence ou durée, c’est alors également l’art de coloniser de la roche nue, comme de « contaminer » un système de pensée.

Si l’on souhaite explorer plus en avant les conséquences possibles d’une telle définition, il conviendrait donc dans un premier temps de se demander ce que l’on peut entendre par agencement.

     Deleuze nous renseignait sur la philosophie de Spinoza et sur la place de l’agencement vu comme la nécessaire rencontre, composition des corps : « l’artifice fait complètement-partie de la Nature, puisque toute chose, sur le plan immanent de la Nature, se définit par des agencements de mouvements et d’affects dans lesquels elle entre, que ces agencements soient artificiels ou naturels […] l’Ethique de Spinoza n’a rien à voir avec une morale, il la conçoit comme une éthologie, c’est-à-dire comme une composition des vitesses et des lenteurs, des pouvoirs d’affecter et d’être affecté sur ce plan d’immanence. Voilà pourquoi Spinoza lance de véritables cris : vous ne savez pas ce dont vous êtes capables, en bon et en mauvais, vous ne savez pas d’avance ce que peut  un corps ou une âme, dans telle rencontre, dans tel agencement, dans telle combinaison. »

Or il semble qu’une autre perspective éclairante de l’agencement (circuit de système) puisse être vue chez Bateson pour qui : « si nous voulons expliquer ou comprendre l’aspect « mental » de tout événement biologique, il nous faut, en principe, tenir compte du système, à savoir du réseau des circuits fermés, dans lequel cet événement biologique est déterminé. Cependant, si nous cherchons à expliquer le comportement d’un homme ou d’un tout autre organisme, ce « système » n’aura généralement pas les mêmes limites que le « soi » – dans les différentes acceptions habituelles de ce terme. »

image0029 dans -> PERSPECTIVES TRANSVERSES

     Bateson prend l’exemple d’un homme abattant un arbre avec une cognée. Chaque coup de cognée sera corrigé en fonction de la forme de l’entaille laissée sur le tronc par le coup précédent. Ce processus autocorrecteur (mental) est donc déterminé par un système global fait de l’agencement suivant : arbre-yeux-cerveau-muscles-cognée-coup-arbre.

Pour Bateson, ce n’est pas ainsi qu’un homme occidental moyen considérera la séquence événementielle de l’abattage de l’arbre. Selon son mode de pensée, il dira plutôt : «J’abats l’arbre» et ira même jusqu’à penser qu’il y a un agent déterminé, le « soi », qui accomplit une action déterminée, dans un but précis, sur un objet déterminé. Ce mode de pensée caractéristique aboutissant au final à renfermer l’esprit dans l’homme et à réifier l’arbre et « finalement, l’esprit se trouve réifié lui-même car, étant donné que le soi agit sur la hache qui agit sur l’arbre, le « soi » lui-même doit être une chose ».  

image00311 dans Art et ecologie

     Bateson prend un autre exemple d’agencement, celui de l’aveugle avec sa canne et se demande alors : « où commence le « soi » de l’aveugle ? Au bout de la canne ? Ou bien à la poignée ? Ou encore, en quelque point intermédiaire ? » Pour lui toutes ces questions sont absurdes, puisque la canne est tout simplement une voie, au long de laquelle sont transmises les différences transformées (sa définition de l’idée), de sorte que couper cette voie c’est supprimer une partie du circuit systémique qui détermine la possibilité de locomotion de l’aveugle. L’agencement est donc un facteur positif, créateurs d’ordre, de structures, de fonctions. Mais bien plus : « l’unité autocorrective qui transmet l’information ou qui, comme on dit, « pense »,   « agit » et  « décide », est un système dont les limites ne coïncident ni avec celles du corps, ni avec celles de ce qu’on appelle communément « soi » ou conscience ».

image0043 dans Bateson

     Pour Bateson les idées sont immanentes dans un réseau de voies causales que suivent les conversions de différence (i.e. des idées qui ne sont pas des « impulsions », mais de « l’information »). Celles-ci « coulent » dans des réseaux multiples, s’articulant ou s’agençant par delà les formes et contours :

  • « ce réseau de voies ne s’arrête pas à la conscience. Il va jusqu’à inclure les voies de tous les processus inconscients, autonomes et refoulés, nerveux et hormonaux »;

  • « le réseau n’est pas limité par la peau mais comprend toutes les voies externes par où circule l’information. Il comprend également ces différences effectives qui sont immanentes dans les « objets » d’une telle information ; il comprend aussi les voies lumineuses et sonores le long desquelles se déplacent les conversions de différences, à l’origine immanentes aux choses et aux individus et particulièrement à nos propres actions».

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Citations de Gregory Bateson d’après « Vers une écologie de l’esprit » – Tome 1

« Bug » de l’éco-industrie : bioéthanol versus tortillas ?

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D’après article source : Lester Brown, Earth Policy Institute , 21 mars 2007

     La réaffectation de la production céréalière américaine vers les biocarburants tire vers le haut les prix mondiaux de la nourriture. Les prix du maïs ont doublé l’an dernier. Les contrats à terme sur le blé sont échangés à leur cours le plus haut depuis dix ans. Le prix du riz est en hausse. La hausse du prix des céréales implique nécessairement un renchérissement de la nourriture (+60% sur les tortillas mexicaines). Un peu partout dans le monde, le prix de la nourriture est en croissance.

D’après le Département de l’agriculture américain, aux USA :

  • prix de gros du poulet en hausse de 10% sur 2007 par rapport à 2006 ;
  • prix de la douzaine d’œufs en hausse de 21%;
  • prix du litre de lait en hausse de 14%;

En Chine :

  • prix du porc en hausse de 20% sur 2007 par rapport à 2006 ;
  • prix de la douzaine d’œufs en hausse de 16%;

En Inde:

  • prix du blé en hausse de 11%;

     Dans le passé la hausse des prix agricoles était toujours temporaire, largement liée aux conditions climatiques affectant les cultures. Or cette situation est aujourd’hui différente comme de plus en plus de distilleries d’éthanol affectées à la production de biocarburant sont construites pour palier à la raréfaction de la ressource pétrolière.

Face à la flambée des prix du pétrole, les USA se sont lancés avec une certaine frénésie dans la production de biocarburant à base de maïs, céréale dont ils sont l’un des plus gros producteurs et exportateurs mondiaux. En conséquence, la spéculation sur la céréale s’intensifie dangereusement, les prix flambent et il est à craindre que, très vite, la quantité de maïs disponible pour l’alimentation humaine et animale ne diminue dramatiquement par rapport à celle consacrée à la production d’éthanol à des fins de carburant. En conséquence les prix mondiaux commencent à monter vers des valeurs équivalent-pétrole, dans ce qui nous apparaît comme le début d’une hausse structurelle des prix agricoles sur le long terme.

Un rapport officiel américain estime que la filière éthanol aura besoin d’environ 139 millions de tonnes de maïs d’ici à la récolte de 2008. Or le ministère de l’Agriculture ne prévoyant qu’une production de 60 millions de tonnes, il faudra donc trouver 79 millions de tonnes nécessaires ailleurs. Au moindre coût, donc en priorité au Mexique.

Corn Use for Ethanol 1980-2006 with Projection to 2008 by Earth Policy Institute

     Vers 2008, presque un tiers de la récolte de céréale américaine ira vers la filière de production d’éthanol. Réduisant ainsi les quantités disponibles en interne comme les surplus à l’export. Le grenier à céréale mondial deviendra ainsi assez rapidement la citerne d’essence américaine. A moins que Washington ne réduise les quantités de céréales utilisées comme biocarburant, celui-ci devra faire face, non seulement au mécontentement des consommateurs américains, et à une instabilité politique et économique dangereusement accrue dans les pays à faibles revenus (Mexique) et/ou largement dépendant de leurs importations agricoles (les pays à fort stress hydrique d’Afrique et du Moyen-Orient).

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     Or un chaos sur le marché mondial des céréales est tout à fait inutile quand on sait qu’augmenter l’efficacité de la consommation automobile de 20%  réduirait la consommation de carburant d’un montant identique à celui obtenu en convertissant l’intégralité de la récolte américaine en éthanol. De plus, d’après les journalistes du Chicago Sun-Times ayant mené une enquête sur la filière éthanol de maïs, celle-ci est en réalité, « très cher et inutile », et qu’en aucun cas il ne sera possible que ce biocarburant permette aux USA d’accéder à l’indépendance énergétique: « même si tout le maïs produit aux Etats-Unis en 2007 était réservé à la production d’éthanol, la consommation de pétrole ne baisserait que de 12 % ».

Voir l’article éthanol contre tortillas : les Mexicains crient famine

***

Complément et/ou correction d’information d’après topic du forum effets de terre, traduction d’un article de La Jornada de Mexico.

 » Mexico is the fourth largest corn producer in the world. Last hear, it harvested 22 million tons, mostly – although not exclusively – white conn. The volume is much lower than the United States: 280 million tons in 2005, though most is yellow corn. That county controls 70% of the world market. One difference between the other major producers and Mexico, which is important in Latin America, is that Mexican corn is grown for human consumption. We are a culture born from corn. 
The fall of Mexican corn
For decades Conasupo ( Compañía Nacional de Subsistencias Populares ) played a fundamental role in regulating the national market, stockpiling, importing and distributing grain. As a result of signing the North American Free Trade Agreement (NAFTA), the program was terminated.
Between 1994 and 1998, Conasupo was the seller of last resort. In 1998, Eresto Zedillo said that the major corporate sellers (Maseca, connected with ADM; MINSA, associated with Corn Products International, Arancia and Cargill, and merged with Continental) were in charge of the national market. The former state monopoly,which despite corruption functioned reasonably well, was transferred to private monopolies which had the objective of making rapid returns on their investments.
Dismantling Conasupo was an essential step in privatizing the corn and tortilla market. Other government measures were freeing the price of tortillas in 1999 and closing down Fidelist, a a subsidy program which provided food for 1.2 million families in poor urban areas. c
Another major change in production was to modify the form in which corn was processed. For many years, tortillas were made though a process of nixtamalization [mixing "cal" - limestone, which frees essential amino acids in the corn - in with the grain] which was an key process in milling producing tortillas. This started to change during Carlos Salinas de Gortari’s administration (1988-1994), when tortillas made with processed wheat flour were substituted for nixtamal.
Changing the method of production provoked a strong conflict between the economic actors involved, and was known as « the tortilla war. » Legal battles drastically reduced the importance of the mill and tortilleria owners. In 2003, 49% of tortillas were produced by the major industrial producer. Grupo Maseca had control of 70% of this market. An alliance of the major producers has, in the last five years, grown their market share significantly.
From a national to international price
Commercial producers in Mexico were simultaneously storing local grain and importing it. My controlling inventory, they could demand that prices be lowered or raised according to their needs. They acquired a substantial part of the spring and fall Sinaloa harvest (by far the most important in the Republic, accounting for almost 10 tons in the last spring and fall cycle) at a price of $350 pesos ($30 US Dollars) per ton per ton. They could already count on having nearly a million tons of corn, enough on hand to get into speculation, hold back supplies to articificially raise the prise. Those same ten tons from Sinaloa, sold for 3,500 pesos a ton (US$320) in Mexico City: 2,150 pesos (US$197) over what was paid.
True, the price of corn in the world market had risen in recent months, as a result of the use of corn for distillng ethanol But those increases had no relation to the price of corn in Mexico. On the Chicago Mercantile Exchange, bids reached almost US$ 144 a ton, but this is less than half the price corn was sold for in Mexcico City.
The costs of diesel, gasoline and electricity, the overhead costs for transport and processing, rose during the last months of the Vicente Fox administration. This affected the consumer price of tortillas, but overhead only accounts for 30% of the cost of production.
There was absolutely no justification for the jump in the price of tortillas. Neither rising energy costs, nor the jump in prices on the international market justified the consumer price. The central problem was speculation by the elevator owners.
Speculation is the favored market model of those that believe in fully bringing in the NAFTA regulations, dismantling the state development agencies and businesses though savage privatization. The result is a clearly inefficient market, for all intents and purposes, a speculative monopoly. Thanks to politicians like Luis Téllez y Santiago Levy, the Mexican government has cut off its hands when it comes to intervening to create order in the market.
Cargill can’t lose in México
When the price of tortillas goes sky-high, the multinational Carill wins. IF they import corn from the United States, they benefit. If, on the other hand, they export to other countries, they receive subsidies. When they seek approval for the use and explotation of grain terminals in ports, they maintain their profit margin.
Cargill, a 140 year old company, is the second largest privat ecompany in the world, and has 149,000 employees in 72 countries. Fortune magazine lists it as the 20th most important company on the planet. It buys, processes and distributes grain and other agricultural products, describing itself in its literature as: « the flour in your bread, the wheat in your noodles, the salt in your la harina en su pan, el trigo en sus tallarines, la flavor in your food. We are the corn in your tortillas, the chocolate in your dessert, the additives in your gasoline. We are the oil in your salad dressing, and the meat, pork or chicken you have at dinner. We are the cotton in your clothes, the stuffing in your sofa and the fertilizer in your field. »
The multinational has had a presence in Mexico for more than 80 years, beginning with forestry operations in the Northeast. In 1972 it opened it’s first office in the country with six employees. When NAFTA came in and after Conasupo ceased operations, there was a huge gap in the Mexican market, which the international giant was poised to fill. It’s presence in Mexican agriculture is overwhelming.
Under NAFTA, corn imports from the United States were subject to yearly caps, with imports over the yearly amount subject to tariffs. However, the Mexican government unilaterally eliminated this protection, permitting any amount of grain to come in without penalties. Between 1994 and 2001, the import quota rose to nearly 13 million tons. The two major agricultural corporations, Cargill and ADM sold most of the U.S. corn sold in Mexico, and benefited enormously from the end of tariffs. In addition, they also benefited from the indirect subsidy they received from Washington in the form of export credits.
Recources under the export credit program were for shareholder costs, storage, handling, transport and cabotage * for transporting Sinaloa grain, as permitted under the regulations of the time, were generous to Cargill. When, as it happened in 2006, the multinational exported hundreds of thousands of tons of grain to other countries, it received export subsidies from the government.
Commercial white corn producers in this country receive what is called an « objective price ». For most of the internatinonal market, the « indifferent price » is used, calculated on the international market by reference to the costs of storage and transport from grain elevators in New Orleans to the ultimate Mexican consumer. The difference between the « objective » and « indifferent » p[rice can fluctuate between 450 and 500 pesos (US$ 40-45) per ton, which is paid by the government, and not by the commercial enterprise, which only receives the « indifferent » price. Cargill, as one of the most important grain elevator operators, receives an important indirect subsidy this way.
En 2002 the Comisión Federal de Competencia [Mexican equivalent of the Federal Trade Commission] authorized Cargill to develop, use and exploit a private port in Guaymas, Sonora, together with Grupo Contri, whose main activity is buying, storing and selling other grains – mostly wheat, corn and sorghum. The giant company also controls the principal grain port in Veracruz.
Cargill was little known of in Mexico until in 2001 Congress approved a special tax on the production and importation of fructose, a corn-based sweetener. The multinational imports around 385,000 tons annually. The affair was a disaster in international commercial courts. Mexico lost their case for the tax.
Cargill is considered responsible for the rise in tortilla prices, having bought and stored 600,000 tones of Sinoloa corn for 650 pesos a ton (US$60) which it turned around months later at 3,500 pesos per ton (US$320). The response was to lift import caps on cereal grains, which is supposed to lower prices and bring benefits. Lorenzo Mejía, president of the Unión Nacional de Industriales de Molinos y Tortillerías (Milling and Tortilla Industrial Union) says, « the millers cannot import grain and use Cargill’s services:
The company has rejected the indignant wave of accusations it has faced. It denies being « the corn in your tortillas » – as it says in its consumer brochures – and, in a press release, claimed, like consumers, masa-produers and tortilla vendors, to be worried by the high price of corn. Cargill blames the price rise on the free market and tells the Mexican public that the rise is due to purchasing by pork producers.
La quiebra de un modelo
The rise in the price of tortillas has demonstrated the weakness of the Mexican state against the monopolies. They control the marketing and production of corn, and can set off a round of inflation without impunity. The Executive has no arms to fight this war.
The federal government’s response to the rise has been pathetic. It closed a few tortillerías, and made a media show of the offensive against abuse and blamed the vendors. It announced no measures to control the price of production, or to alter the basic rules. While the producers approve of the government’s response, claiming they are not responsible for the price jump.
The President has announced that it will allow white corn to be imported without tariffs. But those acquiring the cereal are the same ones responsible for the price increases, and who already control the inventory. And these imports are a blow to Mexican farmers, worried about the country being flooded with bad quality grain, likely to contaminate their seed with transgenetic varieties or seed infected with aflatoxina.
Of course, the Calderón administration has buried the information on the speculators. ASERCA 1 has a detailed report detailed. The present system, in which the federal government subsidizes commercial storage and sale of corn, requires accurate reporting and the ability to control reserves. In spite of this, we only hear of the governments inability to inject itself into the market. The President is not interested in the crisis, except that it gives his government a opening to project legitimacy to the poor. Or, to appear decisive if he steps in to control inflation.
Since the start of NAFTA in January 1994, tortilla prices have risen by 738%. The result has been less consumption, of worse quality.
Mexican food supply now depends much more on the United States. Native seeds have been infected with imported transgenetic varieties. Rural migration has left many rural communites deserted except for the old, woman and children. A substantial part of the cereal production region is at risk, or could be turned to other crops. These other crops will also face a price drop as corn fields are converted to more profitable harvests.
Today we are living through a new tortilla war, different than that in the 90s when different businesses faced off. Now, it is the big argo-businesses against the poor. In this war, the government of Felipe Calderón has clearly sided with the monopolies who helped him gain the Presidency
.  »

 

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